Sur Radio Liberté, des collégiens envoient de bonnes ondes
Dans le cadre de la Semaine de la presse et des médias à l’école, des interventions se déroulent un peu partout en France et en Seine-Saint-Denis. De lundi à vendredi, le collège Liberté de Drancy diffuse ainsi sur sa web-radio des émissions quotidiennes concoctées par ses élèves, avec invités, interviews et reportages. Comme les vrais !
« Bienvenue sur Radio Liberté, la radio du collège. Avec nous aujourd’hui Antonin Padovani, journaliste spécialisé dans les enjeux environnementaux... » Dans le CDI du collège transformé pour la semaine en studio d’enregistrement, Alyssa, dans son rôle de présentatrice, est un peu tendue au moment de lancer l’émission du jour… Mais pour sa toute première fois, la jeune 4e s’en tire quand même très bien.
Kaïs, Denisa et Ismaël, élèves de 6e, enchaînent avec l’interview du journaliste invité. « Pourquoi avez-vous choisi ce métier ? » « Pourquoi vous êtes-vous spécialisé dans l’écologie ? » « Quelles sont vos sources d’information ? » Ils ont bien préparé leurs questions, et Antonin Padovani, journaliste indépendant, joue le jeu. Pendant 15 minutes, les quatre élèves impliqués s’immergent dans le quotidien d’un journaliste radio. Les sujets inscrits sur le conducteur du jour défilent : interview du journaliste, reportage sur le potager du collège puis présentation du défi écolo « Ma Petite Planète ». Cerise sur la radio : l’émission, qu’on peut retrouver sur le site de l’établissement, est diffusée dans la foulée sur la sono du collège.
« C’était bien, je ne sais pas si à votre âge, j’aurais eu le courage de me lancer », les complimente Antonin Padovani, l’invité, une fois que le générique de fin d’émission a retenti. Dans le CDI, la tension retombe, les langues se délient : « C’était stressant, mais une fois qu’on est dedans, ça se passe bien », se réjouit Kaïs. « J’ai retenu du passage de M. Padovani qu’il était libre de proposer ce qu’il voulait. Je ne sais pas vraiment encore ce que je veux faire, mais comme j’adore aussi le foot, journaliste sportif, ça m’attire bien », s’enthousiasme le petit 6e. Denisa, sa camarade d’émission, a elle aussi aimé l’expérience, mais pas au point d’en faire son métier : « Etre journaliste, ça a l’air assez compliqué. Il faut recueillir les avis des autres et ne pas se tromper. Mais comme je m’intéresse aux animaux, j’ai quand même bien aimé son intervention ».
Un peu plus tôt, Antonin Padovani avait en effet rendu visite à la classe entière pour leur présenter son métier à partir d’une de ses productions : un reportage écrit dans le magazine écologiste Mouvement Up (anciennement Up le mag) sur la mobilisation de militants autour de la Corniche des Forts, en mars 2019 à Romainville.
Rendre les élèves acteurs
Et le programme des réjouissances ne fait que commencer : après l’environnement, ce seront les fake news qui seront abordées le mardi, puis la culture, les discriminations et enfin le métier de journaliste. Avec à chaque fois une émission dédiée, avec force invités et reportages à la clé. Mardi, une journaliste reporter d’images de France 3 Ile-de-France était par exemple conviée pour échanger sur la notion de fiabilité des informations, et jeudi c’est l’auteure de théâtre Penda Diouf, engagée par ailleurs dans une fiction radiophonique avec certains élèves du collège, qui fera l’honneur de sa présence. « Avec les collègues et les CPE, on tenait absolument à faire quelque chose pour la Semaine de la presse et des médias à l’école. Et comme on a lancé cette année un atelier web-radio hebdomadaire, on est resté sur cette idée. C’est un média intéressant je trouve, peu écouté par les élèves, mais qui les force à être actifs et attentifs, car le direct ne pardonne pas », raconte Maxime Fichet, professeur d’histoire-géographie et cheville ouvrière du projet.
Présent lui aussi dans le studio d’enregistrement, le principal Djamal Meliani semblait satisfait de cette première : « Pour eux mais aussi pour nous, corps enseignant, ce genre d’atelier est capital. Compte tenu de la masse d’informations qui parvient aux élèves aujourd’hui, il est important de développer chez eux un sens critique, une capacité à argumenter. Mais au-delà de ça, ça peut aussi les aider dans leur quotidien, sur leur usage des réseaux sociaux par exemple qui peut être problématique. Ils prennent tout au pied la lettre, la moindre rumeur devient vérité… »
En poste depuis 3 ans au collège, Maxime Fichet renchérit : « Le but d’un tel projet est d’abord d’ouvrir les horizons des élèves en matière d’information. Souvent, ils ont une vision du paysage médiatique qui se réduit à deux médias : Drancy média et BFM TV. On veut leur montrer que le journalisme est plus divers que ça. Et puis, on pense aussi que c’est en étant acteurs qu’il vont comprendre des notions qui restent parfois abstraites pour eux : ces questions de sources, de recoupage de l’information... »
Ce genre de projets devrait se démultiplier dans les prochains mois, avec le lancement du programme Agora. Proposé par le Département en réaction notamment à l’assassinat du professeur d’histoire-géographie Samuel Paty en octobre dernier, ce dispositif d’éducation aux médias a pour ambition de s’étendre aux 130 collèges publics du territoire. Animés à chaque fois par un journaliste, un spécialiste des médias ou un dessinateur de presse – ils sont 170 à avoir répondu à l’appel – ces ateliers ont pour but de renforcer la liberté d’expression et le sens critique des élèves.
Photos : ©Sylvain Hitau
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