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La Belle Scène Saint-Denis, quoi de neuf en Avignon ?

Jusqu’au 19 juillet, le Département sera à nouveau présent au Festival d’Avignon pour y montrer la vitalité de la création du territoire en matière dramatique. A travers La Belle Scène Saint-Denis, dispositif porté par le Théâtre Gérard-Philipe de Saint-Denis et le Théâtre Louis-Aragon de Tremblay-en-France, mais aussi à travers d’autres partenaires culturels.

De notre envoyé spécial au Festival d’Avignon, Christophe Lehousse

De la danse, du théâtre, des one-man shows et même des déambulations sonores, la Seine-Saint-Denis va une fois de plus prouver toute l’étendue de son talent et de son inventivité, cette année, au Festival d’Avignon. Comme tous les ans, les productions nées dans le département sont ainsi nombreuses, à commencer par celles de la Belle Scène Saint-Denis.
Né il y a 9 ans d’un partenariat entre le Théâtre Louis-Aragon de Tremblay-en-France et le Théâtre du Blanc-Mesnil puis poursuivi avec l’attelage Louis-Aragon/TGP de Saint-Denis, ce dispositif, soutenu par le Département, permet de donner à voir quelques-uns des temps forts en matière de théâtre - pour le TGP - et de danse - pour le Théâtre Louis-Aragon - de l’année écoulée ou à venir dans le 93.
Cette année encore, c’est un regard en prise avec le monde qui nous entoure et des créations représentatives de la diversité culturelle de la Seine-Saint-Denis que s’attacheront à défendre les pièces présentées dans la cour ombragée de la Parenthèse.
« Anguille sous roche », pièce inspirée du roman d’Ali Zamir et créée au TGP en janvier 2019, fera entendre la détresse des migrants et la frilosité des pays d’accueil à travers le monologue d’Anguille, jouée par Deborah Lukumuena, révélée par l’excellent Divines, qui lui a valu le César du meilleur second rôle.
« Les rues n’appartiennent en principe à personne » fera elle preuve d’originalité en sortant des murs classiques du théâtre et en proposant aux spectateurs une déambulation sonore. Dans les rues d’Avignon pour les festivaliers, puis dans un deuxième temps pour les spectateurs de Seine-Saint-Denis puisque la pièce de Lola Naymark investira les rues du département en juin 2020. Avec à chaque fois ce principe : 4 habitants des lieux nous parlent de leur rapport à l’espace public, dans des témoignages diffusés sous casque audio.

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Retour à la Parenthèse pour les spectacles de danse. Six petites formes, proposées par le théâtre Louis-Aragon à partir des créations de ses artistes en résidence, exploreront de nombreuses traditions chorégraphiques de par le monde. Hip-hop pour « Pas seulement », du chorégraphe Amala Dianor, danse alaoui du Maghreb pour « Gouâl », de Filipe Lourenço, danse inspirée d’une tradition du Burkina Faso pour « Koteba », et même savant mélange entre tradition baroque et danse contemporaine pour « Lou », point de rencontre entre les travaux de la Compagnie des Fêtes Galantes et Mickaël Phelippeau. On mentionnera encore « We are not going back », nouveau travail sur les migrations de Mitkhail Alzghair et « L’écho d’un infini », sur le dialogue intergénérationnel.
Mais la Seine-Saint-Denis en Avignon, ce n’est « Pas seulement » ça, pour reprendre le titre du spectacle d’Amala Dianor. D’autres structures du territoire sont également présentes dans la cité des Papes, souvent avec des créations directement inspirées d’enjeux sociétaux propres au département. « Désobéir », créé au Théâtre de La Commune dans le cadre des Pièces d’actualité, fera ainsi entendre les voix de quatre femmes des deuxième et troisième générations de l’immigration qui se sont opposées pour tracer leur chemin dans la vie : à l’autorité parentale, aux stéréotypes, à certaines traditions ancestrales… Une pièce pleine de vie et de caractère, qui rappelle par moments L’Esquive de Kechiche. « Ils n’avaient pas prévu qu’on allait gagner » porte quant à lui la parole de certains enfants de l’Aide Sociale à l’Enfance. Produite par la MC93 de Bobigny, cette pièce poignante est née de témoignages d’enfants placés en foyer d’accueil, recueillis par l’auteure Christine Citti.

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A ne pas manquer non plus : le très émouvant "Tous mes rêves partent de Gare d’Austerlitz", création de Mohamed Kacimi et Marjorie Nakache pour le Studio Théâtre de Stains sur l’univers carcéral féminin. Une pièce très sensible, écrite à partir de témoignages de femmes réellement incarcérées, qui redonne tout son sens à l’art comme "évasion".
On pourra enfin citer « Le frigo des gringos », seul-en-scène grinçant sur la colonisation de l’Amérique latine du touche-à-tout Yvan Loiseau, également photographe en Seine-Saint-Denis.
De quoi alimenter largement une olympiade culturelle – dialogue entre art et sport d’ici les Jeux de 2024 - que le Département souhaite lancer et animer à partir de 2020 et sur laquelle portera d’ailleurs une rencontre organisée à Avignon entre Stéphane Fiévet, directeur de l’Olympiade culturelle, et Mathieu Hanotin, conseiller départemental. En Seine-Saint-Denis, on n’a pas de pétrole, mais on a des idées !

Photos : ©Pascal Victor et ©Pole Sud

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