Chez DEAFI, solidarité, exigence et réussite
DEAFI est une entreprise montreuilloise qui forme et emploie des personnes sourdes et malentendantes et propose des services de relations clientèle en langue des signes à de grandes entreprises. Ou comment, avec des personnes éloignées de l’emploi, des idées et de la méthode, on peut atteindre l’excellence.
Ce n’est pas parce qu’une entreprise a une forte dimension sociale qu’elle ne peut viser l’excellence et avoir des listes de clients prestigieux ! L’entreprise montreuilloise DEAFI est de celles-ci. DEAFI propose à de grandes entreprises recevant de très nombreux appels (SFR, ENGIE...) de leur fournir un service de relations clients adapté aux personnes sourdes ou malentendantes. Une idée qui, comme souvent lorsqu’il s’agit de handicap, est née d’une rencontre. Jean-Charles Correa, fondateur de DEAFI, explique : « J’avais un ami sourd, et un des problèmes qu’il rencontrait était de rentrer en contact avec des services clientèle de grandes marques ou bien de services publics, faute de pouvoir communiquer en langue des signes. D’autre part, en rencontrant d’autres sourds, je me suis aperçu que bien peu exerçaient une profession. Il leur est très difficile de suivre un cursus d’études supérieures, peu adapté à leur mode de communication. »
Aussi, lorsqu’au détour de la quarantaine et après une première partie de carrière de cadre supérieur au sein de grandes entreprises informatiques Jean-Charles Correa a envie de changer de vie, il se souvient de ce constat. « Je voulais plus d’indépendance et donner du sens à mon travail. Je me suis décidé à créer un centre de relations clients adapté aux personnes sourdes ou malentendantes, clients comme employés. Le but étant à la fois d’offrir une meilleure accessibilité des services clients et améliorer l’employabilité des personnes sourdes ou malentendantes en leur proposant une formation et un emploi. »
Plutôt qu’un emploi, offrir un métier
Première étape, constituer l’outil et le principal argument de l’entreprise : un personnel formé et motivé. Pour cela, Jean-Charles Correa s’est tourné vers l’AFPA (Agence nationale pour la formation professionnelle des adultes) et ensemble ils ont monté une formation de conseiller relations clients à distance à destination de personnes sourdes ou malentendantes, une première. "Plus qu’un emploi, ils ont désormais un métier, sont qualifiés. A l’issue des quatre mois de formation, huit personnes sur dix ont rejoint notre équipe, en CDI raconte Jean-Charles Correa. Pour la plupart, il s’agissait de leur premier contrat à durée indéterminée. J’ai été particulièrement touché par la joie d’une entre elles, premier CDI à 41 ans. " Mais pour autant leur formation n’était pas terminée. Il leur fallait apprendre tout le savoir spécifique des entreprises pour lesquelles ils travaillent : les questions techniques sur les box de SFR, le détail des factures d’ENGIE...
Les réponses se font en visio et en langue des signes française, Jean-Charles Correa précise : " pour certains clients qui demandent une spécificité technique, comme les banques ou bien lorsqu’un client de L’Oréal a besoin de réponses d’un dermatologue, nous avons également des traducteurs français-LSF (langue des signes française). "
Bienveillance et exigence
Amateur de street art, Jean-Charles Correa est fier de montrer la fresque qu’il a commandé au graffeur Marko93 pour symboliser son entreprise : " Des mains bien sûr, pour communiquer, et un visage, avec mille couleurs pour dire qu’ici tout le monde peut travailler quels que soient ses origines, ses opinions, ses croyances, ses orientations sexuelles... tout le monde y a sa place du moment qu’il adhère aux valeurs de l’entreprise." Désormais, DEAFI compte 67 collaborateurs, à Montreuil, Lille, Paris et bientôt Lyon et entre 2018 et 2019, elle a enregistré + 34 % de croissance. "Nous cherchons à être les meilleurs en qualité, pas forcément les premiers en termes de volume." La loi de 2018 sur l’accessibilité numérique offre de grandes perspectives de développement, et les équipes de DEAFI ne manquent pas d’idées. "Les besoins des entreprises évoluent, les marques veulent fidéliser leurs clients, être plus proches d’eux. Nous voulons proposer d’utiliser les réseaux comme WhatsApp, encore peu utilisés dans les relations clients."
Le modèle économique de DEAFI est également exportable dans d’autres pays d’Europe, l’entreprise est d’ailleurs accompagnée par des étudiants d’HEC sur ce thème. Jean-Charles Correa conclut : "Lorsqu’on travaille dans le domaine du handicap, qu’on est une entreprise de Seine-Saint-Denis, on a l’impression qu’on ne peut que "se débrouiller". Nous, nous voulons démontrer qu’on peut à Montreuil travailler avec des personnes en situation de handicap, et être les meilleurs auprès des clients les plus exigeants."
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