Sanseverino, toujours la pêche
Jeudi 31 mars, « Planète Sanseverino », film sur le travail de création musicale du chanteur et guitariste, sera projeté au cinéma Le Méliès de Montreuil. L’occasion de revenir avec l’auteur du « Tango des gens » sur sa carrière, Montreuil qu’il habite depuis 15 ans et sa boulimie de projets.
Ce jeudi, vous êtes au Méliès pour y présenter « Planète Sanseverino ». Plus qu’un film sur vous, c’est surtout un film sur comment se construit un album…
« Oui c’est ça. C’est un film sur le boulot d’artiste, c’est pas un film people. Avec Philippe Crnogorac et Mathilde Mignon, on s’est rencontrés autour d’un projet mené avec des détenus et un lycée de Montreuil, dont je devais faire la musique. Après ça, les deux réalisateurs ont émis le souhait de filmer mon quotidien en pensant que ça pouvait être intéressant de me voir jongler entre différents projets : l’album « Montreuil-Memphis » sur lequel je bossais à l’époque et l’opéra « Qui de l’homme ou de la femme a le plus de plaisir ? » avec ma compagne Cécile Richard… L’idée, c’est de montrer que l’art aussi, ça se fabrique, ça ne naît pas comme ça… »
On voit dans ce film toute la complicité que vous avez avec vos musiciens, le réalisateur de plusieurs de vos albums Benjamin Constant…
« Oui, j’ai envie de vous dire que la complicité, c’est la base. S’il n’y avait pas de complicité dans un boulot comme celui-là, je pense que ce serait vraiment pourri... »
Comment naissent vos chansons ? Comment sont par exemple nées celles de votre dernier album « Les deux doigts dans la prise » ? Ce sont des réflexions que vous notez dans un carnet et sur lesquelles vous revenez plus tard ?
« Non, ce n’est pas comme ça que ça se passe. Très souvent, la musique me vient d’abord. Pour ma chanson « Au Medef » par exemple, j’avais en tête une rythmique demi-funk. Je me demandais ce qu’on pouvait mettre là-dessus, et puis j’ai eu l’idée de dire tout le bien que je pensais du Medef. J’en ai donc fait une gentille satire qui rappelle quand même le trait de génie que c’est de répondre aux syndicats de travailleurs par un syndicat de riches… »
Un de vos albums précédents s’appelait « Montreuil-Memphis ». En couverture, on vous voit poser devant le métro Robespierre. Qu’est-ce qui fait votre attachement à cette ville ?
« J’aime cette ville : ça fait 15 ans que j’y vis, 30 ans que j’y traîne. D’abord, la moitié des musiciens parisiens sont toujours en train d’enregistrer quelque part à Montreuil. Ce qui ne fait pas de cette ville un repaire de bobos branchés, contrairement à ce qu’on peut entendre. C’est une ville mélangée, et c’est ça que j’aime : il y a de tout, des artistes, qui ne roulent pas forcément sur l’or d’ailleurs, des travailleurs, des chômeurs. Montreuil, c’est une ville populaire, avec des dizaines de cultures différentes représentées. »
On vous associe souvent au jazz manouche et à Django Reinhardt, qui a aussi joué à Montreuil. C’est pour ça aussi que vous êtes venu à Montreuil ?
« Non, c’est du pur hasard. On me parle souvent de Django parce que le premier album que j’ai fait empruntait au jazz manouche et au swing, mais j’ai plein d’autres influences. Je ne suis d’ailleurs pas un très bon musicien de jazz manouche. Ca demande une virtuosité et une endurance physique que je n’ai pas forcément. Moi j’aime bien aussi mettre les deux doigts dans la prise, justement… Le swing, évidemment que j’aime ça, mais pas plus que le blues, le country ou le rock... »
Comment la musique est-elle entrée dans votre vie ?
« Un peu par hasard. Par un copain en fait, avec qui j’ai fait les 400 coups de la maternelle à la seconde, Sylvain Lecuret. Il jouait de la guitare et donc je m’y suis mis aussi. Au début, la guitare, ça m’attirait pas des masses parce que dans les années 70, tout le monde aimait ça. Donc moi, pour me démarquer, j’aimais pas. Mais je me gourais ! C’est après que j’ai compris que tout ce que j’aimais pas dans la vie, en fait c’est parce que je l’aimais… Bon, sauf le Medef ! On reprenait des chansons qu’on aimait bien : Lavilliers, Béranger, de la musique country. On s’est mis à écouter plein de trucs différents et on essayait de reproduire. C’était ça aussi la force des groupes punk de l’époque : ils formaient un groupe avant même de vraiment savoir jouer. Je trouve ça super formateur. Si vous aimez la musique, il faut foncer dans le tas ! »
Propos recueillis par Christophe Lehousse
Le documentaire passera ensuite sur Via93.
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