Les gares de Seine-Saint-Denis : lieu crucial dans la ville
Les gares ont toujours été un lieu de vie crucial depuis l’avènement du chemin de fer au 19e siècle. Point de déplacement et de ralliement, elles ont contribué à l’extension et au dynamisme des villes qu’elles desservent puis à l’émergence de nouveaux quartiers. Pour le cas du Bourget, sa gare régulatrice joua même un rôle-clé à l’arrière du front pendant La Grande Guerre.
2030 est l’horizon de gares nouvelles pour les habitant.e.s de Seine-Saint-Denis proches des lignes 15 et 16 du Grand Paris Express qui les mèneront à une vitesse décuplée vers une autre destination de banlieue sans avoir à repasser par Paris. Si Le Bourget, Sevran-Livry, Bobigny pour ne citer qu’elles vont voir leurs quartiers s’épanouir près de ces gares flambant neuves, leur histoire commune avec le rail et la maison qui l’accueille ne date pas d’hier.
Au Bourget
Pendant la Première Guerre mondiale de 14-18, la gare régulatrice du Bourget fonctionne pour approvisionner différentes armées.
Ainsi elle occupe une place centrale à l’arrière du front pour notamment organiser la logistique, fabriquer des munitions, soigner les blessés etc. La ville étant devenue un lieu de cantonnement, de nombreux soldats y séjournaient. Des courriers et des cartes postales étaient envoyés depuis le Bourget popularisant son nom aux 4 coins de la France auprès des êtres chers qui recevaient les nouvelles tant attendues. Combien de blessés et de malades doivent leur salut au réseau ferré ? Car près de 3 000 hommes par mois transitent par la gare du Bourget, blessés, assis ou même couchés. Nombreux sont ceux qui terminent leur convalescence dans les dépôts installés à proximité de cet énorme noeud ferroviaire.
Toutes les villes alentour participaient aussi à l’effort de guerre. La gare de triage mordait sur Le Blanc-Mesnil au nord et la gare d’échange au sud sur Drancy-Bobigny. La Courneuve, Aubervilliers, Drancy et Dugny abritaient dépôts pour les éclopés, hôpitaux, usines de guerre, moulin et boulangeries, et unités militaires. Dugny était aussi une place stratégique avec l’aviation du Camp retranché de Paris. L’ennemi ne s’y trompa pas puisqu’il bombarda avec son artillerie lourde surnommée La Grosse Bertha la zone de la gare régulatrice du Bourget frappant notamment l’église du Blanc-Mesnil en mars 1918 alors que celle-ci était bondée un dimanche des Rameaux. Sept fidèles furent tués et vingt-deux autres blessés.
A Livry-Gargan
Le chemin de fer représente une révolution sans précédent dans l’histoire de l’humanité. En modifiant la géographie économique et sociale du pays il marque profondément l’histoire du 19e siècle. En 1832 le Parlement français vote un crédit pour l’étude d’un système de chemin de fer et dès 1833 le gouvernement met en place le plan Legrand, qui définit le tracé en étoile autour de Paris des grandes lignes qui vont couvrir le territoire nationale et traverser beaucoup de villes de la Seine-Saint-Denis qu’on appelait encore Seine-et-Oise. Parmi le réseau est séquano-dionysien furent créées les lignes Paris-Strasbourg, Paris-Mulhouse, Paris-Soissons, Aulnay-Rivecourt. Des lignes plus locales sont aussi créées comme celle entre Bondy et Aulnay-sous-Bois. Connue aujourd’hui comme la ligne des Coquetiers, elle était surnommée au début du 20e siècle « La ligne de Monsieur Gargan ». Louis-Xavier Gargan, promoteur du projet et à l’origine en 1875 de la gare de Gargan. fut aussi l’inventeur du wagon-citerne. En plus d’amener le train, il créa sur ce territoire une importante industrie, source d’un grand développement économique et urbain pour la commune. Livry-en-Aulnoye devint en juillet 1912 Livry-Gargan consacrant ainsi l’union de Livry et du nouveau quartier Gargan organisé autour de ses usines.
Épinay-sur-Seine
Qui dit gare dit architecture et le style en vogue au 19e siècle impacte l’apparence de ces nouvelles bâtisses. L’un de ces joyaux de l’architecture ferroviaire est visible à Épinay-sur-Seine.
Depuis décembre 1852, le chemin de fer dessert Épinay mais la gare est loin du village (le centre-ville actuel) où demeure la majorité des habitant.e.s. Avec la prolongation jusqu’à Ermont-Eaubonne de la ligne dite des Docks entre la gare du Nord et les docks de Saint-Ouen (servant notamment à transporter les productions maraîchères), un magnifique bâtiment est inauguré en 1908 pour desservir la ligne.
Ressemblant à une villa de bord de mer de style Belle-époque, son apparence est particulièrement inventive jouant sur les contrastes et les matériaux. Aujourd’hui gare du Transilien de la ligne C, elle se visite lors d’un parcours touristique proposé par Plaine Commune tourisme.
Prévus depuis plusieurs années, les travaux de transformation de l’ancienne gare de déportation de Bobigny ont débuté. À partir de juillet 1943 et jusqu’en août 1944, succédant à celle du Bourget, la gare de Bobigny fut le lieu de départ de près d’un tiers des Juifs déportés de France vers Auschwitz-Birkenau. À partir de ce lieu, 22 500 hommes, femmes et enfants subirent l’épreuve de la déportation. Ce site industriel et ferroviaire d’intérêt historique fut tardivement redécouvert au début des années quatre-vingt-dix, alors qu’un des bâtiments qui le compose était menacé de démolition. Depuis plusieurs années, la ville de Bobigny, qui a fait l’objet d’une cession du lieu pour le franc symbolique en 2005, nourrissait le projet d’en faire un lieu de mémoire. Le bâtiment voyageur inscrit à l’inventaire supplémentaire des Monuments historiques, une convention de partenariat fut signée en 2010 avec la SCNF pour fonder un mémorial, mettant le site à disposition de la commune durant 70 ans. La municipalité espère pouvoir l’inaugurer en avril 2022, lors de la célébration de la mémoire des victimes de la déportation dans les camps de concentration et d’extermination nazis de la Seconde Guerre mondiale.
Projet du mémorial qui devrait ouvrir en 2022
Ville de Bobigny- Projet d’aménagement paysager et scénographique - comité de pilotage du 14 octobre 2020.
A lire aussi : Les travaux enfin lancés pour transformer la gare de déportation de Bobigny en lieu de mémoire
Après les gares d’antan focus sur les gares du futur !
Le Grand Paris Express ou le plus grand chantier du siècle !
Le saviez-vous le tracé du Grand Paris Express (GPE) passera par notre département via les lignes 15,16 et 17 ! Ces nouvelles lignes et ces gares représenteront un atout stratégique pour notre territoire.
Beaucoup d’habitant.e.s du territoire bénéficieront ainsi de temps de transport réduits et de rénovations importantes autour des gares comme dans le centre de Bobigny autour de la station Bobigny - Pablo-Picasso par exemple.
Pour accompagner ce projet pharaonique du GPE, le Département a notamment investi près de 10 millions d’euros pour le réaménagement de routes départementales du futur carrefour des Six-Routes à La Courneuve, à proximité des futures lignes 16 et 17. « La collectivité a aussi réalisé des études techniques pour organiser l’intermodalité des gares Pont-de-Bondy et Drancy-Bobigny » déclare Bertrand Masquelier, chef du bureau départemental des transports et des mobilités. « Et les agents ont contribué au dévoiement de réseaux d’assainissement sous la ligne du RER B à Sevran-Beaudottes. »
Le chantier hors-norme du GPE retardé par un environnement urbain complexe et par la crise sanitaire, subit certes des retards. Mais d’ici 2030, la Seine-Saint-Denis accueillera une vingtaine de gares (sur les 68 prévues) et les 200 kilomètres de réseaux construits autour de Paris jusqu’en 2030 permettront de désenclaver certains territoires. Comme pour l’ouverture des stations de la ligne 14 en décembre 2020 à Saint-Ouen qui apportèrent une vraie bouffée d’oxygène aux Audonien.ne.s, ces nouvelles gares et lignes amélioreront la qualité de vie !
Références
Article réalisé avec le concours des Archives Départementales de la Seine-Saint-Denis, du Service du patrimoine culturel du Département, de la Ville de Bobigny (via Bénédicte Penn) et de Carine Arassus pour le Grand Paris express.
Bibliographie
Jeunesse Préhistorique et Géologique de France. Commémoration du Centenaire de la guerre 1914-1918 Le Bourget : Gare régulatrice et efforts de guerre, Tome 1 et Tome 2. Par Jean-Pierre de Régibus, Henri Proux et Jérôme de Régibus. Exposition au Centre culturel André Malraux du Bourget.Sept-oct 2014 (4/2308).
La ligne de M. Gargan : l’histoire ferroviaire de l’Est parisien / textes et photogr.Gérard Géraud, Michel Mérille. - [Les Pavillons-sous-Bois] : Amarco Éditions, 2004. -351 p. : ill., plans. ; 29 cm. ISBN 2-9509571-8-8 Ligne de Gargan dite des Coquetiers.(4/1728)
La gare d’Épinay-sur-Seine : un joyau de l’architecture ferroviaire / ill. en noir et encoul. dans "Epinay en Scène", n° 98, juin 2010 - pp. 32-33. Per 23(13).
Photos :
Gare de Bobigny : Laurent Desmoulins / Département de la Seine-Saint-Denis, 2006.
Photo en une de l’article :
Des courriers et des cartes postales étaient envoyés depuis le Bourget popularisant son noms aux 4 coins de la France. Il est écrit sur cette vue : « Cette flèche t’indique la rue de mon cantonnement ».
Crédit : Le Bourget - L’avenue de la Gare. 2Fi Le Bourget/98. 1910-1918. Archives départementales de la Seine-Saint-Denis.
Légende 1 :
La soupe pendant le cantonnement dans la zone d’action de la gare régulatrice du Bourget.
Crédit : Le Bourget - Guerre - Soldat faisant la soupe. 2Fi Le Bourget/75. 1914-1915. Droits réservés - éditions Pays de France - imprimerie de Vaugirard / Archives départementales de la Seine-Saint-Denis.
Légende 2 :
Le Bourget - Entrée de la gare de triage.
Crédit : 2Fi Le Bourget/95
Droits réservés - éditions Ernest-Louis-Désiré Le Deley (ELD) / Archives départementales de la Seine-Saint-Denis.
Légende 3 :
La gare d’Épinay en 2020. Photo Patricia Lecomte.
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