La ligne 14 : enfin à Saint-Ouen !
Depuis le 14 décembre 2020, la ligne 14 du métro, prolongée vers le nord de 4 stations, dessert enfin Saint-Ouen et permettra de rallier Châtelet en 15 minutes. Si les habitant·e·s de Seine-Saint-Denis accueillaient lundi cette nouvelle avec enthousiasme, son président Stéphane Troussel rappelait toutefois le retard important pris par ce prolongement et les difficultés de l’État à tenir ses engagements sur le reste des projets de transport dans le département.
« Je peux vous dire qu’on l’a attendue cette ligne 14 ! Tellement que je ne l’appelais plus 14 mais désirée ! » Fanta a le sens de la formule. Employée dans un restaurant à Opéra, cette Audonienne oublie un instant la grisaille du confinement et son chômage forcé pour « fêter enfin une bonne nouvelle ». En ce lundi 14 décembre, elle et une centaine de personnes attendent patiemment que la grille métallique de la nouvelle station « Mairie de Saint-Ouen » se lève pour laisser les habitant·e·s de Saint-Ouen découvrir « leur » ligne 14.
« Ça va être tellement plus facile... Enfin, on n’aura plus à subir cette satanée ligne 13. Ça va représenter à la fois un gain de temps et d’énergie. D’ordinaire, on met 45 minutes à rejoindre Châtelet. Là on y sera en 15. Moi qui suis souvent en vadrouille avec mes petits enfants, ça va me changer la vie », se réjouit Stella de son côté, heureuse retraitée.
C’est une constante dans les témoignages de tous les Audonien·ne·s : la joie suscitée par le prolongement de la ligne 14 sur 4 nouvelles stations de Saint-Lazare jusqu’à Mairie de St-Ouen se double presque toujours d’un soulagement à l’idée de ne plus avoir à prendre une ligne 13 connue pour ses affluences record et ses nombreuses pannes. Dès le départ, le nouveau tronçon de la 14 – partie intégrante du futur Grand Paris Express - a d’ailleurs été pensé pour délester le trafic de cette fameuse ligne 13 arrivée à saturation.
« On respire enfin »
Un peu plus en retrait, Gaspard, 76 ans, est lui aussi venu assister à l’événement en voisin. Pour lui, cette inauguration a un peu des allures de retour vers le futur, lui qui durant sa vie active a participé à la soudure des rails entre Madeleine et Bercy, lors de la ligne 14 automatique première version, inaugurée en grande pompe en 1998. « Du coup, ça me fait drôle », glisse pudiquement cet habitant de Saint-Ouen depuis 1969, qui se laisse quelques jours pour « descendre pour se rendre compte ».
Et puis, à 16h30, un applaudissement parcourt la foule, les grilles se lèvent et les habitant·e·s plongent pour se faire une première impression. « Les stations sont spacieuses, ça fait du bien. Bon, c’est un peu froid à mon goût mais je ne vais pas faire la fine bouche, moi qui devais jusqu’ici prendre la 13. Là, c’est juste énorme de ne pas rentrer serrés comme des sardines. Là on respire enfin », commente Sandrine, professeure des écoles qu’on croise à la station d’après, celle de Saint-Ouen.
Rendus à St-Lazare, même écho dans la bouche de Mamadou, employé chez Mondial Assistance à Saint-Ouen, pour qui la course après le boulot, c’est fini. « C’est vraiment un grand changement pour moi. D’habitude, je courais pour prendre le RER C pour rentrer chez moi à Colombes, vu la fréquence du RER. Là, je suis sorti tranquillement à 16h30 et en l’espace de quelques minutes, j’étais à St-Lazare. Ça me fait gagner au moins 20 minutes… » Enchanté, ce quadragénaire a tout de même une requête : « il faudrait encore plus de transports comme cela, notamment pour les habitant·e·s de banlieue. Il y a le Grand Paris Express bien sûr qui est annoncé, mais il va falloir attendre encore un peu… »
« Amertume »
Un témoignage qui faisait écho à la prise de position de Stéphane Troussel. Le président de la Seine-Saint-Denis, qui avait assisté un peu plus tôt à l’inauguration du prolongement de la 14 à la station Pont-Cardinet en compagnie du premier Ministre Jean Castex, déplorait le retard très important – 3 ans – pris par le projet. « Il m’est impossible de ne pas penser avec amertume à tout ce qui aurait déjà pu changer pour les habitantes et habitants de la Seine-Saint-Denis si ce projet de prolongement Nord de la Ligne 14 n’avait pas eu tant de retard. », insistait l’élu d’un département qui a tout de même participé au financement de l’infrastructure à hauteur de 3,11 % (pour un coût total de 1,38 milliard d’euros).
Avant d’enfoncer le clou : « La réalité est que l’inauguration d’aujourd’hui ne cache pas la multitude de retards chroniques accumulés dans notre département en matière de transports en commun. » La ligne 12 devant rejoindre la Mairie d’Aubervilliers - projet transformé en véritable serpent de mer - les atermoiements autour du prolongement du tramway T1 de Noisy-le-Sec jusqu’à Val de Fontenay ou encore les nombreux reports sur les lignes du Grand Paris Express (16 et 17) devant traverser la Seine-Saint-Denis… On ne compte plus en effet les retards pris en matière de transports en commun dans le département, suite à des difficultés de financement alléguées par l’État ou Ile de France Mobilités. Des retards signifiant autant de déconvenues pour ses habitants…
Raison pour laquelle l’élu de Seine-Saint-Denis attendait aussi de « voir pour le croire » l’annonce d’une ligne 14 qui devrait rallier Pleyel d’ici 2024, connectant à cet endroit avec le futur réseau des lignes 15, 16 et 17 du Grand Paris Express. A cette date, grâce au prolongement Sud de la ligne jusqu’à Orly, un habitant de Saint-Denis devrait ainsi pouvoir rejoindre l’aéroport du sud de Paris en 40 minutes… En espérant toutefois que les projets sur le papier seront bien réalisés en temps et en heure…
Photos : ©RATP - Bruno Marguerite
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