Branle-bas de combat pour la culture en Seine-Saint-Denis
Alors que la culture est très fortement malmenée par les conséquences de la pandémie, le Département a organisé mardi 9 février une visio-conférence pour réfléchir à des solutions de sortie de crise. Parmi les principales pistes dégagées : la mise au point d’un protocole de réouverture des lieux de culture à soumettre au préfet et un nouvel effort financier du Département en faveur de la culture dans le cadre d’un deuxième Plan rebond. Lien pour voir ou revoir la vidéo en fin d’article.
« Nous habitants (es) des quartiers populaires qui sommes confrontés au quotidien aux conséquences désastreuses et mortifères de cette pandémie, affirmons qu’en cet instant de crise sanitaire, sociale, économique, la Culture est un moyen précieux de ressources, de partage, d’évasion, et que par-delà les difficultés rencontrées, nous souhaitons souligner l’importance de l’existence et de la permanence de lieux culturels ouverts, scrupuleux et attentifs de notre épanouissement commun et de notre espérance de lendemains meilleurs. »
Ainsi débute la pétition que des habitants de Stains viennent de mettre en ligne pour réclamer la réouverture du Studio Théâtre de Stains, fermé comme l’immense majorité des structures culturelles depuis le reconfinement d’octobre 2020.
Peut-être encore plus qu’ailleurs, la culture en Seine-Saint-Denis est inquiète : pour son économie et sa survie, bien sûr, mais aussi pour ce que son absence pourrait rajouter comme mal-être chez les publics du territoire. Raison pour laquelle de nombreux acteurs culturels s’étaient réunis mardi 9 février à l’initiative du Département.
Riche des interventions de quelque 200 inscrits dont une majorité de professionnels du spectacle vivant mais aussi des musées, la visioconférence « Comment continuer à faire vivre les arts et la culture en Seine-Saint-Denis à l’heure de la pandémie ? » a débouché sur l’expression de certaines inquiétudes mais aussi sur de nombreuses pistes de combat.
Protocole de réouverture
La première était formulée très tôt par le président du Conseil départemental lui-même, Stéphane Troussel : « Cette période est guidée par une nouvelle nomenclature sur ce qui est soi-disant essentiel et ce qui ne le serait pas. Mais en Seine-Saint-Denis peut-être plus qu’ailleurs, la culture nous paraît essentielle pour aider les habitants à dépasser un certain nombre de difficultés qu’aura générées cette crise. Voilà pourquoi tous ensemble, nous devrions travailler à un protocole de réouverture dans des conditions maîtrisées de certains lieux de culture en Seine-Saint-Denis. »
Une proposition qui aura rencontré un écho très favorable de la part des acteurs culturels conviés à la réunion. Des structures comme le Salon du Livre et de la Presse Jeunesse en Seine-Saint-Denis, la Compagnie L’Ile de la Tortue à Clichy ou encore le Grand Zebrock se déclaraient ainsi prêtes à coucher sur le papier une liste de propositions à présenter prochainement aux autorités préfectorales et sanitaires pour une réouverture des lieux de culture dans de bonnes conditions.
Deuxième Plan rebond dès mars
Le Salon du Livre Jeunesse en 2020
Autre annonce importante : l’arrivée dès mars d’un deuxième Plan de rebond départemental dont une partie sera là encore consacrée à la culture. Pour rappel, près de 2 millions d’euros avaient été dévolus au soutien aux arts et à la culture dans la première version du Plan de rebond votée en juillet dernier (55 millions d’euros au total). Une somme qui avait à la fois permis de venir en aide en urgence à des structures luttant pour leur survie, d’investir dans du matériel pour permettre à d’autres de s’ajuster aux exigences sanitaires ou encore de formuler des réponses innovantes face aux nouveaux enjeux.
C’est le cas du réseau de musiques actuelles MAAD 93 qui aura par exemple reçu un soutien du Département pour son projet de scènes nomades. « Pour nous adapter, nous avons imaginé un dispositif de scènes mobiles, montées sur des vélos. L’idée est de contourner la fermeture des salles en amenant les salles aux habitants, tout cela dans un esprit écologique, où l’on compterait sur la seule force de nos muscles pour faire avancer les choses », expliquait Pauline Gacon, vice-présidente de MAAD 93. Ces scènes - actuellement en cours de construction avec une association du département : Véloma - seront prêtes à sillonner la Seine-Saint-Denis au printemps prochain, portant notamment les sons de Billie Brelok et du groupe Catastrophe.
"Se construire" de la compagnie (S)-Vrai
D’autres structures mettaient en avant les résidences d’artistes comme premier moyen de réponse à la crise. « C’est un outil qui nous a permis d’encaisser le choc de la crise. Car une résidence, ça peut se déployer à tous moments et en tous lieux. Elle permet aussi d’aller à la rencontre des habitants en dehors des lieux habituels de culture », soulignait Renan Benyamina, directeur délégué des Ateliers Médicis Clichy-Montfermeil qui, avec l’aide du Département, portent depuis novembre 6 résidences d’artistes. Ces « Chroniques de la Seine-Saint-Denis », menées par la journaliste indépendante Nassira El Moaddem, les autrices de BD Elsa Abderhamani et Juliette Mancini ou encore le romancier Marin Fouqué, se mettent en place, donnant déjà lieu à l’un ou l’autre échange avec les habitants.
A Sevran, au Théâtre de la Poudrerie, la compagnie (S)-Vrai de Stéphane Schoukroun aura elle engagé un travail de fond sur la famille à l’heure du Covid, permettant notamment à des collégiens de raconter les difficultés suscitées par la contrainte de l’école à distance, de l’exiguïté des foyers ou de la montée de la précarité.
Promettant un accompagnement attentif de toute les bonnes volontés, le Département à travers la bouche de son président Stéphane Troussel et de sa vice-présidente à la culture Meriem Derkaoui, s’est encore impliqué sur deux autres points : la reconduite à partir de juin prochain du "Bel été solidaire", dispositif qui avait été mis en place pour atténuer les effets du premier confinement. Et la reprise d’une politique d’investissement en termes d’équipements culturels, le Département s’étant tout récemment engagé à financer en partie de nouveaux locaux pour l’Ecole Nationale des Arts du Cirque de Rosny et l’Académie Fratellini.
Dans cette atmosphère baignée d’incertitude mais aussi de volontarisme, les paroles de Sylvie Vassallo, directrice d’un Salon du Livre Jeunesse qui aura su se réadapter de fond en comble en 2020, résumaient bien la situation : « La période est terrible, mais dans l’adversité, on peut compter sur de nouvelles ressources, des solidarités. »
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