Un nouveau lieu d’accueil pour les femmes victimes d’excision à l’hôpital de Saint-Denis
Vendredi 8 juillet a été inaugurée la "Maison des femmes" à l’hôpital Delafontaine de Saint-Denis, un lieu d’accueil et de soins pour les femmes victimes d’excision et de violences. En 2014, à l’occasion de la pose de la première pierre, nous avions interviewé Ghada Hatem, la cheffe de la maternité de l’hôpital, à l’initiative du projet.
Située au sein de l’hôpital, mais donnant aussi sur la rue pour permettre un accès plus facile et plus confidentiel, la nouvelle antenne, qui inclura également un planning familial, doit permettre aux femmes victimes d’excision de venir consulter dans les meilleures conditions.
Interview de Ghada Hatem, cheffe de la maternité de l’hôpital, porteuse du projet, également soutenu par l’Observatoire départemental des violences envers les femmes.
À quels besoins doit répondre la nouvelle antenne ?
« Le premier besoin était de repositionner le planning familial au sein de l’hôpital et de l’ouvrir sur l’extérieur, alors qu’il était jusqu’à maintenant encastré dans l’hôpital. Il fallait un lieu plus ouvert de manière à ce que les gens puissent y aller plus simplement. Il y a donc une part de femmes qui viendront dans le nouveau lieu d’accueil pour des conseils contraceptifs ou de couple. Mais j’ai aussi souhaité dédier ce nouvel espace aux femmes victimes d’excision quand j’ai pris la mesure du nombre de cas dans le département et quand j’ai réalisé qu’il n’y avait pas de prise en charge pour elles. »
Quelle est la part de femmes excisées qui viennent consulter ?
« Notre hôpital suit 4.000 accouchements par an et dans 15 à 20 % des cas, il s’agit de femmes excisées. Il y a un an, nous avons donc créé une unité de chirurgie réparatrice pour ces femmes mutilées, avec un personnel formé auprès du Professeur Pierre Foldes, spécialiste dans ce domaine : chirurgiens, psychologues, sexologues... Mais il fallait aussi pour ces femmes un local adapté. Ce sera le cas quand ce nouveau lieu d’accueil sera mis sur pied. »
Quels types de soins apportera-t-on aux femmes excisées dans ce nouveau lieu ?
« Toutes les femmes qui consultent ne souhaitent pas forcément se faire opérer. Elles peuvent avoir besoin de travailler sur leur identité, sur leur passé, sur leur trauma. Le but est donc de leur offrir dans un premier temps de l’écoute, de l’accompagnement et un suivi psychologique si elles le veulent. »
Comment se passe l’approche de ces femmes excisées ?
« Certaines viennent d’elles-mêmes, d’autres ne souhaitent pas en parler. En tout état de cause, lorsqu’on repère une femme excisée, on se doit de le lui dire car parfois, elle l’ignore elle-même. Pour preuve, il y a eu ce cas d’une femme qui a dit à une de nos sages-femmes après avoir accouché : « j’ai bien regardé ma fille, et elle n’est pas comme moi. » Il existe souvent deux cas d’excision. Celles pratiquées à l’âge de 1 ou 2 ans. Et celles pratiquées vers 10 -12 ans qui sont les plus traumatiques car à cet âge, on n’oublie pas. En France, l’excision étant un crime, les gens ont presque arrêté d’en pratiquer. Le cas le plus fréquent est celui de familles qui envoient leur fille au pays d’origine après le CM2, à une période de transition où ils se disent que son absence ne sera pas remarquée. »
Quel sera le coût de ce nouveau lieu d’accueil ?
« La construction a été chiffrée à 400.000 euros. Nous avons pensé à une construction rapide, écologique, facile à démonter si besoin. »
800 : c’est environ le nombre de femmes excisées qui sont repérées tous les ans au sein des services de l’hôpital Delafontaine.
50 % : c’est l’augmentation du nombre de consultations au planning familial de l’hôpital Delafontaine. On recense également une augmentation de 21 % du nombre d’IVG (interruption volontaire de grossesse), d’où la nécessité du nouveau lieu d’accueil.
51 : le nombre de patientes victimes de mutilations sexuelles opérées en un an dans l’unité de réparation chirurgicale
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