Pas de trêve pour le Secours populaire
Alors que le plus fort de la crise sanitaire paraît s’éloigner, il n’en est pas de même de la crise sociale. C’est ce que souligne l’étude nationale menée par le Secours populaire français, qui révèle notamment que près d’un Français sur trois ne peut pas se permettre 3 repas par jour. Une réalité encore plus frappante en Seine-Saint-Denis où 69 000 personnes ont été aidées par le Secours populaire en 2020, un chiffre qui devrait à peine diminuer cette année
55 % des Français connaissent dans leur entourage proche une personne en situation de pauvreté. Une personne interrogée sur trois a du mal à payer son loyer ou son emprunt immobilier. 29 % rencontrent des difficultés pour disposer d’une mutuelle santé. C’est notamment ce qui ressort du 15e baromètre national commandé par le Secours populaire français à Ipsos auprès de 1000 personnes interrogées cet été.
« L’euphorie du déconfinement n’est pas partagée par tous : chômage, précarité du travail, privations et perte de liens sociaux continuent de frapper de très nombreuses personnes », relève notamment le rapport de l’organisation humanitaire française, rendu public jeudi 9 septembre.
Un constat qui s’avère malheureusement aussi vrai concernant la Seine-Saint-Denis, où le Covid a non seulement souligné mais encore augmenté les inégalités sociales, fragilisant durablement les plus démunis.
« On entend résonner de-ci de-là des discours gouvernementaux annonçant le retour de la croissance du PIB, mais ceux qui étaient au bord du chemin sont loin d’avoir repris la route », laisse échapper, fataliste, Philippe Portmann, secrétaire général du Secours Populaire 93. Ce matin-là, au siège général de Romainville, on prépare comme d’habitude les denrées qui seront réparties lors de la prochaine distribution ou qui serviront à approvisionner certains comités locaux.
C’est que depuis l’explosion de la précarité avec le premier confinement, due à l’arrêt des petits boulots étudiants mais aussi à la fin brutale de contrats intérimaires ou à durée déterminée, la situation n’a pas tellement changé. « On trouve toujours dans nos files d’attente des familles qui ont basculé dans la précarité avec le confinement et parfois endettées, des travailleurs pauvres et des étudiants qui, même s’ils ont pour certains retrouvé un petit boulot, peinent à se remettre des conséquences matérielles et psychologiques de la crise », détaille Marco Hormazabal, trésorier de l’association.
Nouveau comité à Bondy
A Montreuil, une antenne étudiante mobile s’est encore créée en février pour faire le tour des résidences étudiantes de cette ville de 110 000 habitants. « On compte environ 40 bénéficiaires, souvent des jeunes en difficulté financière et sociale. Le but avec eux est de dépasser la distribution alimentaire, de faire le point sur leurs besoins en matière de santé ou d’équipement informatique », explique Catherine Deger, porte-parole de la structure nouvellement créée. Montfermeil, en avril 2020, et Bondy, en décembre, ont par ailleurs vu émerger un nouveau comité, portant ainsi la couverture du Secours populaire de Seine-Saint-Denis à 27 villes sur les 40 que compte le territoire.
Au total, 69 000 personnes ont été aidées par l’association en 2020 et le rythme décroit à peine pour 2021. Ce qui fait dire aux responsables territoriaux, la mine soucieuse : « Les besoins sont à peu de choses près les mêmes, or, après un effort conséquent en 2020, on voit les dons diminuer, notamment de la part de l’État et des collectivités publiques ».
A titre d’exemple, les 350 000 euros versés par l’État en 2020 ont été divisés par 10… Et si Etat et Département ont financé en 2021 un « Solidaribus » pour permettre au SPF93 de toucher des publics particulièrement précarisés ou invisibilisés, « ça ne suffit pas », s’inquiète Philippe Portmann. « L’arrêt de l’activité avec les confinements nous a aussi privés de braderies et autres événements habituels, ce qui représente pour nous un manque à gagner de 100 000 euros », déplore la directrice Valérie Méallier, avant d’ajouter dans un sourire : « Là enfin, on voit le bout du tunnel avec une braderie qu’on va pouvoir organiser les 8 et 9 octobre prochains. »
Redonner de l’espoir
Conformément à sa philosophie de lutte globale contre la pauvreté, le Secours populaire ne veut pas se contenter de répondre présent sur les distributions alimentaires, mais intervenir aussi sur d’autres aspects. « Nous, on veut faire des actions transversales, sur la culture et la santé pour tous, l’accès aux droits, l’insertion professionnelle, pas juste de l’alimentaire. Car c’est un projet global qui redonne de l’espoir aux gens », insiste le trésorier du comité de Bondy, nouvellement créé en décembre 2020.
Parmi les projets que le SPF93 compte étoffer cette année figurent ainsi la lutte contre la fracture numérique, qui avait particulièrement été mise en évidence au moment des confinements, des aides pour l’équipement en lunettes, traditionnellement mal remboursées (100 personnes ont ainsi été appareillées gratuitement en 2020 grâce à un partenariat) et les Journées pour les Oubliés des vacances - 250 000 euros ont ainsi été dépensés sur 2021 pour permettre à des familles de partir en séjour.
Christophe Lehousse
©Secours populaire 93
– Si vous souhaitez devenir bénévole au SPF 93 ou lui adresser vos dons, merci de prendre contact à contact@spf93.org
Face à la crise sociale induite par le Covid, le Département n’a pas désarmé. Des outils, créés dans la foulée du premier confinement, sont ainsi toujours d’actualité : l’aide exceptionnelle au paiement des loyers, créée en juillet 2020, avait ainsi été prolongée jusqu’au 30 juin. Et pour les jeunes, population particulièrement frappée par l’arrêt des petits boulots et l’absence d’un RSA pour la tranche des 18-25 ans, un Fonds spécial d’Aide à la Jeunesse (FAJ) a été porté de 1 à 5 millions. Peuvent y prétendre tous les jeunes résidant en Seine-Saint-Denis et rencontrant des difficultés sociales (alimentaire, habillement, logement, soutien à la formation, santé, transports…). Le Département est par ailleurs impliqué dans un vaste plan de lutte contre la fracture numérique, en partenariat avec la CAF et l’association Emmaüs Connect. Au total, ce sont 68 millions d’euros qui ont été investis par l’institution dans ses deux Plans de Rebond successifs pour contrer les impacts sociaux de la crise du Covid.
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