Le Département alerte à son tour sur le protoxyde d’azote
Alors qu’une proposition de loi est actuellement en débat pour interdire aux mineurs ce « gaz hilarant » aux propriétés pouvant s’avérer dangereuses, la Mission métropolitaine de prévention des conduites à risques a organisé lundi 12 avril une table ronde sur ce phénomène qui touche particulièrement les jeunes, voire les très jeunes.
Vous en avez peut-être aperçu dans des squares ou sur certains parkings : de petites bonbonnes métalliques, argentées. Ce sont des capsules de protoxyde d’azote. Normalement, ce gaz est utilisé dans des bombes aérosol telles que les bombes de crème Chantilly. Mais ce n’est pas une folle envie de crème Chantilly qui s’est emparée des jeunes de Lille, de Paris ou de Seine-Saint-Denis ces dernières années. Si ces capsules les intéressent, c’est qu’ils en inhalent le contenu, du protoxyde d’azote, qui provoque fous rires et relâchement général durant quelques minutes.
Si cette substance, souvent qualifiée de « gaz hilarant », est aussi utilisée en milieu hospitalier, mélangée à de l’oxygène, comme anti-douleurs, son détournement à des fins récréatives n’est pas anodin. « La fugacité des effets du gaz a contribué à forger au « proto » une image non dangereuse. Or il s’avère qu’un usage - notamment répété - comporte des risques : de brûlures (si on inhale le gaz directement, nldr), de maux de tête, et même d’asphyxie ou de complications neurologiques ou psychiatriques », relève Clément Gérôme, sociologue à l’Observatoire français des drogues et toxicomanies (OFDT) et invité lundi d’une table ronde organisée en visioconférence par la Mission métropolitaine de prévention des conduites à risques.

Créée en juillet 2013, cette structure transdisciplinaire, intervenant dans des domaines aussi différents que l’addictologie, l’éducation sexuelle ou les réseaux sociaux, met en œuvre la politique de la Mairie de Paris et du Département de la Seine-Saint-Denis dans le domaine de la prévention des conduites à risques.
Remarqué dans l’espace public depuis 2017, il semblerait que le phénomène du « proto » soit en augmentation, même si une étude spécifique fait encore défaut. Outre la multiplication des capsules dans les grandes villes, on note aussi une hausse des signalements rapportés aux services d’addictovigilance : 147 signalements dont 57 graves ont ainsi été faits entre janvier et septembre 2020 en France, contre 47 dont 37 graves en 2018-2019 (on recense même un décès, attribué à une prise de protoxyde d’azote, en 2019). « Il y a indéniablement une hausse. Après, on ne peut pas parler d’un usage massif, comme pour le reste des substances psychoactives détournées de leur usage. Pour celles-ci, 10 % des 18-25 ans déclaraient ainsi ne pas avoir dépassé le stade de l’expérimentation. Une minorité va s’engager dans des usages réguliers », pointait le sociologue Clément Gérôme.
Une proposition de loi pour interdire la vente aux mineurs
Suffisant en tout cas pour susciter les inquiétudes des pouvoirs publics, d’autant plus vigilants que le phénomène semble concerner des jeunes, voire très jeunes, « entre 13 et 14 pour les plus jeunes ». Plusieurs campagnes de sensibilisation ont ainsi été menées, et le 25 mars dernier, l’Assemblée nationale a adopté en première lecture une proposition de loi visant à interdire la vente de protoxyde d’azote aux mineurs, dans tous les commerces, lieux publics et sur internet. L’interdiction s’appliquerait aussi aux majeurs sauf dans certains lieux : bars, discothèques, débits de boissons temporaires (foires, fêtes publiques...) et bureaux de tabac.
A Bondy et Aulnay, deux villes où une recrudescence de capsules a aussi été signalée, des arrêtés municipaux d’interdiction de vente aux mineurs ont été pris dès 2019. Et le sujet a aussi été pris au sérieux par le Caarud (Centre d’accueil et d’accompagnement à la réduction des risques pour les usagers de drogue) Yucca de Bondy. « Avec un club de prévention (Capacités), on a organisé des maraudes pour faire passer des messages de réduction des risques plutôt simples, expose ainsi Gwendal Béranger, responsable au Caarud Yucca. Les jeunes de 14 à 30 ans qu’on a rencontrés ont plutôt été à l’écoute. Mais malheureusement, on note qu’entre temps les capsules de chantilly ont été remplacées par des bonbonnes bien plus grosses. Et les prises de risques de certains jeunes sont de plus en plus importantes : ils prennent la voiture ou le scooter juste après avoir consommé, ce qui est très dangereux. »
A Paris, la stratégie a été d’associer le plus possible les jeunes aux messages de prévention. L’association Charonne Oppelia a ainsi rencontré à plusieurs reprises des jeunes concernés par ces usages avant de leur faire créer un flyer intitulé « Le Ballon » (en référence au ballon de baudruche utilisé par les jeunes pour recueillir le gaz des bonbonnes). « On pense que cela a donné de bons résultats, même si ça n’est pas suffisant et qu’il faut toucher les jeunes là où ils sont : notamment sur les réseaux sociaux, où ils sont d’ailleurs souvent démarchés pour acheter ce type de produits. », expliquait Magalie Féger, rejointe sur ce constat par le Caarud Yucca qui appelait aussi de ses vœux la création d’un outil numérique.
Christophe Lehousse
Illustration : Flyer "Le Ballon" réalisé par des jeunes de l’association Charonne Oppelia
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