La Tour Pleyel dans tous ses états !
Il est des tours qui sont comme des phares dans l’océan urbain des grandes métropoles. Quand on aperçoit la tour Pleyel depuis l’autoroute qui nous ramène du Nord ou de la Normandie on sait qu’on approche de la petite couronne de Paris par la Seine-Saint-Denis avant de rejoindre la capitale. On vous raconte son histoire.
Longtemps siglée du logo Philips ou Siemens, elle est aujourd’hui à nue du haut de ses 129 mètres, désamiantée et ouverte aux quatre vents. Il est prévu qu’elle renaisse de ses cendres pour devenir le "business resort du Grand Paris" avec l’arrivée des Jeux de 2024. Un hôtel de 4 et 3 étoiles de 700 chambres, avec piscine panoramique et des espaces professionnels redonneront du lustre à cette tour emblématique du nord parisien qui a jailli entre 1969 et 1973 au milieu d’un quartier populaire entourée d’usines et d’habitations modestes. Le nom de Pleyel qui baptise le carrefour est l’héritage d’un savoir-faire de prestige, celui des pianos Pleyel. La manufacture appelée ainsi du nom de son fondateur, le compositeur autrichien Ignace Pleyel ouvra son usine sur cette parcelle au sud de Saint-Denis en 1865. Elle produit alors des pianos réputés dans le monde entier : Chopin exigeait un Pleyel pour obtenir une sonorité parfaite ! L’usine qui réalise aussi des clavecins, des harpes et des orgues produit en 1938 plus de 200000 instruments. En déclin après la Seconde Guerre mondiale, elle ferme ses portes en 1960.
La Défense de l’Est parisien
La construction de logements n’étant pas autorisée sur les terrains désaffectés de la manufacture, le propriétaire privé s’oriente vers un programme tertiaire ambitieux censé être le pendant séquano-dionysien de la Défense. Malgré les réticences de la municipalité qui souhaite maintenir des activités industrielles sur la zone, il obtient les agréments nécessaires pour la réalisation du Centre Paris-Pleyel.
L’opération pilotée par la Cogifrance, filiale du groupe Rotschild, voit se succéder plusieurs projets avant d’aboutir à sa forme définitive. Les premières esquisses proposent un bâtiment monumental, devant constituer le plus haut gratte-ciel d’Europe avec un passage souterrain le reliant directement à la station de métro Carrefour Pleyel, inaugurée près de 20 ans plus tôt, plus un raccordement autoroutier devant être aménagé pour desservir le site.
De ce projet pharaonique comprenant 140 000 m² de bureaux répartis dans 4 tours avec héliport sur le toit, des équipements à la pointe de la modernité pour l’époque (téléphone en accès direct, air conditionné,) ne reste qu’une seule tour de 37 étages sur la frange ouest des terrains. Car malgré l’accord de l’administration centrale, le chantier reste inachevé, l’État et les investisseurs se retirant progressivement au profit des villes nouvelles jugées prioritaires dans le nouveau Schéma d’Aménagement et d’Urbanisme de la Région Parisienne (SDAURP).
Le revêtement initial en acier corten donne à la tour un aspect monolithique et austère d’autant que la dégradation précoce du matériau nécessite une rénovation du bâtiment dès 1985, 12 ans après son inauguration. Entièrement rhabillée d’un bardage d’aluminium blanc, elle se dote à ce moment là de l’enseigne géante à son sommet qui porte sa hauteur à 143 mètres ! Plus proche de la tour Montparnasse dont elle est contemporaine (1973 – 210 mètres), que de celles de La Défense ne dépassant pas les 115 mètres, elle se distingue par sa silhouette originale et élancée.
Si le projet initial de faire du carrefour Pleyel un grand quartier d’affaires avait périclité dans les années 60, son emplacement stratégique est enfin reconnu et adoubé dans ce nouveau millénaire... Le complexe hôtelier en construction qui animera aussi le quartier de commerces, restaurants, salles de conférence et auditorium porte le même nom que celui de 1965... Paris Pleyel !
Crédit 163Atelier.
Réalisé en collaboration avec le bureau du patrimoine contemporain du Département et les Archives départementales de la Seine-Saint-Denis.
Tour Pleyel, septembre 2021. Si on ne compte pas les antennes culminant au dessus des 122 mètres des Tours Mercuriales à Bagnolet, elle est la plus haute tour de Seine-Saint-Denis grâce à ses 129 mètres (et même 143 avec son enseigne lisible à 3 kilomètres par potentiellement 1 million de personnes), devant la Tour La Villette à 125 mètres.
A quelques encablures de la tour, la gare Saint-Denis Pleyel occupera une place centrale dans le futur réseau Grand Paris Express : nœud ferroviaire, elle constituera dès 2024 un pôle multimodal comparable à Châtelet-les-Halles.
Desservant plusieurs sites majeurs de Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 (village des athlètes, Stade de France, centre aquatique), elle est également considérée comme « la gare olympique ».
En chiffres
• 250 000 voyageurs par jour
• 5 000 m² dans les étages de la gare
• Croisement de 4 lignes du nouveau métro
Enfin, pour son renommé architecte japonais Kengo Kuma, la gare représentera un point de rencontre créé par l’idée d’une spirale, rassemblant à la fois les gens, les activités et l’énergie des passant.e.s !
© Kengo Kuma & Associates
Impressionnant
Le rappeur français Sopico a investi le chantier de la Tour Pleyel pour le clip de son single « Slide » annonçant son album « Nuages » sorti en octobre. On y voit l’artiste en équilibre sur la façade de la tour à près de 130 m de hauteur !
À part quelques retouches, il n’y a pas eu d’effets spéciaux ou de trucage et le résultat de la vidéo est spectaculaire !
Architectes de la Tour Pleyel millésime 1965-1973
Foliasson Michel (architecte) : avant-projet ; Binoux Jacques (architecte) : avant-projet ; Favatier Bernard (architecte) ; Hérault Pierre (architecte).
Maitre d’ouvrage : Compagnie générale immobilière de France.
Crédit photo Tour Pleyel numéro 1 : « Henri Baranger - Établissements Henri Baranger - Archives départementales de la Seine-Saint-Denis » (105FI/699)
Crédit photo Plaquette Cogifrance Paris-Pleyel. Archives départementales de la Seine-Saint-Denis
Architectes de la Tour Pleyel millésime 2024
L’ensemble immobilier Paris Pleyel s’est vu décerner le Grand Prix du concours du Geste d’Or dans la catégorie « Projet Amont », pour la métamorphose de l’historique tour Pleyel. À cette opération de restructuration lourde s’associe la création de deux nouveaux immeubles de bureaux, au pied de la tour. Un immeuble de 6 étages en U ceinturant la tour et un immeuble de 21 étages, en surplomb d’une salle multifonctionnelle.
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