La Conquête du pain ou une boulangerie pas comme les autres
À Montreuil, une boulangerie pas comme les autres propose de délicieuses baguettes bio et des sandwiches hors du commun. Nous sommes à la Conquête du pain, une boutique qui a décidé de fonctionner en autogestion et de mettre en pratique des idées libertaires.
En vitrine, le Gavroche échappé du tableau de Delacroix La liberté guidant le peuple brandit un pain, celui de la liberté. Vous ne pouvez pas vous tromper, vous êtes bien à La Conquête du pain, à Montreuil. Une boulangerie autogérée par une dizaine de salariés qui propose du pain bio. Virginie (50 ans) est entrée en janvier 2018 dans le collectif et assure son service de vendeuse. Cigarette à la main, sur le pas de la porte elle raconte : « Je connais cette boulangerie depuis sa création en 2010. Anthropologue de formation, j’ai beaucoup voyagé au Mexique où j’ai été marquée par l’expérience zapatiste. Là-bas, le tutoiement est facile, alors en arrivant à Montreuil, je l’ai pratiqué aussitôt auprès des gens. Ça fait tomber des barrières. Si parfois certains me disent vous, alors je réponds par le vouvoiement. Moi je n’aurais pas travaillé dans une autre boulangerie, ici avec les clients viennent chercher autre chose même s’ils repartent avec du pain ! » Les habitués ne demandent pas un jambon beurre mais un « Engels » (3 €), si vous désirez en plus des crudités, vous demanderez un « Marx » (3,40 €). Le baltique au saumon se nomme « Emma Goldman » avec du fromage et de la roquette (4,90 €), et le dernier sandwich créé le « Emiliano Zapata » est composé d’avocat, de tomate, de fromage frais, de champignon et d’épices bien sûr. Pendant que vous faites la queue, vous avez le temps d’admirer une galerie de portraits encadrés, joliment dessinés au fusain des grandes figures que sont Marx, Engels, Proudhon, Angela Davis, Louise Michel ou Bakounine.
La baguette suspendue
A l’entrée de la boutique, un petit coin de lecture et d’artisanat est proposé, essentiellement zapatiste, et si vous désirez déguster un café de même provenance ou vous faire infuser une verveine, le prix est libre. Une foultitude de flyers annonçant des initiatives diverses, militantes ou non, des débats et autres projections se battent en duel sur les étagères. À côté d’une panière garnie de plusieurs baguettes, un texte explique ce qu’est la baguette suspendue. « C’est la possibilité, explique Virginie, pour des clients d’acheter une baguette, (un sandwich ou une viennoiserie) et de l’offrir dans un geste de solidarité. Il prend celle-ci et la met dans la panière posée sur une étagère. Celui ou celle qui n’a pas de sous pourra ainsi repartir avec du pain. » Le soir, avant de fermer, tout le pain invendu est offert aux collectifs et associations qui accompagnent les gens de la rue et des personnes démunies.
Le même salaire horaire pour tous
Ricardo (32 ans) a des origines mexicaines et ne cache pas sa sympathie pour les zapatistes. « Quand on parle d’autogestion, c’est bien sûr une expérience à laquelle on pense. Notre manière de faire ici, montre que l’on peut travailler autrement et produire du bon pain. » L’équipe composée de 10 personnes, compte 4 boulangers, une personne qui s’occupe du snacking (sandwichs, quiches), les vendeurs et deux livreurs à parité de genre.
Un mardi sur deux, toute l’équipe se réunit en assemblée l’après-midi pour débattre de la production, de sa qualité, du fonctionnement du collectif, des améliorations à apporter et des relations avec les groupes qui les sollicitent. À la Conquête du pain, tout le monde est en CDI et sur un même pied d’égalité. Chacun est payé au même taux horaire soit pour 35 heures, un salaire de base de 1 350 €.
L’Arbre, un pain bio régalant
Dans cette boulangerie, on propose une trentaine de pains différents confectionnés avec de la farine bio. « Il y a la tourte au levain, la tourte auvergnate, l’Arbre très prisé par les clients, détaille Ricardo. Ce pain (1 kg) est fabriqué avec trois types de farine : sarrasin, blé et seigle avec du sel de Guérande. Nous le vendons à 5,90 € alors qu’ailleurs ou le trouve à 6,60 ou 7 €. Nous laissons la pâte fermenter pendant près de 15 heures avant d’enfourner et de le cuire pendant près d’une heure. Nous ne connaissons pas d’autres boulangeries bio qui fassent des prix moins chers que nous », affirme avec simplicité le jeune homme qui embauche tous les matins à 7 heures pour assurer la viennoiserie. En 2016, l’expérience a bien failli tourner court et la boutique fermer. « Il y avait des dettes à régler, mais le collectif est aussi passé par une mauvaise période de fonctionnement. Si la moitié de l’équipe est partie à ce moment-là, moi j’y suis rentré », raconte Ricardo. Chaque vendredi après-midi, l’équipe se retrouve à l’étage, dans les locaux de « l’école » de la Conquête du pain pour assister à une projection de film, analyser des textes ou parler d’autogestion. Ce vendredi-là est projeté à 15 heures "Ne vivons plus comme des esclaves", de quoi alimenter les échanges autour du pétrin le lendemain matin.
La Conquête du pain
47, rue de la Beaune à Montreuil
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