L’Olympiade culturelle se prépare aujourd’hui
Mardi 15 octobre, près de 250 actrices et acteurs des mondes culturels et sportifs se sont réuni·e·s à l’Embarcadère d’Aubervilliers dans le cadre de la Fabrique des Jeux pour travailler au projet d’Olympiade culturelle de Paris 2024.
Une vingtaine de grandes tables avec chacune une dizaine de chaises autour, papiers stylos sortis, la grande salle de l’Embarcadère avait des airs de classe d’école au moment des travaux de groupes. Et c’est bien de cela qu’il s’agit : se rassembler pour travailler ensemble à la réalisation d’une Olympiade culturelle qui associera la population et montrera le dynamisme et la richesse de la diversité de la Seine-Saint-Denis.
Stéphane Troussel, président du Département, l’a rappelé en ouverture des travaux : « C’est en Seine-Saint-Denis qu’on jugera si Paris 2024 aura réussi ses Jeux. C’est là qu’on y verra l’héritage olympique. » Stéphane Fiévet, directeur culture de Paris 2024, a rappelé les grandes étapes : « Cette Olympiade culturelle doit vivre durant les quatre années qui précèdent l’événement, avec la population. Un grand festival sera organisé durant les Jeux olympiques et paralympiques. L’Olympiade culturelle apportera des éléments pérennes qui feront partie de l’héritage des Jeux. » Mathieu Bauer, directeur du nouveau Théâtre de Montreuil a présenté le manifeste du collectif "La beauté du geste", rassemblement d’acteurs culturels, sportifs, associatifs, intellectuels, chercheurs et élus volontaires pour inventer une olympiade culturelle ambitieuse.
Ruth Mackenzie, directrice artistique du Théâtre du Châtelet, connaît bien le sujet. C’est elle qui a organisé pour les Jeux olympiques de Londres le plus grand festival de l’histoire du Royaume-Uni avec plus de 25 000 artistes. Une réussite reconnue dans le monde entier. Elle est très confiante quant à la réussite de cette Olympiade culturelle : « Paris 2024 a le grand atout de se fonder sur des valeurs clairement énoncées et partagées : l’inclusion, l’innovation, la diversité et l’héritage. Nous n’avions pas compris cela en 2012. Donc Paris 2024 va être plus réussi que Londres ! »
Pour cela, les participants se mettent au travail. Chaque table choisit de réfléchir sur un des six thèmes proposés par les équipes du Département :
– Croiser art et sport
– Investir les paysages et les espaces publics
– Reconnaître et valoriser les diversités
– Partir des jeunes
– Dialoguer avec l’Europe et le Monde
– Construire une nouvelle vision et une nouvelle approche du handicap.
Explosion d’idées
Lors de la restitution des travaux, les idées fusent. Certaines sont partagées par plusieurs groupes de travail : accueillir le monde entier en leur montrant la richesse de la diversité de la Seine-Saint-Denis (« Bienvenue chez vous ! »), décloisonner les sites des rencontres sportives en organisant des circulations entre eux, avec une signalétique particulière et un parcours artistique, associer pleinement les jeunes à la construction de cet événement, s’appuyer sur les habitants et la richesse de leurs particularités culturelles, intégrer le public et les artistes porteurs de handicap…
D’autres sont plus singulières : imaginer des Olympiades gastronomiques, créer un spectacle racontant les Erythréens venus pour gagner le marathon et les Erythréens de la Plaine Saint-Denis venus pour ne pas perdre, écrire et chanter un hymne des Jeux olympiques dans toutes les langues parlées en Seine-Saint-Denis…
Un premier rendez-vous riche en échange d’idées, d’autres dates seront bientôt proposées pour avancer. Stéphane Troussel a annoncé son intention d’organiser un premier événement avant les Jeux olympiques de Tokyo, il ne faut pas tarder !
Et vous, les Jeux olympiques en Seine-Saint-Denis, vous les voyez comment ? Comment imaginez-vous votre Olympiade culturelle ? Faites part de vos idées sur le site http://lafabriquedesjeux.seinesaintdenis.fr/
La beauté du geste, c’est un collectif d’acteurs culturels, sportifs, associatifs, intellectuels, chercheurs et élus qui appelle, à travers un manifeste à lire ci-après, à inventer une olympiade culturelle ambitieuse. Dans ce territoire marqué par les inégalités, mais aussi par la richesse de sa diversité culturelle, ils veulent affirmer l’importance de construire un programme mêlant intimement art, culture et sport, qui inclue pleinement les habitants des quartiers populaires, et leur permette d’être acteurs des transformations importantes que va connaître la Seine-Saint-Denis.
La beauté du geste
Combien de fois, dans l’art comme dans le sport, a-t-on évoqué « la beauté du geste » ? L’événement sportif génère une exaltation et un sentiment de communion dont l’intensité est comparable à celle des émotions ressenties lors d’un grand spectacle ou d’un concert. Ces émotions et instants partagés nous unissent, nous emportent et confèrent à l’événement sportif ou artistique sa portée universelle.
Tous les quatre ans, les Jeux olympiques et paralympiques entendent porter haut et fort cet idéal de fraternité. Pourtant, si leur histoire récente est marquée par des réussites, elle est faite aussi de rendez-vous manqués sur le plan social, écologique et économique. Comme l’ensemble de la société, l’esprit des Jeux est en effet sans cesse exposé au risque d’être dominé par les puissances de l’argent et l’inquiétant pouvoir de fascination des images. L’art comme le sport véhiculent pourtant ces valeurs essentielles à l’émancipation individuelle et collective que sont la solidarité ou l’hospitalité. C’est donc à l’aune de ces valeurs qu’il nous faudra regarder ce qu’auront été les Jeux de Paris 2024, et dans ce que ces Jeux auront permis de laisser en héritage, comme transformation en profondeur de nos villes et de notre pays, que nous pourrons en mesurer la réussite.
L’Olympiade culturelle qui se déroulera d’octobre 2020 à octobre 2024accompagne et célèbre par les arts et la culture l’arrivée des Jeux à Paris et en Seine-Saint-Denis. Elle offre la perspective d’un temps long et une visibilité incomparable pour enclencher ces transformations et conférer à l’événement sportif une dimension politique, poétique et symbolique à la hauteur de nos aspirations.
Nous sommes déterminés à relever ces défis dans nos structures et à travers nos projets. Déterminés à proposer à cette occasion des créations et des soirées inoubliables, fédératrices et festives. Mais déterminés surtout à faire de l’Olympiade culturelle un facteur de changement, d’inclusion et d’émancipation pour chacun et chacune.
Nous, acteurs de la vie culturelle, sportive, associative, éducative, intellectuels, chercheurs, élus de la Seine-Saint-Denis, avons la conviction que notre département est le territoire idéal pour réaliser en profondeur les transformations économiques, écologiques, sociales et urbaines que promet le projet olympique. En Seine-Saint-Denis, « territoire-monde », les besoins et la demande de démocratie des citoyens sont immenses, tout autant que l’inventivité et la richesse des expérimentations sociales. Fiers de nos savoir-faire, singularités et pluralités, nous sommes convaincus que l’Olympiade culturelle doit être marquée par le sceau de la jeunesse et de l’inclusion. Nous proposons de fabriquer collectivement des projets – avec les habitants –, qui démultiplieront les imaginaires, feront rayonner la féconde diversité de notre territoire, dynamiseront le Grand Paris de la culture et créeront des ponts avec les autres territoires olympiques, notamment Marseille, qui nous ressemble à tant d’égards.
Ici en Seine-Saint-Denis plus qu’ailleurs, la créativité s’incarne dans la jeunesse qui, lucide sur la nécessité de changer nos modes de vie, est porteuse d’avenir. C’est avec l’élan de cette jeunesse que nous pourrons réinventer la solidarité intergénérationnelle et internationale ; permettre l’hospitalité avec les plus démunis ou isolés ; mener des actions écologiques au profit des habitants ; proposer des programmes artistiques et sportifs autour du handicap ; créer des projets par les nouvelles technologies et nouveaux langages dont les jeunes sont détenteurs.
Il faudra pour cela continuer d’ouvrir nos lieux, déplacer les usages habituels des équipements culturels, repenser avec des architectes, des artistes, des acteurs du monde sportif et les habitants leur transformation, habiter aussi les équipements sportifs, les friches industrielles, les parcs et places publiques... afin de créer des espaces de convergence qui laissent émerger des nouveaux usages de sociabilité, de production artistique, sportifs, d’éducation populaire et ainsi renouveler concrètement nos imaginaires. C’est un nouveau paysage hors du commun qui verra le jour, des sites d’exception divers, vivants, miroirs de la Seine-Saint-Denis.
Nous avons ici et aujourd’hui cette grande ambition, que nous voulons partager avec Paris, la France, l’Europe et le monde. Elle est le pivot historique d’une politique en faveur de nos villes et quartiers populaires. Nous l’avons appelé « La Beauté du geste ». C’est à partir de cette beauté et avec les nouvelles générations que nous écrirons le récit de cette olympiade, tournée vers le futur.
Signataires
Nil Dinç et Henriette Morrison (Gongle, expérimentations sociales et théâtrales), Cathy Bouvard (Les Ateliers Medicis), Catherine Simonpietri (Ensemble Sequenza 93), Annie Thomas et Vincent Merlin (Cinémas 93), Héloïse Pascal (Un neuf trois Soleil ! pôle ressource spectacle vivant très jeune public), Alexandre Vallès (Garde-Robe), Robert Turgis (UFOLEP 93), Sylvie Boulanger (CNEAI, centre d’art), Chantal Richard (Périphéries, centre création cinéma), Bruno Giel (CDOS de Seine-Saint-Denis), Patrice Haddad (Red Star Football club), Pierre Siméon (Promovoile), Saïd Bennajem (Boxing Beats), Jean-Paul Hatterer, Corinne Peratou, Clément Rémond (Comité FSGT 93), Pascal Papillon et Vanessa Khalfa-Duval (Tremblay-en-France Handball), Bruno Lacam-Caron (Le Flash de La Courneuve), Lea Micner (MAAD93, musiques en Seine-Saint-Denis), Pascale le Corre (Bibliothèques en Seine-Saint-Denis), Xavier Lemettre (Banlieues Bleues), Kamel Dafri (Villes des musiques du monde), Sébastien Lagrave (Africolor), Zahia Ziouani (orchestre symphonique Divertimento), Edgard Garcia (Zebrock), Nathalie Rappaport (Festival de Saint-Denis), Emma Raguin Lemettre (Panorama des cinemas du Magreb et du Moyen Orient), Sylvie Vassalo (Salon du livre et de la presse jeunesse), Juliette Bompoint (Mains d’œuvres), Julien Beller (Le 6B), Stéphane Simonin (Académie Fratellini), Philippe Mourat et Catherine Teiro (Citoyenneté jeunesse), Fabienne Pourtein (Maison des suds), Mathieu Bauer (Nouveau théâtre de Montreuil, Centre dramatique national), Hortense Archambault (Maison de la Culture de la Seine-Saint-Denis), Marie-José Malis (La Commune, Centre dramatique national), Jean Bellorini (Théâtre Gérard Philipe, Centre dramatique national), Emmanuelle Jouan (Théâtre Louis Aragon), Pauline Simon (Centre Culturel Jean Houdremont), Elsa Sarfati (Espace 1789), Anita Mathieu (Rencontres chorégraphiques internationales de Seine-Saint-Denis), Jacky Evrard (Côté court), Lisa Valverde (La Fontaine aux images), Jean-Pierre Vivante (Le Triton), Francis Lepigeon (Cultures du cœur 93), Olivier Darné (Parti poétique), Anne-Marie Jupin-Vendôme (Double point), Robin Renucci (Les Tréteaux de France, Centre dramatique national), Anna Stevanato (Dulala, D’une langue à l’autre), Annick Allaigre (Université Paris 8), Lionel Pioline (Directeur de l’ENACR), Pervenche Beurier (Pôle Média GrandParis)
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