Gwen Le Gac, haut les masques !
Cette illustratrice prépare pour le Salon du livre jeunesse en Seine-Saint-Denis une mascarade virtuelle. Du 29 novembre au 4 décembre, les visiteurs du Salon pourront prendre en photo leur reflet habillé d’un masque peint par les soins de l’artiste. Portrait de cette ambassadrice de la marque IN Seine-Saint-Denis.
Lauréate du prix « Baobab » du Salon du livre jeunesse en Seine-Saint-Denis en 2010, pour son livre « La règle d’or du cache-cache », Gwen Le Gac, illustratrice de littérature jeunesse, y revient cette année pour une création originale. Sur la moquette des allées seront disposés une quarantaine de miroirs posés sur pieds et peints de sa main. Lorsque les enfants, adolescents et parents s’y mireront, ils découvriront leur reflet flanqué d’un masque peint à même le miroir, image d’une pièce de la collection internationale de l’artiste. « Je leur propose ensuite de faire une auto-photo et de la partager sur les réseaux sociaux afin de créer une mascarade virtuelle », s’imagine déjà Gwen Le Gac.

Le masque est une des clés de voûte de son œuvre. Elevée à Poullaouen par un père notaire et une mère au foyer, elle se sent vite étouffée par la rigidité des codes de bienséance et de bonne conduite, le « masque social », dit-elle, qu’on veut lui faire porter. Solitaire et décalée, elle s’évade dans la nature pour pousser en liberté. Alors que sa mère s’adonne à des activités décoratives, « accessoires », comme les qualifie Gwen Le Gac, elle, commence le dessin. « Si tu continues, tu iras loin ... » : penchée au-dessus de son épaule et de son dessin, son enseignante lui fait cette prometteuse prophétie. Alors, Gwen continue. Etudes artistiques au lycée, licence d’arts plastiques à la fac de Rennes. Puis, comme il faut bien gagner sa vie, elle monte à Paris pour faire son école de design textile.
A l’occasion de son diplôme de fin d’études, elle confectionne avec Christophe Honoré un livre de souvenirs, « Bretonneries ». « Nous nous sommes rencontrés à 15 ans, et très jeunes, nous entretenions une correspondance. On s’envoyait des lettres, des dessins, on faisait ensemble des livres qui n’étaient pas édités », raconte-t-elle sur celui qui est devenu l’homme de ses livres, et dont elle a depuis illustré chaque album. Car, avant de devenir le réalisateur de films comme « La Belle Personne », ou « Dans Paris », Christophe Honoré était auteur de littérature jeunesse, et notamment du roman « Tout contre Léo », abordant, à hauteur d’enfant, la question du sida.

Après avoir travaillé pour la mode- une parenthèse qu’elle referme alors qu’elle est enceinte de sa première fille, à 32 ans- Gwen Le Gac réitère l’aventure de la publication avec « Le Terrible six heures du soir ». Très apprécié des enfants, le livre, qui parle de marmaille très effrayée par leur « papa-roi » et du « terrible six heures du soir », sans qu’on sache jamais exactement pourquoi, l’est beaucoup moins par les adultes. « Ce livre s’inscrit dans la veine des contes de fée, avec leur dureté. Certains adultes y ont réagi très violemment, parce qu’ils voyaient, dans le non-dit, la question de l’inceste », détaille Gwen Le Gac sans dissiper le mystère. C’est dans ce premier livre « important », affirme l’artiste, qu’apparaît pour la première fois le masque.
Depuis un an et demi, elle a installé son atelier dans une ancienne loge de concierge repeinte en blanc, au pied des « briques rouges » du Pré-Saint-Gervais. Aux murs, un filet de pêcheur sur lequel des pinces retiennent des dessins, des tests de peinture, de couleurs, de formes, et des boîtes qui s’entassent et dissimulent les projets qu’elle mène de front, au rythme moyen d’un album par an. Ce point de chute est l’aboutissement d’une carrière séquano-dionysienne.

Gwen Le Gac est en effet très liée à la Seine-Saint-Denis : habitante des Lilas, l’auteure y a déjà décroché plusieurs résidences au cours desquelles elle a créé ses derniers livres : « Je suis une couleur », sur le lien entre couleurs et émotions, puis « Enfant de pauvre », inspiré des rencontres avec les élèves des villes les plus défavorisées du 93. « Ce livre ne rencontre pas grand succès. C’est un sujet qui dérange les adultes, qui ne veulent pas voir cette réalité, alors que les enfants posent ouvertement des questions lorsqu’ils rencontrent des SDF, des migrants... On retombe encore sur cette question du masque social », regrette Gwen Le Gac.
Elle espère consacrer son prochain album à la nature, et le réaliser au cœur des cités-jardins, une utopie architecturale mêlant pavillons ouvriers et végétation, qui marquent la physionomie de ce qui fut un « Pré ». Une raison supplémentaire, pour elle de devenir ambassadrice de la marque "IN Seine-Saint-Denis" : « Je vis aux Lilas, où mes filles vont à l’école, je travaille au Pré-Saint-Gervais, je fais des rencontres dans tout le département... Alors quand le Conseil départemental m’a proposé de devenir l’une de ses ambassadrices, pour moi, ça tombait sous le sens. Je veux promouvoir ce territoire, casser l’image dark qui l’asphyxie, et vanter l’idée du métissage, dans la vie, comme dans les oeuvres », conclut-elle.
Photos : @Eric Garault et @Emilie Hautier
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