Avec Plantu, dessinez, c’est gagné
Mardi 31 mai et jeudi 2 juin 2016, le dessinateur Plantu et son association « Cartooning for Peace » ont reçu quelque 120 collégiens de Seine-Saint-Denis au siège du journal « Le Monde ». La touche finale d’un parcours éducatif et citoyen sur le dessin de presse, né d’un partenariat entre « Cartooning » et le Département.
« Pour un petit tour de chauffe, je vous invite à dessiner les clichés qui vous passent par la tête sur la Seine-Saint-Denis ». Il est comme ça Plantu, simple et sans ambages, aussi direct qu’un bon coup de crayon. Et avec les jeunes, ça passe plutôt bien. Pas timide, Mohammed, lycéen à Jean-Renoir à Bondy, monte donc sur scène pour jeter sur le papier – ou plutôt sur la tablette tactile - ce qui constitue pour lui « un bon gros cliché » sur les jeunes de Seine-Saint-Denis. « Forcément des voyous », grince le jeune homme.
Sous son coup de crayon pas toujours assuré naît donc un jeune à piercings, avec une casquette siglée 666, « le chiffre du diable ». Au bec, évidemment un joint et au coin de l’oeil deux larmes tatouées - « pour chaque personne qu’il a tuée, j’ai vu ça dans un film ». Lorsqu’il prend la parole, ce voyou confesse dans une bulle : « Papa est allé acheter du lait, mais il n’est jamais revenu ». Plantu, rigolard, l’aide à retordre sa casquette dans le bon sens et joue les faux naïfs. « Evidemment, là-dedans, tout est cliché, surtout la partie sur la cigarette », demande-t-il au jeune. Et celui-ci de répondre avec un grand sourire : « Bien sûr monsieur ».
« Cartooning for peace », c’est aussi ça : des discussions à bâtons (mais jamais à crayons) rompus sur le dessin de presse et sur la liberté, l’irrévérence, l’extravagance parfois même qu’il implique. Depuis deux ans, le Département de la Seine-Saint-Denis a lancé ce partenariat avec l’association de Plantu pour réaffirmer des valeurs républicaines fondamentales telles que la liberté d’expression, la laïcité, la fraternité. Un travail qui, après les attentats de janvier 2015 à Charlie Hebdo et de novembre à Paris et au Stade de France, a pris encore davantage de sens.

« De la même manière qu’il existe une éducation à l’image, il doit y avoir une éducation au dessin, explique ainsi Stéphane Troussel, président du Conseil départemental, présent ce jour-là aux côtés de Plantu. Dans un dessin, il y a ce qu’on voit immédiatement, ce qu’on croit en comprendre et ce qu’il y a derrière. Lire et interpréter tout cela s’apprend. » Face aux élèves, le président a expliqué vouloir prolonger le travail engagé avec « Cartooning for Peace » et même introduire de nouveaux ateliers. Aller plus loin que le seul milieu scolaire à travers des expositions de dessins en PMI ou travailler justement à la revalorisation de l’image de la Seine-Saint-Denis sont des actions envisagées.
Avec celui qui est dessinateur au « Monde » depuis 1985, les collégiens passent donc en revue différents dessins de sa carrière. Les siens, mais aussi d’autres. La discussion, feutrée mais tout de même présente, s’engage notamment autour du dessin d’un Hollandais que Plantu dit beaucoup aimer. Il représente un homme juché sur une échelle, la tête dans un nuage. En bas, un autre homme qui tient l’échelle lui demande : « Alors ? ». « Que voyez-vous ? », questionne à son tour Plantu. « Un dessin qui met en doute l’existence de Dieu », répond un élève. Le dessinateur du « Monde » ne souscrit pas à cette interprétation. « Pour moi, c’est un dessin sur le doute et le doute est autorisé en France », dit Plantu de manière on ne peut plus pacifique.
Après cet échange, on replonge dans l’odyssée des ébauches et autres caricatures. Des dessins de dénonciation sur la guerre à Sarajevo aux larmes de crocodile versées sur la mort du petit Aylan en passant par les récents attentats. « Vous faites jamais des dessins positifs ? » ose un autre collégien. « Tout dépend comment on le voit », réplique Plantu. « Dénoncer, c’est aussi inciter les autres et soi-même à changer les choses ». N’ayant jamais oublié qu’une scolarité difficile n’empêche pas de réussir sa vie, le dessinateur du Monde exhorte enfin le parterre de jeunes devant lui : « Je vous invite vraiment à vous exprimer. A votre âge, on a le ventre plein de feu, un feu positif et négatif. Utilisez ce feu pour faire des choses intelligentes. La création, ce n’est pas réservé qu’aux autres. »
Une fois sortis, les collégiens, un exemplaire du Monde du jour à la main, dansent un peu timidement d’un pied sur l’autre. « Ses dessins m’ont plu, ils étaient simples », estime Warren, 3e au collège Jean-Zay de Bondy en pensant notamment à celui exprimant la solidarité de la France envers la Belgique au lendemain des attentats du 22 mars à Bruxelles. « Pour moi, c’est normal qu’on puisse publier des caricatures sur les religions, c’est le principe même de la liberté d’expression », juge Gaëlle, du collège Nelson-Mandela du Blanc-Mesnil, déjà bien sensibilisée à la question puisqu’elle publie elle-même des articles dans le journal de son établissement.

Albright, du collège Jean-Zay de Bondy, se veut lui plus mesuré. « On peut dessiner sur la religion, bien sûr, mais pas de façon blessante » affirme cet adolescent qui condamne dans la foulée tout recours à la violence pour marquer son désaccord.
A ses côtés, sa professeure d’arts plastiques, qui a accompagné le parcours éducatif proposé par « Cartooning for Peace » dans leur collège, avec la venue du dessinateur franco-burkinabé Damien Glez, écoute attentivement. « Avec nos élèves, parler d’une représentation du religieux peut être difficile. Pas systématiquement, mais ça peut l’être, concède-t-elle. Il faut donc expliquer qu’en France, la critique de toutes les religions est permise au nom de la liberté d’expression. Et aussi rappeler que la religion musulmane n’a pas toujours été soumise à l’interdiction de représentation du Prophète. » Avec Plantu et l’équipe de « Cartooning for Peace », l’adage selon lequel il vaut parfois mieux un dessin qu’une longue explication se vérifie en tout cas.
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