Voyage jusqu’au bout de la mémoire
Engagés tout au long de cette année dans le Concours national de la Résistance et de la Déportation, 18 élèves de 3e du collège Joliot-Curie à Stains ont vécu une aventure extraordinaire qui les a changés à jamais. REPORTAGE.
Dès les premières notes du Chant des marais, les invités présents lors de ce concert à la salle des fêtes de la mairie du quatrième arrondissement à Paris, se lèvent. Au fur et à mesure des couplets chantés par les élèves, la salle frissonne et les larmes coulent. Pour ces 18 jeunes gens et jeunes filles, c’est la dernière étape d’un long périple qu’ils ont accompli depuis le début de l’année scolaire. Un point final récompensé par l’annonce, en fin de concert, de leur sélection pour la phase finale, après avoir passé avec succès le cap départemental.
Pour en arriver là, Fabien Pontagnier, leur jeune professeur d’Histoire, s’est entouré d’une équipe passionnée par le projet. Ils ont suivi pas à pas les jeunes Stanois, les ont aidés et éclairés. Parmi eux, Ludovic Lavigne, référent histoire des arts au service éducatif des Archives nationales à Pierrefitte. « Ce que je trouve extrêmement touchant dans ce projet, c’est qu’il s’est passé des choses remarquables, bien sûr de l’ordre scolaire ou de l’apprentissage, mais surtout sur le plan humain. Ces élèves ont réalisé un parcours inoubliable pour eux. Moi je suis admiratif ! »
Rencontre avec des survivants
« Il nous parle du camp, et c’est comme si je pouvais toucher le camp ! Le voir, être présent presque… Et c’est vraiment un honneur… » Quand Hausmann (15 ans) rencontre, avec ses camarades, Fernand Devaux rescapé du camp d’Auschwitz, l’émotion est forte. Celui-ci faisait partie du même convoi que Edouard Dumoulin, stanois, mort en déportation. Ce convoi appelé celui des 45 000, n’était composé que de déportés politiques.
À quelques jours du départ pour Buchenwald, pour découvrir l’univers concentrationnaire, Marwa, Achraf, Inès, Fatou et les autres préparent avec Fabien Pontagnier, leur professeur d’Histoire, la rencontre qu’ils auront le lendemain avec Bertrand Herz. Déporté à 14 ans, lui et son père à Buchenwald, sa mère et sa sœur à Ravensbrück, il en est revenu. Aujourd’hui, il préside l’Association internationale Buchenwald-Dora et témoigne régulièrement auprès de jeunes pour que l’oubli ne s’installe pas. Lectures, approche biographique, recherche sur le net, les élèves ont travaillé pour être fin prêts pour cette rencontre et pouvoir lui poser des questions essentielles.
« Je suis fier d’eux »
« La négation de l’Homme dans l’univers concentrationnaire nazi » est le thème du concours de cette année. Engagés depuis la rentrée de septembre dans un cheminement qui va les conduire de Stains, à Compiègne, en passant par le Mémorial de la Shoah et le Mont-Valérien pour finir leur périple en Allemagne, les participants au concours ont, selon les mots de leur professeur, « appris beaucoup de choses bien sûr, mais ont surtout changé en termes d’attitude. Ils ont gagné en maturité, et c’est remarquable. J’ai eu l’occasion de le leur dire lors de la rencontre avec Fernand Devaux, je suis fier d’eux ». La découverte des résistants stanois à partir des noms de rues et des plaques apposées dans la ville, aux côtés de Gérard Larue, fin connaisseur de l’histoire locale et de ses résistants et d’Anne Thiébaud, archiviste de la ville a été un véritable déclic. Grâce à une subvention obtenue auprès du Conseil départemental, dans le cadre du programme d’aide à la réalisation de voyages scolaires Odyssée Jeunes, le groupe accompagné d’enseignants est parti en Allemagne au camp de Buchenwald.
Là, ils ont participé à des ateliers préparés en partenariat avec le Mémorial, avant de reprendre la route pour aller saluer la ville sœur de Saalfeld, jumelée avec Stains. Sur le chemin du retour, ils découvrent sous la neige le camp du Struthof, en Alsace.
Au fur et à mesure de leurs lectures et rencontres, une superbe malle pédagogique s’est constituée et sera l’objet finalisé présenté au concours. Un travail remarquable et des jeunes gens qui méritent pour leur implication toute notre admiration.
« Nous nous sommes orientés vers la constitution de ce qu’on va appeler une malle pédagogique, explique Fabien Pontagnier. Elle comprend une exposition avec des panneaux reproduits sur des bâches souples. Ce qui nous a conduits à choisir cette forme, c’est l’idée de pouvoir prêter la malle aux établissements scolaires. En effet, nous souhaitons mettre en valeur la transmission des connaissances entre les élèves de 3e vers ceux de CM2, puisque ce sont les deux niveaux qui travaillent sur la question de la Déportation. Chaque panneau d’exposition aborde l’un des thèmes de la question du concours de cette année, et présente plusieurs séquences vidéo de nos rencontres avec les témoins. Nous avons également tourné quelques séquences dans le camp à Buchenwald. »
Le Département a mis en place un dispositif Odyssée Jeunes, un programme d’aide à la réalisation de voyages scolaires organisés par les collèges de Seine-Saint-Denis. Chaque projet peut bénéficier d’une subvention pouvant atteindre 10 000 €.
Les subventions attribuées permettent de réduire la contribution financière des familles et de ne laisser aucun enfant en dehors du projet de voyage. Après cinq années d’exercice, 7 millions d’euros et 2 conventions, ce programme a déjà permis la réalisation de plus de 800 voyages pédagogiques dans 34 pays pour près de 36 000 collégiens de Seine-Saint-Denis.
En juin 2015, la convention Odyssée Jeunes qui lie la Fondation BNP Paribas, le Conseil départemental de Seine-Saint-Denis et la Direction des services départementaux de l’Education nationale a été reconduite pour trois ans avec de nouveaux critère.
Le projet doit désormais s’inscrire dans la durée et se dérouler sur deux années scolaires minimum. Il doit comprendre au moins un voyage scolaire et plusieurs actions (sortie scolaire, exposition…) qui constitueront des jalons d’étapes du projet. Il doit ainsi s’inscrire dans un projet pédagogique plus global. Pour les projets de deux ans, la subvention sera d’un montant maximum de 20 000 euros tandis que les projets de trois ans pourront recevoir jusqu’à 30 000 euros.
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