Transe Express fait sa Mù à Georges-Valbon
Le 2 octobre, le traditionnel spectacle nocturne (et gratuit) organisé au parc Georges-Valbon de la Courneuve vous fera cette fois découvrir le monde magique et mystérieux de Mù, créé par la compagnie Transe Express. Interview avec l’un de ses directeurs artistiques, Rémi Allaigre.
C’est marrant comme nom de spectacle, Mù...
"Oui, on trouvait aussi. Ça joue sur la polysémie du mot : ce qui nous meut, mais aussi la mue, qui est très présente dans le spectacle. Et puis, Mù a aussi été le nom que certains géographes ont donné il y a quelques siècles à l’Atlantide, ce continent englouti légendaire. Cette idée de monde imaginaire et disparu nous a bien parlé."
C’est un peu une rencontre entre le ciel et la mer que vous nous proposez…
"Oui, je parlerais plutôt d’un voyage à travers les éléments. Au cours du spectacle, on passe par 4 tableaux différents. Au début, la structure d’acier posée au sol s’ouvre comme une fleur avec des musiciens : c’est la terre. Puis une grue va tirer sur cette fleur et en déclencher l’ouverture comme un volcan qui gronde : le feu. Ça va libérer une Etoile de l’air, avec un cortège d’acrobates. A la fin, on a une dernière transformation de la structure : l’Etoile de l’air se fait poulpe géant et fait connaître l’ivresse des profondeurs au public. C’est pour ça que je parlais de mue tout à l’heure."
Votre compagnie Transe Express revendique l’invention d’un « Art céleste ». Qu’est-ce que c’est que ça ?
"Il y a le point de vue - j’oserais dire - « terre à terre » : au fur et à mesure que nous faisions du spectacle de rue, on s’est rendu compte que dans une foule dense, on n’arrivait pas à être vus de tous. Or monter une scène, ça voulait dire renoncer à la déambulation. Donc on s’est dit qu’on allait se suspendre. On a commencé à se suspendre dans les arbres, notamment pour le traditionnel carnaval qu’on organisait dans la Drôme, et puis l’idée est venue de se suspendre sur un objet existant : un mobile de Calder. En 1992, le chorégraphe Philippe Decouflé qui mettait en scène la cérémonie d’ouverture des jeux olympiques d’Albertville, nous a commandé trois de ces mobiles. C’a été le début d’une recherche sur plusieurs structures ou sculptures de scène qui se poursuit encore aujourd’hui…"
Et ces mobiles, c’est vous qui les fabriquez ?
"Oui, c’est la spécificité de la compagnie. On a profité de la formation de sculpteur du fondateur de la compagnie, Gilles Rhode, et ça perdure, même s’il a passé la main depuis. Depuis 15 ans, Transe Express s’est installée dans un lieu, la Gare à Coulisses, à Eurre dans la Drôme, qui a été conçu spécialement pour nous, où l’on trouve des ateliers de construction. On travaille notamment avec un ingénieur qui nous fait des calculs pour dimensionner les objets et tester leur résistance. La dernière suspension en date, c’est un lustre de 12 mètres de diamètre, pour le spectacle « Cristal Palace ». On va d’ailleurs en jouer une partie le 1er octobre, sur la place de la Basilique de Saint-Denis, à l’occasion de la candidature de la ville pour la Capitale Européenne de la Culture 2028."
Transe Express va fêter l’année prochaine ses 40 ans. Comment s’explique cette longévité ?
"C’est qu’il y a eu une passation de génération entre les fondateurs, Gilles Rhode et Brigitte Burdin, et nous, Eléonore Guillemaud, Hélène Marseille et moi qui avons pris leur suite à la direction artistique. Ça s’est fait assez naturellement. On a essayé de garder la ligne artistique d’origine : notre univers, c’est le rêve ou la poésie du quotidien, on aime bien partir d’objets symboliques qu’on va agrandir démesurément, comme le lustre justement dans « Cristal Palace ». On essaie aussi d’alterner entre grands spectacles aériens et des formes plus souples de théâtre d’intervention, des formats qui vont au contact du spectateur et où il y a de l’interactivité avec le public."
Justement, Mù, c’est aussi un spectacle participatif : vous proposez à des habitants du lieu où vous jouez d’intégrer le spectacle. C’est systématique dans vos créations ?
"Une grande partie de nos spectacles sont participatifs, c’est un peu dans l’ADN de la compagnie. On aime bien embarquer les populations d’un lieu dans nos projets. En 1999, on avait créé « Lâcher de violons », un quatuor à cordes perché dans les airs, avec aussi une cinquantaine de tambours au sol. Et à chaque fois, ces 50 tambours étaient formés dans la ville où on allait jouer. Dans Mù, c’est un peu pareil : on est 18 professionnels et les volontaires seront 19. Ils contribueront aux parades qui ouvrent le spectacle. Ce côté participatif ajoute beaucoup à l’écriture du spectacle. En fonction de l’endroit où on va jouer et de la réactivité des volontaires, ça lui donne une couleur particulière. Ça nous fait vivre un spectacle unique à chaque fois."
Vous avez fait le tour du monde avec votre compagnie. Mais avez-vous déjà joué en Seine-Saint-Denis ?
"Oui, on a joué « Maudits sonnants » il y a quelques années à Saint-Denis. C’est un carillon de 26 cloches, qu’on jouait d’ailleurs sur la place de la Basilique. Ça reste un très bon souvenir. Sinon, on a souvent joué à la Fête de l’Huma, dans ce même Parc de la Courneuve qui va accueillir Mù. J’aime beaucoup la diversité culturelle propre à ce département : il y a ici un mélange d’origines, de cultures, de rythmes qui est stimulant."
Propos recueillis par Christophe Lehousse
Photos : ©Nikola Milatovic
- « Cristal Palace », place de la Basilique à Saint-Denis le 1er octobre à 18h
- « Mù », le 2 octobre à 19h, parc Georges Valbon à La Courneuve
Si vous souhaitez participer au spectacle Mù, la compagnie recherche encore des volontaires. Il faut avoir plus de 16 ans. S’adresser à Nicole : 04 75 40 67 74.
Les répétitions auront lieu 2 jours avant le spectacle, sur site, les 30 septembre et 1er octobre.
Le spectacle fait partie de la programmation départementale pour la Nuit Blanche 2021, dans laquelle s’inscrit aussi le "Cycle des Veilleurs", projet d’une chorégraphe australienne, Joanne Leighton.
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