MIGRATIONS Ensemble, déconstruisons les préjugés
Retour en VIDÉO sur l’événement ludique et participatif, dans le cadre des rendez-vous de Via le monde et de la campagne « La voix des migrant(e)s et des diasporas : déconstruire 10 idées reçues sur le lien entre migrations et développement » qui a eu lieu le 25 mars à Pantin.
Dans un contexte de crispation autour des migrations, en raison notamment d’une méconnaissance manifeste du lien entre migrations et développement, deux ONG, ICMC Europe et le FORIM, en lien avec le groupe de travail « Migrations et développement » de CONCORD, Confédération européenne des ONG, ont souhaité lancer une campagne européenne autour des préjugés sur les migrations.
En France, cette campagne, intitulée « La voix des migrant-e-s et des diasporas : déconstruire dix idées reçues sur le lien entre migrations et développement » rassemble des associations, collectifs, collectivités territoriales et est pilotée par le FORIM, plateforme de réseaux et regroupements d’associations de solidarité internationale issues des migrations. Elle se propose de coordonner un ensemble d’outils et d’actions pour permettre aux acteurs de questionner des préjugés ancrés dans l’esprit de nombreux citoyens.
Le Département de la Seine-Saint-Denis est partenaire officiel de cette initiative et s’est engagé, avec Via le monde, à relayer la campagne en organisant, entre autres, un événement à destination des acteurs de solidarité internationale et du grand public.
A ce premier « Rendez-vous de Via le monde » de l’année, ouvert au grand public, il a été décidé de réunir les porteurs de la campagne et les partenaires du territoire, afin que chacun apporte ses ressources et compétences et contribue à proposer un format adapté tant aux acteurs traditionnels de Via le monde (acteurs de solidarité internationale et d’éducation à la citoyenneté mondiale) qu’au grand public.
Cet événement construit sous un format participatif et ludique a eu lieu samedi 25 mars à La Dynamo de Banlieues Bleues à Pantin en présence d’associations du Département, et d’élu.e.s dont Élisabeth Guigou, députée de la Seine-Saint-Denis, Stéphane Troussel, Président du Conseil Départemental de la Seine-Saint-Denis et Abdel Sadi, Vice-président chargé des relations internationales et européennes, de la coopération décentralisée.
FOCUS n°1 : TRACE
Diffusion samedi à la Dynamo de Pantin du court-métrage « Trace ». Réalisé par une dizaine de jeunes, ce film tourné dans les camps de Calais et d’Athènes donne la parole aux migrants. Une expérience dense et humaine à laquelle a participé Thibault. Interview.
Pourquoi vous êtes-vous intéressé à la question des migrants ?
On voulait se faire notre propre avis sur la question. Vu le monde dans lequel on vit, ça nous a semblé naturel de nous emparer de cette question là. Et l’actualité nous a poussés à le faire. Il y a ceux qui ont fui le conflit syrien… et avant eux le conflit afghan ou somalien. Notre objectif : aller sur place, apprendre certaines clés et leur tendre le micro : « Dites-nous quelques choses qui viennent de vous. » Parler d’égal à égal. Se dire que c’est un type qui pourrait être comme nous. Si demain il y a une guerre on sera peut-être amenés à bouger de façon forcée.
Et qu’avez-vous appris ?
On a réussi à voir une partie du problème. A Athènes on avait un contact sur place, mais après il a fallu démarcher les gens, envoyer des emails, aller dans des anciens camps, aller sur place, marcher des heures. On est sortis de notre zone de confort et on est partis questionner ces migrants. On est partis grâce à la subvention de la mairie de Pantin avec un groupe assez élargi de personnes qui n’avaient pour la plupart jamais fait de voyage humanitaire. On étaient une dizaine.
J’imagine que ça a été difficile…
Pour ceux qui sont partis à Calais la première fois, oui. Même à Athènes, le soir, il y en avait qui étaient en larmes. Ça ne nous laisse pas indifférents quand on nous raconte des histoires, des parcours de vie, quand on bosse avec des jeunes et qu’on voit qu’ils ont des blessures physiques, des gens en fauteuil roulant, avec des béquilles, des malformations dues aux zones de conflits. Des blessures plus psychologiques. Il y en a qui ont pleuré. Il y a eu des coups de gueule. On se sentait un peu inutiles avec notre petit projet de film. Ces choses nous dépassent un peu en tant que citoyens.
Et à présent quel est votre objectif ?
Ce qu’on veut là, c’est diffuser notre film, ne pas le garder pour nous. On a pu faire une avant-première devant 250 personnes au Ciné 104 à Pantin en décembre dernier. On veut aussi le diffuser à des groupes de moins de 100 personnes pour pouvoir discuter. Faire des soirées-débats et échanger sur notre façon de voir les choses. On a sous-titré le film pour que les personnes parlant anglais ou arabe se fassent comprendre. C’est une œuvre artistique qui est porteuse d’un message.
Quel est votre message ?
On veut dire aux gens qui vont voir ce film qu’ils peuvent essayer de faire bouger les choses. Nous on est partis à Athènes mais on n’est pas forcément obligé d’aller loin. Se dire qu’il y a un migrant à côté de chez moi et qu’on va aller discuter. Pas par pitié. C’est un être humain comme un autre. On va voir ce qu’il a à nous dire. En faisant ça, la façon de voir l’autre change.
Sur le terrain, qui s’occupent des migrants ?
On a pu rencontrer la directrice du collectif d’aide aux exilés à Paris. On a pu avoir des gens de toutes nationalités qui se bougeaient sur le sujet. Il n’y a pas que les migrants. Il y a aussi des gens qui sont sur le terrain à leur contact, dans des situations assez difficiles. Avec peu de moyens financiers, avec peu de choses, mais beaucoup de volonté, on peut mener des actions qui ont du sens, des actions citoyennes.
Pourquoi si on a 18 ou 20 ans se rendre samedi à la Dynamo de Pantin ?
Pour voir une œuvre qui sort de l’ordinaire. Pour questionner des gens de leur âge qui leur ressemblent, qui sont étudiants, qui travaillent ou sont au chômage et qui ont fait un film qui n’est ni misérabiliste ni sensationnaliste. Un film qu’ils ne verront pas à la télé sur une question qui les concerne tous. Nous serons confrontés encore plus à des migrants au cours de notre vie. Les projections indiquent que les migrations seront un fait social assez commun.
Et on pourra débattre ?
Ce sera un échange. On ne mobilisera pas la parole. S’il y en a un qui veut pousser un coup de gueule pour dire que notre approche ne lui plait pas, on est habitués, on aime ça. Lors d’une précédente projection sur les enclaves de Ceuta et Melilla au Maroc on a eu des dames qui nous ont dit qu’il y avait beaucoup d’aide au développement. Mais on a réussi à leur expliquer que cela faisait 40 ans que ces aides existent et qu’elles n’aidaient pas forcément les populations. On va essayer de confronter nos points de vue. Tous les points de vue sont les bienvenus. Si il y en a un qui veut crier sa haine sur les migrants et dire que ce sont des voleurs d’alloc très bien il vient, il parlera, il aura un temps de parole attribué. On discutera avec lui. Personne ne sera excommunié par rapport à ses opinions. Ce sera ouvert à tous. Il y aura un temps de débat où ils pourront dire ce qu’ils pensent du film et plus largement de la situation en Europe ou ailleurs.
Tout le monde pourra débattre ?
C’est l’occasion de crever l’abcès. Ce n’est jamais bien de garder les choses en soi. Il faut parler de ces sujets. On n’en parle pas assez. Ce sujet est monopolisé par des gens qu’on dit experts qui vont passer sur des chaines d’infos ou des acteurs politiques qui vont penser avoir la science infuse. Mais les acteurs associatifs on les entend très peu.
La bande-annonce de " TRACES, une jeunesse au contact des migrants "
FOCUS n°2 : Les tee-shirts à message : c’est tendance !
L’association Yes Akademia installée à La Courneuve sera présente à la Dynamo samedi pour lancer le débat sur les préjugés liés aux flux migratoires avec des tee-shirts à message.
« Un emploi pour tous, même les migrants ? » « La France, terre d’accueil pour les migrants ? » « Pourquoi les migrants choisissent l’Europe ? » « Immigration : opportunités ou insécurité ? » Des questions complexes et brûlantes qui méritent bien un débat. Vous pourrez d’ailleurs choisir le vôtre samedi et discuter directement avec celui ou celle qui le porte. Les tee-shirts-débats comme on les appelle sont proposés par l’association Yaka.
« Yaka bouger, oser, rêver. Yaka ça donne de l’énergie et ça veut aussi dire « espoir » en wolof. C’est aussi le diminutif de Yes Akademia. Yes pour Youth empowerment solidarity en anglais : jeunesse, autonomisation et solidarité » explique Sarah Gogel, la présidente de l’association qui ajoute : « On est contents de participer à un Forum en France et en Seine-Saint-Denis car on agit beaucoup dans ce département. Les jeunes de Seine-Saint-Denis qui viennent chez nous se sentent très concernés. Beaucoup d’entre eux ont fait du bénévolat Porte de la Chapelle pour aider les migrants avec le projet de la ville de Paris. Beaucoup organisent des maraudes pour aider les réfugiés syriens. Ils sont conscients des enjeux. »
Qui sont les jeunes de Yaka ?
Ils ont entre 15 et 26 ans. Et depuis le mois de novembre, ils se rencontrent chaque semaine pour faire des ateliers ensemble sur l’entrepreneuriat responsable, sur la question de l’identité, sur comment contrer les discriminations et le racisme dans nos sociétés. Ils préparent un voyage de solidarité de 45 jours au Sénégal, en Inde et en Haïti cet été. Un projet solidaire soutenu par Via le monde. L’objectif : organiser eux-mêmes un forum dans les pays partenaires à Dakar, Mumbai et Port-au-Prince, comme tous les 12 août.
« Venez participer à un événement organisé pour et par les jeunes. Venez au tee-shirt-débat sur les questions de migrations. On abordera des questions assez pointues mais de façon ludique. C’est l’occasion de faire le plein d’arguments, de réponses » lance Sarah.
Son site internet : www.yesakademia.ong
FOCUS n°3 : « L’idée c’est de ne pas rester campé sur ses positions »
L’association Etudiants et développement installée à Montreuil propose une façon ludique de se remettre en question : le débat mouvant.
« L’idée est de se remettre en question : d’arrêter avec les préjugés sur les migrations qui biaisent notre vision des choses. » explique Lucile, 25 ans permanente à l’association Etudiants et développement qui ajoute « Le débat mouvant permet de prendre du recul sur ces questions. D’où viennent les migrations ? Est-ce que ce sont des migrations qui viennent forcément du sud et vont vers le nord ? Même d’aborder des questions plus sensibles. Il faut aller au cœur des choses et éviter les tabous justement pour faire réfléchir sur cette question. On est là pour veiller à ce que personne ne monopolise la parole. »
En quoi consiste exactement le débat mouvant ?
Il s’agit de répondre à une question en se positionnant dans la salle. Soit sur la droite ou sur la gauche pour dire oui je suis d’accord ou non je ne le suis pas. Si on reste au milieu « la rivière du doute », cela signifie qu’on n’est pas sûr de sa réponse. « Chacun va pouvoir s’exprimer et dire pourquoi il pense de cette manière. Au cours du débat mouvant, il peut changer de place. L’idée c’est de ne pas rester campé sur ses positions ». S’écouter les uns les autres, réagir, faire évoluer son opinion en réfléchissant ensemble sur un sujet. Le débat mouvant a le pouvoir de vraiment faire bouger les gens et faire avancer les idées. « On a déjà testé ce débat sur les migrations et effectivement il y avait au départ beaucoup de gens dans la rivière du doute car on remet en question le vocabulaire qu’on emploie. Qu’est-ce que c’est qu’un migrant ? Par rapport à un expatrié par exemple. C’est une question que le public ne se pose pas forcément... Le but est de pouvoir en discuter pour faire évoluer les avis. » On attend une quarantaine de participants samedi à la Dynamo de Pantin pour ce redoutable et animé débat mouvant.
L’association Etudiants et développement
Lucile, 25 ans
« Nous sommes une association qui accompagne les jeunes dans leur projet de solidarité internationale. Nous leur donnons des conseils en matière de recherche de financements, de partenariats pour les faire avancer dans leur projet. On les accompagne à travers des rendez-vous, des formations, des évènements. Notre cible : les jeunes de 18 à 30 ans déjà en association et ayant déjà un projet. Nous nous adressons aux jeunes qui sont dans des associations d’étudiants. Nous les aidons à formaliser leurs idées, les renseignons sur les pays. Nous les mettons en contact avec des personnes sur place. On va aussi pouvoir mettre en réseau ces associations étudiantes pour faire des ponts entre les projets. »
Le réseau des associations jeunes de solidarité internationale
27 rue Léon-Loiseau 93100 Montreuil
www.etudiantsetdeveloppement.org
01 55 86 74 41
Suivez-les sur : Facebook, Twitter, Youtube
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