Handball Villepinte Aubervilliers

Zaadi-Niakaté, le tandem du 93 au sein des Bleues

Elles seront deux Séquanodionysiennes à faire le voyage au Danemark, pour y défendre leur titre de championnes d’Europe de handball, à partir du 4 décembre. Grâce Zaadi et Kalidiatou Niakaté ont toutes deux découvert leur sport en Seine-Saint-Denis, à Villepinte pour l’une, à Aubervilliers pour l’autre. Toutes deux championnes du monde en 2017, elles continuent de cultiver un lien spécial à ce territoire où tout a commencé pour elles. Portrait.

Elles ont beau arborer le maillot bleu, être championnes du monde, évoluer l’une comme l’autre dans des clubs disputant la Ligue des Champions – Brest pour Kalidiatou, Rostov pour Grâce – leur cœur fait toujours « boum »quand on prononce le mot « Seine-Saint-Denis ».

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Grâce Zaadi sous le regard d’Olivier Krumbholz

« C’est là que tout a commencé », souffle simplement Kalidiatou, native d’Aubervilliers et formée au CM Aubervilliers entre ses 10 et 16 ans. « On n’en fait pas un lien exclusif, mais c’est clair que ce département a quelque chose de spécial. C’est dur à définir, mais peut-être le fighting spirit, un certain esprit de solidarité », embraye à son tour Grâce Zaadi, venue elle aussi au hand à 10 ans, au feu Real Villepinte Vert-Galant. « C’est sûr que ça crée un lien spécial entre elles, même si le cadre qui importe vraiment est celui de l’équipe de France, confirme Olivier Krumbholz, leur sélectionneur.

Surtout, ça démontre la très grande richesse de potentiels en région parisienne et le travail réalisé par les clubs de cette région, dont le 93, pour amener leurs joueuses tout en haut ». Et encore : elles pourraient être au nombre de trois si Allison Pineau, cadre des Bleues et formée à Aubervilliers et Villemomble, n’avait pas dû déclarer forfait suite à une fracture du nez.
Nos deux combattantes, qui le 4 décembre vont attaquer avec appétit un Euro au Danemark dont on n’aura su que très récemment qu’il allait se tenir malgré le Covid, ne se font pas prier pour replonger dans leurs souvenirs made in 93. « Avec Grâce, on aime bien de temps en temps se remémorer nos petits matches de moins de 14 ans, quand on jouait l’une contre l’autre, Auber contre Villepinte. Ca fait plaisir de voir qu’on s’est suivies, tout ce chemin, jusqu’en équipe de France », sourit « Kali » avec, malgré ses 25 ans, la brume du souvenir dans les yeux.

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Kalidiatou Niakaté

Un point commun entre les deux joueuses : pour toutes les deux, le 93 reste attaché au temps de l’insouciance. Non pas que leur vie d’aujourd’hui soit un enfer de pression, mais on n’a qu’une seule fois 14 ans… «  Le hand de ce temps-là, pour moi, c’est avant tout synonyme de copines : Jennifer Issifou (encore en activité à Montluçon, ndlr), Tracy Vere, les jumelles Richol, Lorrena Yong, on s’était toutes mises au hand pour pouvoir pratiquer un sport ensemble. Et comme à l’époque, les sections féminines ou mixtes en sport co étaient encore rares, c’a été le hand. », se souvient Grâce. « C’était le bon vieux temps, entre copines et sans pression. Le samedi, je restais toute la journée au gymnase Guy-Môquet, on jouait puis on restait jusqu’au match des seniors et ça se terminait souvent par un MacDo », évoque à son tour Kalidiatou, qui n’a pas à s’inquiéter puisqu’il y a prescription.

Encore que parfois, ce souvenir d’insouciance soit tout relatif. Grâce Zaadi : « Lors d’une compétition jeunes précédant le tournoi international de Paris, on avait perdu en finale avec la sélection du 93 face à la Seine-et-Marne. Je me souviens que j’avais éclaté en sanglots parce que le vainqueur obtenait le droit d’accompagner l’équipe de France féminine sur le terrain. Les finalistes, elles, n’avaient le droit « que » d’escorter le Danemark. A l’époque, je ne savais pas que les Danoises étaient aussi des joueuses réputées. A mes yeux, il n’y avait que les Bleues... » Ironie du sort : les Danoises figurent dans le groupe de qualification des Bleues sur cet Euro...

Histoires de rencontres

Autre élément en commun : des rencontres made in Seine-Saint-Denis qui auront considérablement marqué la trajectoire des deux pépites. « Basiquement mes entraîneurs, qui m’auront parfois un peu bousculée, mais pour mon bien : je suis une tête dure », remercie Grâce Zaadi avec une pensée toute particulière pour Zahra Chabbi. Cette figure d’Aubervilliers, victime d’un grave accident de la route en 2009, avait croisé le chemin de la jeune demi-centre de Villepinte à ses 15 ans. « C’est elle qui m’a poussée à faire les détections à Issy et qui m’y a emmenée personnellement », n’oublie pas Grâce, qui sera ensuite lancée pleine balle : 10 ans à Metz, avec 7 titres de championne de France. Même coup de chapeau à ses entraîneurs pour Kalidiatou qui ajoute toutefois une figure en plus : l’athlète balbynienne Muriel Hurtis. « Elle était venue nous voir sur un de nos matches, et le discours qu’elle nous avait alors tenu sur l’importance de persévérer en tant que femmes dans le sport de haut niveau m’avait marquée », se souvient l’Albertivillarienne qui avait un temps hésité à chausser elle aussi les pointes.

Et persévérer, « Kali » n’a fait que ça, elle qui, comme son modèle sacrée en 2003 au Stade de France, est devenue championne du monde en 2017 avec les Bleues, tout comme Grâce Zaadi, élue d’ailleurs à cette occasion meilleure demi-centre du tournoi. Niveau discours féministe, Kalidiatou a aussi retenu la leçon : « Je trouve que le hand féminin manque encore beaucoup de visibilité. Pourtant, on ne peut pas dire que l’équipe de France ne gagne pas de titres. Alors, c’est peut-être un peu mieux qu’il y a dix ans, mais le compte n’y est toujours pas, sur l’égalité femmes- hommes », envoie l’arrière gauche.

Regard noir, Grâce Zaadi sort la sulfateuse pour finir le boulot : « En termes de médiatisation et de salaires, la différence est énorme entre les hommes et les femmes, et ça c’est rageant. Alors qu’honnêtement on fait la même chose... On a vraiment l’impression que le travail qu’on fournit n’est pas reconnu ». Fighting spirit ? Oui, on confirme.

Christophe Lehousse
Photos de une : ©J. Schlosser

Le tour préliminaire des Bleues à l’Euro 2020 :

 France-Monténégro, le 4 décembre
 France-Slovénie, le 6 décembre
 France-Danemark, le 8 décembre
Les 3 premiers de ce groupe de 4 disputeront le tour principal.

Christophe Lehousse
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