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Cercle 93, tête haute !

Pour la deuxième année consécutive, la finale du championnat de France Elite de water-polo opposait le Cercle 93 à Marseille, la référence. Le 18 mai le match aller au stade nautique Maurice-Thorez de Montreuil s’est soldé par une victoire des Marseillais 17 à 13, qui ont confirmé chez eux 13 à 7. Vice champion de France, le Cercle 93 a pourtant gagné sur bien des points...

Avis aux lecteur·trice·s : Noisy-le Sec a donc perdu sa finale à l’issue du match retour à Marseille. Nous vous proposons néanmoins de revivre le match aller avec ce reportage sur le parcours hors-norme du Cercle 93.

Quelle équipe, dans l’histoire du water-polo, a disputé sa finale nationale deux années successives hors de chez elle faute de bassin aux normes ? Une seule, le Cercle 93. Ni la piscine Edouard-Herriot de Noisy-le-Sec, ni la Baleine de Saint-Denis, ni le centre nautique Roger-Lebas de Livry-Gargan, les villes des trois clubs réunis au sein du Cercle 93, ne sont aux normes pour recevoir une finale du championnat de France Elite. Cette année, c’est à Montreuil que les poloïstes de Seine-Saint-Denis ont organisé leur match aller de finale. Mais ce n’est pas l’écrin qui fait la valeur du joyau...

Première période

  Début de la rencontre, c’est Marseille qui s’empare du ballon et, sur l’attaque suivante, marque le premier but. Le ton est donné. Marseille est le favori, monument du waterpolo français avec 38 titres, et il a l’intention de tenir son rang. En face, le Cercle 93 peine un peu à se mettre dans le rythme du champion en titre. Le Monténégrin Uros Cuckovic, la pointe (attaquant de pointe) de Marseille, dévie une passe, but. 2-0

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Le Cercle 93 est né du rassemblement des clubs de Noisy-le-Sec, Saint-Denis et Livry-Gargan pour promouvoir le waterpolo, avec le soutien du Département de Seine-Saint-Denis. « Il nous donnera le rayonnement qu’on ne pourrait atteindre seul, chacun de notre côté. », explique Jonathan Moriamé, ancien gardien de l’équipe de France et directeur sportif du Cercle des nageurs noiséens.

  L’heure de la révolte a sonné du côté du Cercle et c’est Antonio Petkovic, vice-champion olympique avec la Croatie, qui fait jouer l’expérience et marque le premier but siglé 93. Les deux équipes s’engagent, les pénalités tombent. Au waterpolo, une faute entraîne souvent une exclusion temporaire et l’équipe joue à moins un pendant 20 s, une période importante dans un sport aussi rapide ! Et surtout, à sa troisième pénalité, le joueur reste sur le banc. Important en fin de rencontre… Le Cercle 93 tient bon, serre sa défense et égalise juste avant la fin de la première période. 4-4

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Noisy-le-Sec peut se vanter d’être le club Elite avec la cotisation la moins chère de France, adaptée au tissu local. « Nos gamins sont là tout le temps, pas besoin de les supplier pour qu’ils soient là le week-end, ils n’ont pas papa-maman derrière, détaille Jonathan Moriamé. Le water-polo est un sport où il ne faut pas se laisser faire, et nos garçons et nos filles y vont vraiment. J’ai joué à Nice, là-bas il faut toujours pousser les gamins. Ici, il faut les retenir. »

Deuxième période

  Marseille reprend l’avantage sur penalty. Sur l’attaque suivante, le capitaine du Cercle 93 Mehdi Marzouki prend ses responsabilités et envoie de loin un missile… qui termine sur la barre. Contre-attaque marseillaise opportuniste et but. 6-4. Le Cercle ne baisse pas la tête et inscrit l’un des plus beaux buts du match : Marzouki au centre passe au grand Danois Bjorch qui prolonge d’une main à l’aveugle derrière lui sur l’ailier Denis Do Carmo qui tire immédiatement : but ! 5-6 A force de ténacité, le Cercle revient à égalité 7-7, mais Marseille marque encore et la deuxième période s’achève sur le score de 7-8.

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Dans les tribunes, Enzo Carrera, 15 ans et presque 1m90, n’en finit pas de taper comme un sourd sur sa grosse caisse, il a même mis des gants tellement il cogne ! Gardien formé à Saint-Denis, il fait partie des quatre jeunes espoirs du Cercle 93 entrés cette année dans le dispositif départemental de Génération Jeux, qui soutient les jeunes sportifs de haut niveau. Avec lui, Veljko Laces, du Cercle des nageurs noiséens, Nikola Nikolic et Jakub Novacek, du Club Nautique Livry-Gargan, tous en tribune à soutenir leurs modèles ! Ils sont bien partis pour suivre leurs traces puisqu’ils sont titulaires de l’équipe de France moins de 15 ans et avec les moins de 19 ans du Cercle 93, ils ont participé à un exploit : gagner le championnat de France avec un sans-fautes : 18 matches, 18 victoires !

Troisième période

  La troisième période commence avec la troisième exclusion (définitive) de Denis Guérin côté Cercle 93 qui se voit là privé d’un élément important de sa défense. Le gardien Stefan Zivojinovic, souvent blessé cette année, tient à terminer sa saison et à quitter la Seine-Saint-Denis sur une bonne note, il multiplie les arrêts : 11 en tout durant la partie. Mehdi Marzouki pèse autant en attaque en signant un troisième but qu’en défense. Bras en l’air devant un attaquant marseillais (on ne peut défendre qu’avec un bras en waterpolo), il le baisse soudain déclenchant le tir de son adversaire… alors que Mehdi change de bras, contre ! Le public connaisseur apprécie : « Oh le malin, l’expérience… Faut être sûr de soi pour tenter une feinte pareille. Monsieur Marzouki ! »

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Mehdi Marzouki, c’est le symbole du Cercle des Nageurs Noiséen. Né à Noisy-le-Sec, il a grandi à 2 minutes à pied de la piscine et a commencé le waterpolo à 8 ans. Avec Jonathan Moriamé, Florian Bruzzo (actuel sélectionneur de l’équipe de France), ils ont fait monter le club de la 4ème division jusqu’à l’Elite, et même une Coupe d’Europe contre Barcelone en 2007. Titulaire en équipe de France, c’est Mehdi Marzouki qui l’a qualifiée sur penalty pour les JO de Rio. Mais au début de la rencontre, moment d’émotion : le speaker annonce que ce sera le dernier match à domicile du héros. L’an prochain, il jouera sous les couleurs des Enfants de Neptune Tourcoing Lille métropole…

Quatrième période

  Elle commence comme les autres, avec une première possession marseillaise. Malgré leurs efforts, malgré une lucarne superbe de Mehdi Marzouki, le Cercle ne parvient plus à remonter au score. Les joueurs titulaires ont joué presque sans s’arrêter, ils fatiguent et déjà trois d’entre eux sont consignés sur le banc après trois fautes. Dans les gradins, Enzo et ses copains entament un « Merci Mehdi, merci ! » qui fait résonner tout le bassin. Marseille déroule son savoir-faire et profite logiquement d’une équipe plus homogène au très haut niveau. Score final 17-13.

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Il sera vraiment très difficile samedi 21 mai de battre Marseille chez lui de plus de 4 buts pour devenir champion de France. Mais comme le dit Julie Eissen, présidente du Cercle 93 : « Vice-champion de France, pour la deuxième fois consécutive, derrière un club qui compte 38 trophées… Vraiment pas de quoi rougir ! »

Photos : Sylvain Hitau

Mehdi Marzouki, l’après match et l’après Noisy

A l’issue de la rencontre, le n°9 emblématique et capitaine du Cercle 93 est revenu sur la rencontre :

Lors de cette rencontre, Marseille s’est montré solide comme à son habitude, mais le Cercle 93 a fait preuve de ténacité et revenait constamment au score…
 Oui on a montré du caractère, c’est ce qu’on voulait. On savait que ça n’allait pas être facile et à chaque fois que l’on perdait de deux buts, on revenait. On a joué avec le cœur mais ce qui a pêché chez nous, c’est notre manque de remplaçants. Marseille joue avec 13 joueurs, nous, nous jouons avec 10 joueurs. Les autres sont des jeunes, trop tendres pour ce niveau. Mais même si nous sommes déçus du résultat, nous sommes contents de ne pas avoir baissé les bras.

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Vous deviez avoir une émotion particulière pour votre dernier match à domicile avec le Cercle 93…
  Mon dernier match je ne sais pas, car j’ai toujours dit que le dernier match de ma carrière serait à Noisy-le-Sec donc je reviendrai, pour un match ou pour une saison mais je reviendrai.
J’avais à cœur de rendre tout l’amour que le public m’a donné, de faire un bon match. C’est vrai que ça fait bizarre car j’ai tout connu avec ce club. La N3, la montée en Elite, la première Coupe d’Europe, la première Champion’s League… Mais j’avais besoin d’un nouveau challenge pour mes deux prochaines années avant les Jeux olympiques. J’ai eu du mal à prendre cette décision, j’ai hésité longtemps, mais je me suis dit que j’allais penser un peu à moi. J’avais besoin de ça mais Noisy… C’est mon club de cœur !

On a bien vu pendant le match que vous preniez vos responsabilités de capitaine, en prenant les tirs, en étant incisif en défense…
  Oui, je suis l’enfant du club, le capitaine, si ce n’est pas moi qui montre l’exemple, qui va le montrer ? J’ai fait ça ces 4 dernières années, et être capitaine dans une équipe avec de tels caractères, ça demande de l’énergie ! On ne peut pas être focus sur soi-même, c’est exigeant. Aller dans un autre club, cela me permettra d’être plus concentré sur mon jeu, pour pouvoir faire briller la France lors des Jeux olympiques 2024, chez nous !

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