Quand les collégien·ne·s de Seine-Saint-Denis disent stop au racisme

Quand les collégien·ne·s de Seine-Saint-Denis disent stop au racisme
Jeunes contre le racisme

Des vidéos sur les préjugés, des textes ou des saynètes dénonçant le racisme : c’est ce qu’on a pu découvrir lors de la restitution de Jeunes contre le racisme et l’antisémitisme, mardi 21 mars à Bondy. Lancé en 2021, le dispositif vise à sensibiliser les collégien·ne·s de Seine-Saint-Denis à travers des ateliers d’expression. Reportage.

« Les Arabes ne sont pas des bouffeurs de couscous. Les Chinois n’ont pas transmis le Covid. Les Portugais ne travaillent pas tous dans le bâtiment. Noir n’est pas une identité. » Les mots des élèves du collège Tabarly des Pavillons-sous-Bois résonnent fort dans le cinéma Malraux de Bondy. Et ils sont justes.
La saynète, courte et percutante, finit par nous montrer les quatre collégiens avec le poing levé. Ces élèves de 3e ont écrit et répété la scène en compagnie de Jamila Bensaci, une metteuse en scène intervenant dans le cadre de Jeunes contre le racisme et l’antisémitisme.

JPEG - 16.7 Mo

Ce nouveau dispositif,porté par l’Observatoire Départemental des Discriminations et de l’Egalité (ODDE), en est à sa deuxième édition. Proposé cette année à 9 collèges, il vise à sensibiliser les élèves aux préjugés reposant sur les origines, la couleur de peau ou la religion. Mais aussi à dénoncer un racisme dont ils·elles sont parfois victimes ou témoins directs.

« A Aulnay, les violences racistes de la part des policiers, ça existe », lâche ainsi Seymo, en 3e au collège Debussy dans cette ville. Avec ses camarades Oksana, Ashley et Mahyedine, cette jeune fille a choisi de faire porter leur texte de libre expression sur le destin de deux jeunes, Ilyès et Adama, victimes d’un contrôle au faciès. « Ca arrive souvent dans les quartiers, mais c’est pas encore assez médiatisé », soulignent les quatre jeunes qui, eux, étaient accompagnés par un autre intervenant, l’écrivain Mabrouck Rachedi.


« Le but n’est pas de faire de l’Histoire, mais bien d’être dans l’actualité. Certains des jeunes avec qui j’ai travaillé ont vécu le racisme ou le voient sur les réseaux sociaux. Donc c’est positif à mon sens d’avoir un espace où on peut raconter ça », poursuit cet écrivain qui animait déjà la première édition de Jeunes contre le racisme. Ce qui n’empêchait pas pour autant de resituer la lutte contre le racisme dans un contexte historique : des vidéos d’archives sur la Marche pour l’égalité et contre le racisme, qui fête cette année ses 40 ans, les engagements anti-colonialistes de Gisèle Halimi ou la lutte des Chibanis contre la politique discriminatoire de la SNCF rythmaient ainsi la manifestation.

Affiches, vidéos et punchlines

Riche en émotions, la restitution présentait aussi l’avantage de proposer des formes d’expression très différentes. Saynètes de théâtre ou textes lus donc, mais aussi petites vidéos réalisées en compagnie d’une troisième intervenante, la vidéaste Cécile Hadj Hassan. Ou alors affiches aux slogans percutants : « On a plus de chances de trouver des traces d’intelligence sur Mars que dans le cerveau d’un raciste. » ou « Martin Luther a fait un rêve. A nous de le réaliser ».
_
Ces pancartes, dessinées par l’association Remembeur à partir des punchlines des élèves, orneront d’ailleurs la caravane contre les discriminations qui repartira cet été sur les routes de Seine-Saint-Denis. Mise en place elle aussi par l’ODDE, cette campagne itinérante permet là encore de sensibiliser les habitants de Seine-Saint-Denis aux différentes types de discriminations et d’envisager des démarches juridiques en cas de discrimination avérée.

« La Seine-Saint-Denis, c’est un département où l’on trouve toutes les couleurs de peau, toutes les origines. Et nous, nous sommes fiers de ça. Si on propose donc ce dispositif Jeunes contre le racisme, c’est bien sûr pour sensibiliser, mais aussi pour s’engager contre tous ceux qui peuvent nous opposer les uns aux autres », souligne ainsi Stéphane Troussel, le président de la Seine-Saint-Denis.

JPEG - 31.3 Mo

On repartait de la restitution avec certaines images ou récits en tête. Par exemple celui imaginé par Manel, Sophie et Sukhmanprivet, du collège Descartes à Tremblay : l’histoire d’une jeune fille d’origine turque qui, moquée au collège pour son accent, devient chirurgienne pédiatrique et se retrouve, des années plus tard, à sauver la fille de sa propre harceleuse. « On voulait montrer quelqu’un qui ne se laisse pas faire, mais qui ne tombe jamais dans la colère », expliquaient timidement les jeunes filles après la représentation. Jeunes contre le racisme et pour l’inspiration.

Christophe Lehousse
Photos : ©Nicolas Moulard

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *