Premiers de Cordée, le sport comme baume au cœur
Mercredi 22 mai, 4000 enfants étaient au Stade de France à l’invitation de Premiers de Cordée. Cette association, financée en partie par le Département, vise à faire s’échapper des enfants malades et handicapés de leur quotidien grâce au sport. Lors de cette journée, les petits sportifs ont eu des coaches de luxe, parmi lesquels Kylian Mbappé !
Effervescence au Stade de France. En ce mercredi ensoleillé, 4000 enfants déboulent dans l’enceinte qui a vu Zinédine Zidane devenir champion du monde en 1998 et la génération Mbappé se roder pour la conquête du titre 20 ans après. D’habitude, ce sont eux les stars. Mais ce jour-là, il y a du héros dans chacun des enfants invités à cette journée exceptionnelle par Premiers de Cordée.
20 ans que cette association invite maintenant enfants malades ou handicapés à venir découvrir des sports pour s’évader, se changer les idées et puiser du courage aux côtés de champions d’exception (voir encadré).
Antoine*, 12 ans, sort par exemple tout juste de l’atelier escalade. Accompagné par sa maman Nadège*, ce petit garçon plein de vie passe un excellent moment. Rien à voir avec ces moments d’enfermement qui ont suivi l’annonce de son diabète, à 8 ans. « A ce moment-là, c’était comme si sa vie s’était arrêtée, témoigne sa maman en aparté. Tout d’un coup, il a renoncé à plein de choses que sa maladie ne lui interdisait pourtant pas. Par exemple, il s’est arrêté de faire du violon parce qu’il était persuadé que les dextros (piqûres de contrôle aux doigts) allaient l’empêcher d’en faire. Et là, il a peur de commencer le judo alors que je sais qu’il en a envie. Le but de cette journée, c’est donc de lui faire petit à petit reprendre confiance. »
Et justement, sur ce stand judo vers lequel Valentine aimerait tant emmener son fils, Annabelle Euranie et Laëtitia Payet sont à pied d’œuvre. Ces deux championnes (un titre de vice-championne du monde de judo pour Euranie, trois médailles de bronze aux Europe pour Payet) signent des autographes, mais sont surtout là pour prodiguer conseils et encouragements à tous ceux qui pénètrent sur le tatami. « C’est un beau moment de partage et d’échange, estime Annabelle Euranie, qui tenait d’autant plus à participer à cette Journée Evasion qu’elle est originaire de Tremblay, ville de Seine-Saint-Denis. On cherche avant tout à ce que les enfants pensent à autre chose, à les sortir de leur quotidien. Mais c’est aussi important qu’ils se rendent compte qu’ils sont capables d’accomplir des choses. Réussir une prise de judo par exemple, ça les valorise. »
Un peu plus loin, Tristan et Yunus, en fauteuil roulant, font eux la queue pour pouvoir découvrir l’escrime. « J’ai déjà testé l’escalade aujourd’hui. Je viens surtout pour le plaisir de pratiquer, de découvrir de nouvelles activités », explique Tristan, dont le SESSAD de Villiers-le-Bel (Service d’éducation spécialisé et de soins à domicile) propose déjà du foot, du basket et un apprentissage natation. « Si une journée comme celle-ci peut aussi servir à la sensibilisation de tous au handicap à travers le sport, ce sera bien. Car il y a vraiment encore du boulot. Dans notre secteur géographique, il n’y a aucune offre de sport adaptée au handisport. Les clubs locaux n’ont pas de sections handisport et ça manque cruellement. », juge Thomas, éducateur dans ce SESSAD.
Ping-pong, danse, taekwondo en compagnie de la Courneuvienne Gwladys Epangue, médaille de bronze à Pékin, on continue notre tour d’horizon des sports proposés. Jusqu’à arriver au terrain de foot délimité par une structure gonflable. Là, Côme, 12 ans, maillot de l’équipe de France sur les épaules, attend de pouvoir rentrer sur le terrain en compagnie de ses parents et de sa grande sœur. Une leucémie et une maladie génétique qui touche ses ligaments n’ont pas eu raison de sa passion du foot, bien au contraire. « Avec sa maladie, mon fils a un peu dû faire le deuil de sa pratique d’avant. Mais à l’inverse, le sport a aussi été pour lui une motivation formidable, témoigne sa maman Séverine. Comme quand un membre de notre famille lui a offert le maillot de l’OM dédicacé par les joueurs. Le lendemain, il voulait réapprendre à marcher... »
Tout à coup, brouhaha dans l’assistance. Une grappe de gamins, de micros et de caméras se dirigent vers le terrain de foot : c’est Mbappé en personne qui vient taquiner le ballon avec les enfants. Accompagné de l’ancien manager d’Arsenal Arsène Wenger, et du joueur de tennis Paul-Henri Mathieu reconverti en footeux, le champion du monde formé à l’AS Bondy passe une bonne heure sur le city-stade, à faire marquer les enfants et signer des autographes à en avoir mal à la main. « Ces enfants font des choses surhumaines toute l’année. Ce sont eux les stars, pas moi », déclare-t-il dans un sourire. Comble du bonheur pour Côme : il est sur le terrain ! Un match de foot et un maillot dédicacé plus tard, le petit garçon a les yeux qui brillent : « Il m’a fait la passe et m’a dédicacé mon maillot ! » Des souvenirs pour toute la vie.
Eléonore Makowski et Christophe Lehousse
Photos : ©Nicolas Moulard
*Ces prénoms ont été changés
Premiers de Cordée, 20 ans d’évasion
Ce mercredi 22 mai, l’association Premiers de Cordée a organisé sa journée Évasion au Stade de France. Cette journée est l’une des quatre proposées cette année, en l’honneur du 20è anniversaire de l’association (avec Le Mans, Nice et Bordeaux car la structure est aussi présente en région).
Alors, Premiers de Cordée, qu’est-ce que c’est ? Au départ, c’est un collectif d’étudiants amoureux du sport et de sportifs professionnels qui voulaient « rendre au sport ce qu’il leur apportait », raconte Sébastien Ruffin, directeur général de l’association. Ils se sont alors tournés vers la pédiatrie, dans un but purement récréatif en proposant des journées découverte des sports à des enfants malades. « Il y a deux aspects : le côté « on oublie tout grâce au sport », et la part de rêve quand on rencontre des champions qu’on pensait pas pouvoir toucher. » explique Christian Jeanpierre, journaliste, commentateur sportif et membre d’honneur de l’association.
Avant d’être organisatrice de la journée Évasion, l’association travaille toute l’année dans les hôpitaux d’Île-de-France. « C’est un travail sur la durée, il faut établir une relation de confiance avec les pédiatres et les autres professionnels de santé. », affirme Sébastien Ruffin. Leurs visites sont conventionnées par les structures hospitalières, l’association s’engage pour 15 à 25 visites par an dans un même hôpital, tout cela pour 5 à 6 000 enfants bénéficiaires d’une initiation au sport par an.
Une autre dimension s’est ajoutée récemment à l’activité de l’association : le sport santé.
En janvier 2017, l’Assemblée nationale a voté un décret instituant le sport sur ordonnance, autrement dit une activité physique adaptée à différentes pathologies. Et cela, Premiers de Cordée n’a pas été la dernière à le comprendre : « Toutes les maladies chroniques vont toujours avoir une meilleure évolution quand une activité physique est maintenue : cancer, équilibre du diabète, maladies cardiovasculaires, pathologies respiratoires (asthme, mucoviscidose) », précise Mathieu Pellan, médecin pédiatre référent de Premiers de Cordée.
L’aspect mental et psychologique est également primordial dans l’utilisation du sport auprès des enfants malades et handicapés : « Une activité sportive apporte une meilleure estime de soi : on peut se reconstruire grâce au sport par des mini-défis, on récupère ainsi une meilleure confiance pour se battre contre la maladie. », complète le docteur Pellan. Sans oublier que, durant toute l’année, le sport est aussi un moyen pour les enfants de garder un contact avec l’extérieur. En journée, c’est le moment des soins et des visites. Puis les parents s’en vont et les soirées sont souvent longues pour les enfants esseulés. Voilà pourquoi Premiers de Cordée intervient le soir, après le repas. Lorsque les visites sont terminées, il est l’heure de se dépenser !
Éléonore Makowski
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