Madeleine Malonga, un titre mondial au pays du judo
A 25 ans, cette judoka de l’Etoile Sportive Blanc-Mesnil a été sacrée fin août championne du monde pour la première fois de sa carrière, chez les -78kg. Cerise sur le kimono, c’était au Japon, pays de naissance de sa discipline et pays hôte des Jeux de Tokyo 2020, dont cette bosseuse rêve aussi.
Juste après son titre mondial, sur le tatami de Tokyo, Madeleine Malonga n’en finissait pas de pleurer. « Je suis tellement heureuse, je crois que je vais pleurer pendant 15 jours », lâchait-elle à chaud. Quelques jours plus tard, les yeux de « Mado » avaient arrêté de couler, mais l’émotion était toujours présente en sourdine. « Mon rêve en commençant le judo, c’était d’être championne du monde. Et là, c’est un premier aboutissement après des années de dur travail. En plus, mes parents et mon petit frère étaient dans la salle, ça a donné une saveur particulière au moment ». Avec en prime une victoire en finale sur la championne du monde sortante, la Japonaise Shori Hamada devant son public, on comprend que ça lui arrache quelques trémolos… « Je l’avais déjà battue à deux reprises avant ça, mais j’appréhendais quand même parce qu’elle jouait domicile », raconte-t-elle doucement, d’une voix aussi posée qu’elle est déchaînée dans un dojo.
Son titre, cette bosseuse l’a effectivement construit patiemment, avec persévérance et méthode, tout en sachant bien s’entourer. En 2016, le club de Levallois où elle combattait jusqu’alors périclite. La jeune femme se tourne alors vers l’Etoile Sportive du Blanc-Mesnil, qui aura aussi eu la joie de voir Margaux Pinot ramener une médaille de bronze de ces Mondiaux. « L’ESBM, c’est une super structure. A tel point que j’ai choisi de faire toutes les séances techniques au club, avec mon coach Alain Schmitt, les randori (les combats) se faisant forcément à l’INSEP. », témoigne Malonga.
Là-bas, au QG fédéral où elle est entrée en 2010, elle côtoie pendant des années ce qui se fait de mieux chez les -78kg, dont une certaine Audrey Tcheuméo, championne du monde et vice-championne olympique, native de Bondy. « C’est sûr que quand vous êtes dans la même catégorie qu’Audrey, ce n’est pas évident. C’est un monument du judo français ! Mais en même temps, ça l’a tirée vers le haut. Le résultat, on le voit aujourd’hui », la félicitait Larbi Benboudaoud, entraîneur de l’équipe féminine nationale, lui-même séquanodionysien pur jus.
©Philippe Rabouin
Sa médaille d’or de championne du monde, qui s’ajoute à celle de championne d’Europe acquise en 2018, vient ainsi récompenser une trajectoire faite de sacrifices et de détermination. Découverte des tatamis dès 8 ans dans son Val d’Oise natal après un passage peu concluant par la danse, départ en sport-études à 13 ans pour Amiens et entrée à l’INSEP à 16 ans : autant d’étapes d’un parcours porté par la passion et tendu vers la performance. Mais ce chemin n’aura pas été rectiligne pour autant : « Je suis de la génération d’une Clarisse Agbegnenou (quadruple championne du monde). Mais pour moi, l’éclosion a été un peu plus tardive, je ne suis pas rentrée tout de suite en équipe de France », confiait celle qui, en plus du talent, a la victoire modeste.
©Thierry Albisetti
Pas du genre à jeter des fleurs, Larbi Benboudaoud se faisait lui plus élogieux sur la jeune femme : « C’est une fille sérieuse, qui a de grosses qualités et qui les fait fructifier par son travail. Elle n’est pas compliquée à entraîner, c’est le moins qu’on puisse dire : elle sait ce qu’elle veut. » Bien équilibrée avec ça : quand elle n’est pas sur un tatami, « Mado » bûche sa 2e année d’école d’infirmières à Saint-Maurice (Val-de-Marne). « Ce double projet n’est pas toujours évident, j’ai par exemple dû louper une session d’examens en raison des Mondiaux, mais je tiens bon. Parce que je veux préparer mon après-carrière et que c’est aussi un épanouissement socio-professionnel pour moi : nous les sportifs, on a tendance à être dans un monde à part. Là, j’ai un contact avec des personnes extérieures au judo et ça me fait aussi du bien », analyse cet esprit sain dans un corps sain, qui s’est aussi paré d’argent à l’épreuve par équipes des Mondiaux.
Et maintenant ? Comme dans un bon Hitchcock, Madeleine Malonga aimerait bien revenir sur les lieux de son forfait : c’est dans ce même complexe du Nippon Budokan qu’auront lieu l’année prochaine les compétitions de judo des Jeux de Tokyo 2020. « C’est sûr qu’avec ce titre, j’ai fait de bons repérages », sourit Madeleine Malonga. Auparavant l’attendent d’autres épreuves : avec une seule place par catégorie, la bataille pour la sélection olympique s’annonce rude, Audrey Tcheuméo et Fanny-Estelle Posvite postulant elles aussi. Mais quand « Mado » a une idée derrière la tête…
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