Saint-Denis In Seine-Saint-Denis Littérature jeunesse

Le "road-movie" confiné de trois Séquano-Dionysiennes

Avec « La nuit tombe, Maman rêve », Cécile Dumoutier, Luna Granada et Eve Gentilhomme signent un album jeunesse plein de rêve et de poésie, qui aborde avec légèreté des thèmes peu traités dans les livres pour enfants comme la monoparentalité. Cet ouvrage 100 % made in Seine-Saint-Denis, puisque l’éditrice et l’auteure sont dionysiennes, est aussi présenté lors de l’édition virtuelle du Salon du Livre 2020.

« Que font mes parents quand je dors ? » Cette question, on se l’est tous plus ou moins posée quand on était petit. C’est aussi le point de départ de « La nuit tombe, Maman rêve », album jeunesse à l’ambiance nocturne et magnifiquement onirique, qui vient de sortir des ateliers de « La tête ailleurs », petite maison d’édition indépendante de Saint-Denis. Cette histoire d’un petit garçon, qui se plaît à imaginer ce que fait sa maman lorsqu’il glisse lentement dans le sommeil, a été mise en musique par trois amies : Cécile Dumoutier et Luna Granada pour le texte (la seconde a par ailleurs édité l’ouvrage à travers sa maison d’édition La tête ailleurs) et Eve Gentilhomme pour les illustrations.

« L’ouvrage part en fait d’une pièce de théâtre que j’avais écrite auparavant, Roadmovie en HLM, qui évoquait déjà les sentiments et les envies que peut éprouver une maman solo, ce besoin d’avoir aussi son espace à elle », explique Cécile Dumoutier. Des thématiques qui ont fait mouche auprès de Luna Granada, dont la maison d’édition « La tête ailleurs » recherche souvent des sujets sociétaux, féministes et/ou urbains. « Evoquer ces thèmes, la monoparentalité ou la charge mentale, nous semblait important, mais on voulait évidemment que le livre reste joyeux et vivant », rebondit l’éditrice et auteure. Complices, ces deux-là se sont donc adjointes une troisième larrone, Eve Gentilhomme, dont les dessins, colorés et doux, à la Marc Chagall, collent parfaitement à cette histoire hésitant en permanence entre rêve et réalité.

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Autre originalité : la place faite à la banlieue, pas si fréquente en littérature jeunesse. Les petits clins d’oeil à Saint-Denis, croqués par la Montreuilloise Eve Gentilhomme, émaillent ainsi l’ouvrage : ici la silhouette familière de la Basilique illumine le soir, là une affiche vient rappeler la populaire Fête des Tulipes de la cité dionysienne.

« C’était important pour moi que l’histoire se déroule dans une ville populaire. La Basilique s’est imposée naturellement car c’est un symbole très fort pour moi. A mes yeux, elle abrite autant les rois de France que les sans-papiers : c’est un emblème patrimonial de la ville », insiste Cécile Dumoutier, native de Saint-Denis et par ailleurs directrice de l’association Déchets d’Arts. « Montrer le territoire sous toutes ses facettes, créatives et poétiques, et pas toujours sous un angle négatif, c’est un peu la raison d’être de La tête ailleurs », complète Luna Granada qui avait avant cela publié le recueil « Salade de racines » du photographe Yvan Loiseau, résultat de ses pérégrinations à travers la Seine-Saint-Denis.

Ironie de l’art, le premier confinement durant lequel l’ouvrage a été écrit fait écho au « confinement » de la maman solo, retenue chez elle par son enfant qui dort et forcée de s’en remettre à son imagination pour continuer à avoir des moments à elle. « Faire un ouvrage à plusieurs mains n’a pas été plus difficile pendant le confinement, bien au contraire : c’était notre moment à nous, un véritable échappatoire », témoignent à l’unisson les trois comparses.

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La sortie du recueil en plein reconfinement est en revanche plus compliquée : compte tenu de la situation des librairies, l’ouvrage ne peut pour l’instant être commandé que sur le site de La tête ailleurs. Une pré-vente via un crowdfunding (160 commandes) et une présence lors de l’édition tout numérique du Salon du Livre de Montreuil du 2 au 7 décembre (notamment sur la chaîne Via Grand Paris) vont tout de même « limiter la casse » en attendant une re-sortie quand les conditions le permettront… Par ailleurs, « La nuit tombe, Maman rêve » devrait faire partie de la sélection d’ouvrages jeunesse achetée tous les ans par le Département pour en doter crèches et PMI. En attendant le monde d’après, « La nuit tombe, Maman rêve » vous transportera en tout cas, vous et votre enfant, dans le beau songe d’une nuit dionysienne.

- « La nuit tombe, Maman rêve », éditions La tête ailleurs, 15 euros
Pour acheter l’ouvrage, commandez-le sur le site de l’éditeur.

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