Accueil des migrants : le courage d’agir

Accueil des migrants : le courage d’agir
Territoire des Jeux

Les collectivités de Seine-Saint-Denis adhérentes à l’Anvita (association nationale des villes et des territoires accueillants) s’étaient donné rendez-vous à Pantin mi-décembre.Une première rencontre destinée à partager ses expériences pour un accueil digne et humain des migrants.

« La Seine-Saint-Denis compte le plus fort taux d’immigré·e·s en France métropolitaine : 30%, avec une grande diversité de populations immigrées. C’est un défi pour notre territoire et une chance aussi  » lance Stéphane Troussel président du Département qui a réuni les villes du 93 adhérentes de l’Anvita pour échanger sur les enjeux migratoires. L’objectif : réfléchir à ce que pourrait être une politique départementale pour un accueil digne et humain des migrant·e·s en Seine-Saint-Denis. « Dans les semaines qui viennent, dans notre pays il va y avoir une enième loi qui va être débattue au parlement. La Seine-Saint-Denis doit prendre sa place dans ce débat et porter une vision, des propositions concrètes que nous devons formuler. Ma conception est celle d’un accueil digne, respectueux des droits humains, d’une puissante publique qui assume ses responsabilités. » ajoute ce dernier.

Construire un campus de la francophonie en Seine-Saint-Denis

Pour Stéphane Troussel, il faut ouvrir de vraies perspectives d’intégration notamment par l’apprentissage de la langue : « Notre projet est d’organiser, d’initier, de développer un campus francophone en Seine-Saint-Denis avec le concours de linguistes, d’expert·e·s engagé·e·s pour permettre aux nouveaux arrivants de mieux se saisir de la langue française. (…) Au moment où nous organisons de grands événements internationaux, un campus de la francophonie pourrait être un atout majeur ».

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« Inconditionnalité de l’accueil »

« On est ravi de pouvoir être ici, car l’objectif est très ambitieux. On estime que la dynamique qui est en train de se mettre en place ici, devrait se mettre en place partout.  » explique Céline Barré, Co-directrice Nationale de l’Anvita, un réseau de collectivités et d’élu·e·s qui a été fondé à l’initiative de Damien Carême en 2015-2016. Alors maire de Grande-Synthe, il avait créé un camp de réfugié·e·s avec Médecins Sans Frontière pour accueillir les migrant·e·s kurdes qui tentaient la traversée vers l’Angleterre. L’Etat avait fini par reprendre la gestion du camp.

L’Anvita un acteur reconnu

« A la suite de ce campement, on a organisé la convention nationale pour l’accueil des migrations où on a invité des élu·e·s, des chercheurs et chercheuses. On a créé ce réseau à l’initiative de 6 ou 7 villes et aujourd’hui à l’Anvita, on est 73 communes, dont des métropoles, des départements, des régions. On a aussi ouvert l’adhésion à des élu·e·s à titre individuel qui ont besoin d’être accompagné·e·s, d’être formé·e·s dans la compréhension des enjeux de l’accueil des personnes sur un territoire. On s’est rendu compte qu’un peu partout en France des collectivités, des élu·e·s mettaient en place des dispositifs d’accueil, sans vraiment de communication, avec le sentiment d’être isolé·e·s. »
Le 15 décembre dans le cadre du projet de loi Asile et Immigration, L’Anvita a été auditionnée par le cabinet de Madame Sonia Backès, Secrétaire à la Citoyenneté sur la question de l’« équilibre territorial ». « Nous commençons à être un acteur reconnu par l’Etat sur la question de l’accueil des Ukrainiens, des Afghans, ce qui n’était pas évident non plus au démarrage de l’Anvita. » rappelle Céline Barré.

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La Seine-Saint-Denis, Bagnolet, La Courneuve, Montreuil, Saint-Denis et bientôt Bobigny

Une première rencontre qui a permis aux élu·e·s des villes adhérentes à l’Anvita de dénoncer les incohérences institutionnelles vécues sur le terrain. Pour la ville de Saint-Denis, la maire-adjointe Oriane Filhol a plaidé notamment pour un rééquilibrage de la domiciliation postale : « 25% des personnes qui viennent au CCAS de Saint-Denis y sont domiciliées par le Secours catholique et Médecin du Monde dont les sièges sociaux sont sur notre commune ». Concernant l’insertion professionnelle, l’élue dyonisienne déplore que les mineur·e·s isolé·e·s formé·e·s en apprentissage par l’entreprise Dubrac ne soient pas régularisé·e·s et qu’il faille entamer un bras de fer avec la préfecture. Stéphane Troussel ajoute que les deux tiers des contrats jeunes majeur·e·s pris en charge par l’Aide sociale à l’Enfance, ne sont pas régularisé·e·s. « Alors même que la puissance publique les a accompagné·e·s pendant trois ou quatre ans, a investi en leur avenir à la demande du juge pour enfants. » Michel Agier, anthropologue, directeur d’études à l’IRD et à l’EHESS salue le courage d’agir des collectivités présentes, et ce dans un contexte aussi hostile.

Le Département candidate au projet européen Urbact

Afin de partager ses savoirs-faire et expériences en matière d’accueil et d’inclusion des migrant·e·s avec d’autres villes européennes, le Département prépare sa candidature à l’appel à projet européen Urbact. « J’entends parfois parler de la gentrification de la Seine-Saint-Denis, elle est indéniable. Mais pour des raisons économiques, de proximité avec Paris, de transports, la Seine-Saint-Denis restera pour longtemps cette machine à intégrer qu’elle est depuis toujours. En étant exigeant, ambitieux, nous ferons reconnaître par les pouvoirs publics ce rôle de territoire tremplin  » a conclu Stéphane Troussel, président du Département.


Une matinée de travail qui n’avait pas pour ambition de tout résoudre mais qui a permis d’identifier les forces et les faiblesses, les lacunes et les obstacles afin d’initier des actions coordonnées sur le territoire.

Isabelle Lopez

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