Art contemporain Romainville

Le Frac sort de sa réserve à Romainville

Le 6 mai dernier, à Romainville, a été inauguré le nouveau bâtiment du Frac Ile-de-France, « Les Réserves ». Celui-ci donne enfin des réserves pérennes à la collection de ce Fonds d’art contemporain. L’exposition "Children Power", consacrée à l’enfance et organisée jusqu’au 6 juin, marque une première ouverture réussie au public.

Cette inauguration coïncide avec le démarrage d’une exposition consacrée au domaine de l’enfance Children Power. Après de longs mois de confinement et de fermeture des musées et galeries, cette exposition est une véritable bouffée d’art pur. Rouvrir ces lieux avec des œuvres dont les enfants sont le cœur battant, rajoute et démultiplie le plaisir.
Ce grand voyage au pays de l’enfance, projet ambitieux conduit par son directeur Xavier Franceschi, se déploie sur les trois lieux constitutifs du Frac : le Plateau, à Paris, le château de Rentilly, en Seine-et-Marne, et les Réserves à Romainville.

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Stéphane Calais, Jill, sculpture, 2002. Collection Frac Île-de-France

A Romainville, les enfants et les adolescents, vrais acteurs des pièces exposées

Proclamer que les enfants ont un pouvoir (« Children Power »), c’est déjà s’organiser pour le leur reconnaître et le leur donner. C’est le cas pour ce premier volet de cette exposition, installé dans les Réserves, à Romainville, nouveau lieu flambant neuf, qui s’intègre dans l’espace dédié aux arts visuels de la Fondation Fiminco.
Ici, les élèves de deux classes d’une école et d’un collège de la ville (CM2 et sixième) ont été invité.e.s à s’emparer de la collection en y effectuant le choix d’un ensemble d’œuvres. Réalisant donc ni plus ni moins un travail de commissaires d’expo. Avec l’aide de l’équipe des publics du Frac, ils ont décidé de prendre le portrait – au sens large – comme fil conducteur de l’accrochage et de réfléchir sur la mise en relation des pièces entre elles. Cette exposition se tient dans les espaces des Réserves ouverts au public. Par ailleurs, le Frac Ile-de-France dispose dans sa collection de plusieurs dispositifs d’exposition conçus par des artistes, permettant de présenter d’autres œuvres et d’investir tout type d’espace. C’est le cas avec la Vidéothèque Mobile de Fabrice Gygi, qui offre la possibilité de choisir un film et de le visionner ensuite sur un moniteur. Cet ensemble d’œuvres est présenté pour la première fois dans les espaces vides des futures réserves. Une fois les œuvres entreposées à partir de l’année prochaine, le public ne pourra plus y avoir accès. Parmi les œuvres choisies par les enfants de Romainville, vous pourrez découvrir une vidéo de John Baldessari, un portrait de Jill, la fille de Stéphane Calais, des créations de Florence Paradeis, Bruno Botella et bien d’autres artistes. Enfin, une initiative dont il faut souligner le challenge entièrement relevé et réussi par les enfants : le Frac possède une collection de partitions musicales, dont certaines (celles de Pierre Huyghe, Anri Sala, Thu-Van Tran) ont été activées par des groupes d’enfants et adolescents de 7 conservatoires de musique du territoire Est Ensemble (Pantin, Bondy, Montreuil, Bagnolet, Noisy-le-Sec, Le Pré-Saint-Gervais, Romainville). Il est possible de les regarder et de les écouter. Au final, cet ensemble qui nous fait voyager, est une bien belle initiative, pour redémarrer la vie culturelle et redonner confiance en l’avenir grâce à l’enfance et la jeunesse qui sort de sa réserve.

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Arirang partition, de Thu Van Tran, 2009. Collection Ile-de-France

Une exposition pour les enfants

« En concevant ce projet, explique son commissaire Xavier Franceschi, j’ai voulu que les enfants en soient très proches et en soient les acteurs, autant que possible. Il faut se dire qu’ils ont une façon de voir le monde qui leur est propre. Ce monde, ils le découvrent, c’est tout frais, et on peut se dire que la perception qu’ils en ont – une perception qui n’est pas ou qui n’est plus la nôtre, a une grande valeur, une force dont il faut tenir compte. »
Le deuxième volet qui se tient au Plateau, à Paris, est uniquement réservé aux moins de 18 ans. Retournement de l’interdit auquel nous sommes habitués. Il s’agit d’une exposition pour les enfants. Elle ne pourra être visitée par des adultes que s’ils sont accompagnés d’enfants. Quinze artistes ont été invités à réfléchir et à produire des œuvres pour certains, sur ce que signifie une exposition interdite aux adultes. Les artistes surexcités par la proposition ont joué le jeu, car après tout, ne s’agit-il pas d’un grand jeu avec des règles à respecter, dont celle de l’interdiction aux plus de 18 ans… Quant aux artistes exposés, ils ont manié tout l’alphabet de la création pour offrir des univers où chaque visiteur sera intrigué, interloqué, surpris ou embarqué malgré lui. Ainsi Richard Fauguet et ses tampons encreurs reproduit fidèlement des œuvres de Picasso et offre la possibilité aux enfants de s’asseoir sur des rouleaux de moquette bleu et rose afin de mieux observer les œuvres. Jonathan Martin a imaginé lui, un espace de danse pour les enfants et les adolescents. Il a lui-même produit la vidéo projetée, la musique électro et l’espace, avec l’espoir d’y voir évoluer en rythme des enfants. Mais nous n’en dirons pas plus, cette exposition étant interdite aux plus de 18 ans…

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Photos d’enfants du photographe allemand August Sander

Une exposition sur l’enfance

C’est dans le château de Rentilly que se tient le troisième volet de Children Power. Un superbe domaine ouvert au public. Là, se dresse le château que l’artiste Xavier Veilhan a habillé d’inox et de glaces sans tain où le ciel et le parc se reflètent. Magnifique ! D’une superficie de 48 hectares, le domaine de Rentilly compte trois espaces paysagers distincts : le parc à l’anglaise, la perspective à la française et la forêt. Un écrin de nature pour un espace dédié à la création, le château. Pour mettre sur pied ce troisième volet consacré à la photo et à la vidéo, Xavier Franceschi a dû explorer dans les 23 fonds régionaux d’art contemporain et répondre à cette question : « Qu’en est-il de la représentation de l’enfance, des enfants et des adolescents au travers la création photographique et vidéographique ? » Un travail de longue haleine qui l’a conduit à cette sélection d’œuvres, de la fin du XIXe siècle à nos jours. « Le visiteur a l’étrange impression de se sentir scruté par les regards d’enfants qui habitent le château comme autant de fantômes. » Avec Les Enfants de Berlin, Christian Boltanski questionne notre rapport à la mémoire en nous confrontant aux regards d’une jeunesse destinée, comme nous, à disparaître. Trente-quatre portraits couleur réalisées en 1975 dans une école berlinoise. Ces portraits reprennent les codes de la photo de classe. La répétition du geste photographique crée une forme d’étrangeté qui peut mettre mal à l’aise le visiteur. Les amateurs pourront redécouvrir avec plaisir des photos d’August Sander, Henri Cartier-Bresson, Robert Doisneau, William Klein ou Marc Riboud.

Claude Bardavid
Photos : Martin Argyroglo ; August Sander

« Les Réserves » à Romainville

Ce bâtiment de 2000 mètres carrés, construit à l’initiative de la Région Ile-de-France et cofinancé par le ministère de la Culture accueille les réserves des collections du France, soit 2000 œuvres. Il propose également 400 mètres carrés d’espaces d’exposition, sur trois niveaux, permettant au public de découvrir ces œuvres. Conçu par l’agence d’architecture Freaks, ce site s’inscrit dans le nouveau pôle d’art contemporain de l’Est parisien, avec la Fondation Fiminco, plusieurs galeries d’art contemporain, l’association Jeune Création et une école de mode et de design.

Children Power

« Les Réserves »
43, rue de la Commune de Paris
93 220 Romainville (accès métro ligne 5, Raymond-Queneau)
Ouvert depuis le 19 mai au public, du mercredi au dimanche, de 14 à 19 heures . Jusqu’au 6 juin 2021

Château de Rentilly
Domaine de Rentilly
1 , rue de l’étang
77 600 Bussy-Saint-Martin
Jusqu’au 18 juillet 2021

Le Plateau
22, rue des Alouettes
75019 Paris
Jusqu’au 19 décembre (fermeture estivale du 28 juillet au 29 août)

Claude Bardavid
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