Lutte contre la fracture numérique Plan rebond

Le Département augmente le débit pour lutter contre la fracture numérique

En France, le double confinement dû au Covid a mis en évidence la fracture numérique, et tout particulièrement en Seine-Saint-Denis. Pour lutter contre ces inégalités, le Département vient de nouer un partenariat avec l’association Emmaüs Connect et la CAF de Seine-Saint-Denis. Grâce à ce dispositif, 1100 personnes non-équipées vont se voir attribuer un ordinateur. Reportage auprès de quelques-uns des bénéficiaires, à la circonscription du service social de Sevran.

« Cet ordinateur va bien nous aider, mon fils et moi. », confie, soulagé, Djoumoi accompagné de son fils Emirdin, 7 ans. Cette famille sevranaise vient de se voir attribuer un ordinateur grâce au partenariat signé mardi 17 novembre entre le Département, l’association Emmaüs Connect et la CAF de Seine-Saint-Denis. « Emirdin va pouvoir s’en servir pour ses devoirs. On espère que les écoles ne refermeront pas, mais si c’était le cas, ce serait plus simple que lors du premier confinement où nous n’avions que mon téléphone portable. Et moi, ça va m’aider pour chercher du travail. Je viens de suivre une formation de surveillant de nuit qualifié et là je cherche un poste. Avoir un ordi, ça change pas mal de choses... », complète cet habitant, suivi à la circonscription du service social départemental de Sevran.
Au total, ce sont 1100 ordinateurs qui vont être prochainement distribués à des Séquano-Dionysiens éloignés du numérique grâce à ce partenariat inédit. Le but est clairement affiché : lutter contre la fracture numérique, déjà connue, mais soulignée par un premier confinement qui avait lourdement handicapé les gens privés de connexion.

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« Ce partenariat inédit par son ampleur s’inscrit dans le Plan rebond de 55 millions d’euros voté cet été par le Département pour faire face à la crise. On a vu pendant le premier confinement à quel point le numérique avait permis le maintien de certains services publics et à l’inverse à quel point le manque d’équipements s’était traduit en renforcement des inégalités. A travers cette aide, il s’agit non seulement de lutter contre la fracture numérique mais aussi contre le non-accès aux droits qu’elle engendre », soulignait ainsi le président de la Seine-Saint-Denis, Stéphane Troussel. Le Département n’en est pas à sa première action contre la fracture numérique : en mai, ce sont par exemple 800 ordinateurs qui avaient été distribués à des collégiens et lycéens sans équipement, avec le soutien de la BNP Paribas et déjà d’Emmaüs Connect. Mais avec ce partenariat, la Seine-Saint-Denis entend en quelque sorte passer à la fibre.

Même son de cloche du côté de la CAF, partenaire dans ce dispositif. « On ne découvre pas le sujet de l’inclusion numérique. Voilà dix ans que nous tentons de lutter contre la fracture numérique, en déployant par exemple des médiateurs dans tous nos points d’accueil. Mais c’est vrai qu’avec la crise sanitaire et sociale, il nous a paru important d’accélérer cet accompagnement vers une autonomie numérique de nos bénéficiaires. », expliquait Pascal Delaplace, directeur général de la CAF de Seine-Saint-Denis, qui versera 300 000 euros au dispositif, sur le budget total de 500 000.

A charge pour Emmaüs Connect de mettre en musique ce plan : en collectant 1100 ordinateurs neufs ou reconditionnés qui seront attribués à 500 allocataires du RSA et 600 usagers du service social départemental ou de la CAF. Il y aura aussi d’autres bénéficiaires : 900 collégiens seront équipés de cartes SIM prépayées grâce à un partenariat entre Emmaüs Connect et SFR et 150 allocataires du RSA seront par ailleurs formés aux compétences de base du numérique.

17 millions de Français concernés par l’"illectronisme"

« Depuis 2013 et notre année de fondation, nous essayons d’intervenir en permanence sur ces trois champs : lutte contre le manque d’équipements, lutte contre les carences en connexion et enfin lutte contre l’illectronisme, qui désigne le manque de maîtrise d’une partie de la population face aux usages du numérique. », précise Guillaume-Alexandre Collin, président d’Emmaüs Connect. Les données manquent à l’échelle de la Seine-Saint-Denis, mais on estime que 17 millions de Français seraient concernés, à des degrés divers, par l’« illectronisme ». « La fracture numérique est un sujet à prendre vraiment au sérieux car c’est un frein massif sur de nombreux sujets : recherche d’emploi, démarches administratives, suivi de la scolarité des enfants, accès aux droits. Et en période de confinement, c’est devenu encore plus criant », insiste Antoine Guimbaud, responsable territorial d’Emmaüs Connect pour la Seine-Saint-Denis.

L’association, qui compte un point d’accueil à Saint-Denis, organise tout au long de l’année des formations devant renforcer l’autonomie des habitants face au numérique, mais celles-ci sont malheureusement très perturbées par le reconfinement.

Florence Yapo, assistante au service social départemental de Sevran, invitait aussi à ne pas lâcher sur le numérique : « Pour les personnes que je suis, un ordi, ça change quand même la vie. D’abord parce que de la recherche d’emploi à la carte vitale, tout passe aujourd’hui par le numérique. C’est encore plus vrai avec le confinement où même l’attestation de déplacement devient un problème si on n’a pas internet. Après, ce n’est pas non plus une baguette magique : il faut d’une part maîtriser l’outil informatique et d’autre part, ce n’est qu’un des ingrédients d’un retour vers l’emploi. Mais c’est quand même un sacré soulagement pour les familles. »

Photos : ©Nicolas Moulard

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