Francis I, Francis II, Francis III ou la saga des Pouchard à Pantin
C’est l’histoire d’une famille qui a marqué un territoire en se transmettant de génération en génération un bien industriel, un nom, et même un prénom.
Il y a des dynasties porteuses d’un nom et d’une activité qui ont cette faculté de traverser le temps et les âges comme si rien ne pouvait altérer leur notoriété. Celle des Rockfeller dans la banque et les affaires ou celle des Coppola dans le cinéma avec, comme tête d’affiche, Sofia, la fille, en sont la preuve. Plus près de nous et admettons-le, à une autre échelle, si les Pouchard ont constitué une dynastie, ils ont limité leurs activités essentielles sur le territoire de Pantin. Petite particularité qu’il faut souligner, dans cette famille, on se prénomme tous Francis, avec un deuxième prénom pour se distinguer.
C’est en 1927, que Francis Emile Pouchard (51 ans), grand-père du dernier président des Etablissements Pouchard se lance dans l’industrie du tube. Son grand-père paternel, Julien Louis est boucher, son père, Isidore est boulanger. Du côté maternel, les Corlouër, on est mariniers, marin ou capitaine au long cours. La famille bretonne suit le mouvement migratoire qui se produit au cours des XIXe et XXe siècles et s’installe en région parisienne et déménage à plusieurs reprises pour s’installer dans le 19e arrondissement de Paris avant de s’établir à Bobigny. Deux ans après la fondation de l’entreprise par Francis Pouchard et Paul Avril, son cousin germain, on compte 162 tubistes dans Paris intra-muros et 25 tubistes dans le département de la Seine, dont 15 sur le territoire qui constituera le département de la Seine-Saint-Denis. On les trouve à Montreuil, à Pantin et au Pré-Saint-Gervais. Ces implantations « illustrent bien ce bassin industriel très orienté vers la petite mécanique et la petite métallurgie. Ils représentent une échelle industrielle très différente de La Plaine-Saint-Denis où les emprises sont généralement beaucoup plus étendues » relève Antoine Furio dans son ouvrage « Pouchard la saga du tube à Pantin » (1).
Après quelques années d’activité, l’entreprise connaît une période difficile, avec une situation économique très tendue, qui conduit l’entrepreneur à emprunter à des proches bretons et à hypothéquer divers biens de famille. Cela ne suffit pas, et l’entreprise est déclarée en faillite en 1935. Mais grâce à un retournement de situation, une phase de redressement s’opère et la Manufacture d’étirage de tubes d’acier, nouveau nom des Etablissements Pouchard, repart de plus belle jusqu’au décès de Francis Emile en 1938, et le déclenchement de la guerre.
C’est donc en toute logique que le fils aîné, Francis Paul Pouchard se retrouve aux commandes de l’entreprise familiale. A tout juste 30 ans, cet ingénieur centralien, ne restera pas longtemps sur place. Le 1er septembre 1939, la France déclare la mobilisation générale. Il fait partie des cinq millions de Français appelés à rejoindre l’armée. Deux jours plus tard, les Alliés déclarent la guerre à l’Allemagne. Un gérant est nommé pour diriger l’entreprise, mais son intérim sera de courte durée, avec le retour de Francis Paul Pouchard, après la signature de l’armistice en juin 1940 et l’Occupation de la France.
Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, l’étirage à chaud – fabrication initiale de l’usine de la rue du Centre – est remplacé par l’étirage à froid, qui devient la marque de fabrication des Etablissements Pouchard. La première décennie de l’après-guerre, marquée par la Reconstruction avec la relance économique nationale, la modernisation de l’outil industriel et la rationalisation de la production, verra l’entreprise acquérir le Cheval-Blanc. En vingt ans, les Etablissements Pouchard vont réussir à regrouper 34 000 m2 de terrains et devenir la première emprise industrielle de Pantin, devant la Manufacture des tabacs (2,3 ha), les chantiers Bernot (2,2 ha) ou les Grands Moulins de Pantin (1,5 ha). Les affaire sont florissantes et en juin 1958, l’assemblée générale des Etablissements Pouchard décide sa transformation en société anonyme, dont Francis Paul est nommé président. C’est au volant de sa Buick que Monsieur le Président se rend tous les matins à son usine de Pantin.
En 1972, le fils du président, Francis Serge (28 ans) entre dans l’entreprise avec en poche sa formation d’ingénieur de l’Ecole spéciale des travaux publics, du bâtiment et de l’industrie, et son diplôme de Sciences-Eco (Panthéon-Assas). Le passage de relais se profile à l’horizon et Francis III se prépare à régner. Mais il devra attendre 1985 avant de devenir président du conseil d’administration, suite à la démission de son père. En 1990, Francis Paul Pouchard décède à l’âge de 82 ans, dans sa maison de la rue Jules-Auffret. Il a dirigé l’entreprise familiale pendant 45 ans. Les années qui suivront l’an 2000 seront celles du déclin et du départ de Pantin. Suite à la crise et à la réduction de l’activité de 50%, le site du Cheval-Blanc est devenu surdimensionné. En 2016, les Etablissements Pouchard quittent définitivement Pantin. C’est la fin d’un cycle industriel et d’une industrie traditionnelle. Les sites de La Courneuve et Pantin sont réunis désormais sur une nouvelle plate-forme à Mitry-Mory en Seine-et-Marne, recentrant leur activité sur le négoce.
(1) Pouchard la saga du tube à Pantin. Lieux Dits Editions.
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