Bagnolet Théâtre Cirque

Fenêtres sur clown au Samovar

A Bagnolet, dans cet ancien garage, on travaille depuis 2000 sur la mécanique du rire et du jeu. A la fois école et théâtre, le lieu vient de boucler des travaux pour s’ouvrir encore plus sur la ville.

Ils sont passés par ici, ils reviendront par là… Au Samovar à Bagnolet précisément : l’école de clowns a célébré ce week-end la fin de ses travaux d’agrandissement, en conviant quelques-uns de ses anciens élèves à présenter leurs spectacles ou projets en cours.

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@Christophe Raynaud de Lage

Au cœur de cet ancien garage situé à deux pas du Château de l’Etang, ce sont les zygomatiques qui doivent coulisser et plus les pistons depuis 2000. Il y a dix-sept ans, l’école-théâtre a en effet quitté Paris pour rejoindre la Seine-Saint-Denis et patiemment réaménager cet espace de 700 m2 où prennent place, aujourd’hui, salles de spectacles et de répétition. Un lieu où les élèves-clowns pourront désormais passer par la fenêtre puisque après des travaux hivernaux, le Samovar s’est à la fois agrandi tout en s’ouvrant sur la ville, troquant sa façade fermée contre de larges baies vitrées. « Avant, avec les volets métalliques, le voisinage se demandait un peu ce qu’il se passait à l’intérieur, sourit Franck Dinet, le fondateur et directeur du lieu. On est pourtant au cœur de la ville et du département, parce qu’on a une action territoriale en allant dans les collèges, les lycées. Et si le théâtre est souvent un lieu refermé sur lui-même, ce n’est pas ce qu’on veut faire ici ! »

Une formation certifiante

L’ouverture, c’est un peu la spécialité du Samovar. A côté de sa formation professionnelle qui délivre en deux ans un titre d’artiste clown agréé par la Fédération Européenne des Ecoles de Cirque Professionnelles, le Samovar propose aussi des ateliers, des cours publics ou encore des stages ouverts aux amateurs. « Pour tous ceux qui ont des enfants qui veulent devenir comédiens, je leur conseille de passer d’abord par le Samovar, leurs cours de clowns ouverts au grand public sont très complets, explique Satya Dusaugey passé par Bagnolet en 2010 et désormais réalisateur et comédien. Ca vous apporte de la confiance et vous donne la liberté de savoir réagir face à l’imprévu. Et ça, c’est la base, si vous voulez être comédien, danseur, chanteur... »

Cours du soir, ateliers enfants ou stages d’été participent d’ailleurs de l’économie du lieu. « Dans ce milieu de la culture, c’est toujours une bagarre pour convaincre, pour être soutenu, explique Franck Dinet, les stages et les cours sont donc une activité importante pour nous. Ils nous permettent de financer 50 % de notre budget annuel (700 000 euros) en dehors des aides que nous recevons. »

Accepter d’être ridicule

Car pour être clown, mettre un nez rouge ne suffit pas. « Il faut déjà accepter de rire de soi, se blinder et se préparer à être ridicule et ce n’est pas forcément évident », raconte Patrick Koch, ancien professeur d’allemand dans un lycée en Suisse. Quelques stages déjà effectués au Samovar l’ont néanmoins persuadé de « changer de vie » et de faire le grand saut vers une formation de deux ans à Bagnolet : « Je n’ai pas trop d’attentes, car les débouchés ne sont pas évidents dans le milieu culturel. Mais j’ai envie de créer un spectacle et ici c’est sûrement ce qu’on peut trouver de mieux pour y arriver. On travaille à la fois sur le texte, l’expression corporelle, la musique. »

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@Christophe Raynaud de Lage

Trouver son "clône-clown" est en effet un exercice exigeant qui peut même avoir un côté analytique : « Etre clown, c’est être soi bien sûr, mais avec toutes ses faiblesses, ses émotions, ses névroses aussi, dans une société où aujourd’hui on a rarement le droit d’être fragile », pense Lucille Schliper, 30 ans, en deuxième année de formation et jusque-là "bergère-fromagère" en Dordogne. C’est pour ça que la formation ressemble un peu à un ascenseur émotionnel. » Bref, il y a des hauts et des bas pour les 35 élèves qui suivent les deux années de formation d’artiste clown. « Mais c’est aussi la plus belle des vies, se remémore Satya Dusaugey, tu te lèves le matin en te disant que tu vas te marrer et peut-être aussi faire rire les autres… Si tu ne te prends pas un bide ! »
Presque une méthode en soi pour apprendre à passer du rire aux larmes.

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