Christian Cordier, la couleur de la solidarité
Tout jeune retraité, cet ancien prof de sport au collège international de Noisy-le-Grand a choisi de se faire l’ambassadeur de l’olympisme en courant 2024 km jusqu’aux JO de 2024. Et son projet « De Lima 2017 à Paris 2024 », qui ne se veut pas que sportif mais aussi solidaire, a déjà fait des émules, notamment parmi de jeunes lycéens de Bondy.
Il court, il court l’ancien prof de sport. Déjà 469 km au compteur, en France mais aussi dans de nombreux autres pays. « Là, je viens de boucler un semi-marathon, à l’Ile Maurice, c’était magnifique, et je vais en faire un autre au Sénégal début 2020 », explique Christian Cordier d’un ton enjoué sur sa terrasse de Noisy-le-Grand. Encore 1500 bornes environ à couvrir d’ici au 26 juillet 2024, date du début des Jeux de Paris 2024. « Ça devrait le faire, je suis porté par les gens et par toute une énergie », renchérit cet éternel optimiste.
Donnons du sens à l’effort
Mais que diable est-il allé faire dans cette galère ? « C’est ma manière à moi de promouvoir l’olympisme, qui signifie à mes yeux l’excellence dans l’effort, le partage et la solidarité. A 63 ans, le temps des chronos est terminé pour moi, mais par contre, je peux aider, sur différents sujets. » Car Christian Cordier, dont la devise est « donnons du sens à l’effort » ne se contente pas de courir, non, il choisit à chaque fois ses courses en fonction d’une cause. « Ça peut être le soutien aux migrants comme quand j’ai couru à Vincennes avec le team Kabubu, une association qui aide à l’insertion des réfugiés par le sport, la promotion du développement durable, ou la sensibilisation au handicap via des joëlettes avec notamment l’association Un quart de plus (fauteuil tout terrain permettant de pousser des personnes handicapées). »
Pour comprendre ce qui fait courir Christian Cordier, il faut en fait prendre un peu de hauteur et monter au Machu Picchu, ancienne cité inca nichée dans les Andes. C’est là que cet ancien prof de sport, alors en dispo de son poste au collège international de Noisy-le-Grand, s’est perché le 13 septembre 2017 avec une banderole de la candidature de Paris aux Jeux 2024, au moment même où, en contrebas, à Lima, le CIO attribuait l’événement à la capitale française.
Quelques mois auparavant, ce citoyen du monde, qui connaissait déjà le Pérou pour y avoir organisé des voyages en tant que directeur d’un centre de vacances, y avait acheminé 300 kilos de matériel scolaire et médical et 10000 euros levés auprès de différents partenaires. Destination, le bidonville de Colliqué à Lima où 5 salles de classe sont sorties de terre, avec l’aide de l’association Pérou Amitié Solidarité. « Je voulais absolument lier olympisme et humanitaire, deux valeurs qui vont de pair selon moi. Ça a marché, et on a reçu là-bas la visite de Tony Estanguet et Anne Hidalgo », souligne Christian Cordier en montrant fièrement quelques photos. « Et quand j’ai voulu rendre la banderole au Comité d’organisation des Jeux, ils m’ont dit : on te fait confiance, fais en quelque chose d’utile pour la promotion des Jeux ». J’ai réfléchi un instant, et c’est là que j’ai eu l’idée de ces courses solidaires. »
Avoir la flamme
De Lima 2017 à Paris 2024, le chemin de cet ancien coureur de 400 m, désormais licencié au GANG, club d’athlétisme de Noisy-le-Grand, va aussi bien sûr passer par la Seine-Saint-Denis : en octobre, la Voie royale de Saint-Denis lui fera traverser l’ovale du Stade de France, et en novembre, il ajoutera 10 km au compteur avec la course d’Aulnay-sous-Bois. « Je suis fier de la Seine-Saint-Denis, mon département d’adoption. Parce que c’est une terre de champions et parce que c’est un territoire qui possède un potentiel extraordinaire, avec une jeunesse dynamique et riche de compétences. D’ailleurs, j’espère bien que ces gamins qui parlent le chinois, le portugais, l’arabe (langues enseignées au collège international), on va les mettre en valeur pour l’organisation des Jeux et même après. », insiste celui qui a fait du mot « transmission » son leitmotiv. Et de poursuivre, infatigable : « L’enjeu primordial, c’est d’associer notre jeunesse aux Jeux. Et bien souvent, elle n’a de cet événement qu’une image de façade. C’est pourquoi j’essaie toujours de montrer ce que le sport peut avoir de beau et de grand, en m’appuyant notamment sur le film La Couleur de la victoire, qui raconte l’histoire de Jesse Owens ».
Le projet "Je cours solid’R" des lycéens de Jean-Renoir Bondy
Cette transmission, cet ancien prof passé par les trois départements de l’académie de Créteil, à Fontainebleau, à Fresnes pendant 36 ans et donc à Noisy-le-Grand, la met aussi en œuvre sur le terrain. Voilà deux ans que le jeune retraité s’est mis en lien avec d’autres profs de sport de la jeune génération pour dynamiser les actions locales autour des Jeux.
Avec Frédéric Tisseau, un enseignant d’EPS de la cité scolaire Jean-Renoir de Bondy, ils étaient faits pour s’entendre : le projet de l’un, « Je cours Solid’R », une équipe de lycéens poussant des joëlettes sur des courses, devait forcément résonner avec la philosophie de l’autre. Le dernier fait d’armes de ces élèves de 15 ou 16 ans : avoir porté 5 personnes handicapées lors de la Journée olympique du 23 juin, avec une arrivée en fanfare place de la Concorde. « Quand tu vois ça, tu te dis que certains jeunes ont déjà tout compris au principe de solidarité et de partage et que ce sont eux les meilleurs ambassadeurs », s’émeut Christian Cordier qui mûrit déjà avec son acolyte la prochaine sortie de leur équipe de choc. Le 3 novembre, pour l’Ekiden de Paris (une course en relais sur 42 km), il est ainsi prévu que ces jeunes Bondynois courent à nouveau aux côtés de personnes handicapées, avec un VIP en plus : Aladji Ba, vice champion d’Europe du 400m non-voyant.
Et ce n’est pas tout. A la manière des joueurs d’échec, le frétillant Christian Cordier a toujours un coup d’avance. Lui qui court par monts et par vaux rêverait que ses jeunes Séquanodionysiens aient un jour les honneurs de la flamme olympique qui tôt ou tard traversera le département. « Quelle plus belle image pourrait-il y avoir que celle-là : des jeunes de Seine-Saint-Denis portant la flamme de Jeux qui vont se dérouler en grande partie chez eux… », lance-t-il, enthousiaste. Notez que la flamme, ce féru de course à pied l’a déjà dans les yeux. Et elle n’est pas près de s’éteindre.
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