Bernard Laurance, le monde à table
Depuis 2016, ce passionné de cuisine et de voyages, auteur de plusieurs livres, s’est installé aux Lilas où il propose des cours. Nous avons assisté à l’un d’entre eux, autour de la cuisine thaï. A partager sans modération à l’occasion de la semaine du goût !
« Pour moi, la cuisine, c’est l’évasion, le voyage ! » Pour ceux qui seraient un peu étourdis, Bernard Laurance fait les sous-titres. Car son atelier des Lilas, où ce blogueur-cuisinier organise depuis 2016 des cours collectifs et particuliers, regorge d’objets d’art et de babioles ramenés de ses escapades, rendant la pièce aussi colorée que les pages de ses livres à succès.
Ici, une statuette africaine à la ligne épurée, là un bouddha qui pointe ses bras vers la cuisine de l’atelier. Ça tombe bien, car le cours du jour porte justement sur la cuisine thaï. « On va faire deux incontournables de la cuisine thaï traditionnelle : un Pad Thaï, un plat de pâtes de riz sautées, ainsi qu’un Pad Si-lo, un plat de poulet avec du brocoli chinois », annonce ce grand passionné aux huit personnes inscrites à son cours, en ce samedi après-midi d’octobre. « Et en dessert, un petit Mango Sticky rice- du riz gluant à la mangue - dont vous me direz des nouvelles… », rajoute ce grand bavard, qui se damnerait pour une douceur, lui qui s’apprête à publier « Scandaleusement décadent », un livre qui recense une centaine de desserts.
A 42 ans, Bernard Laurance a beau avoir fait de sa passion son gagne-pain, ses yeux s’allument toujours dès qu’il est question d’art de table. Autodidacte, formé à l’école de la vie plutôt qu’à la table d’un chef étoilé, ce Parisien de naissance s’était toujours promis de publier un livre de cuisine comme ceux qu’il dévorait petit, là où d’autres lisent des romans d’aventure. « Mon livre de chevet, c’était "Faites votre pâtisserie comme Lenôtre", glisse-t-il, comme si c’était hier. Un blog didactique et richement illustré, Lacuisinedebernard, lancé en 2010, l’aura aidé à se frayer à son tour un chemin jusqu’aux grandes maisons d’édition avant qu’il ne goûte aussi à la télé, sur l’ancienne chaîne Cuisine plus.
Dans sa cuisine, en chair et en os, on retrouve d’ailleurs le ton de son blog : pédagogique et passionné. Précis aussi, avec une quête de l’authenticité quasi-anthropologique. « Pour accompagner le Pad Si-lo, on va préparer nous-même la sauce car je ne l’ai jamais retrouvée ici dans le commerce. Mais ne vous inquiétez pas, j’ai comparé avec celle que j’avais ramenée de là-bas : c’est rigoureusement la même... »
Pédagogique et humain
Mais d’abord, en route pour le Pad Thaï. Après une première démonstration où Bernard Laurance prend soin de détailler les différentes étapes, chacun·e est invité·e, en doublons, à passer aux travaux pratiques. « Ne lésinez pas trop sur l’huile. La cuisine asiatique, c’est avec du gras, sinon c’est pas bon », lâche le chef, façon Maïté. Devant leur petit wok portatif, chacune des paires s’affaire. Certains arrivent d’assez loin, comme ce couple d’Angevins, qui s’est fait offrir l’atelier par ses filles. D’autres en revanche sont de Seine-Saint-Denis, et même du coin de la rue. « J’ai découvert le blog de Bernard à ses débuts et j’ai tout de suite aimé son ton pédagogique, humain aussi parce qu’il prend toujours le temps d’évoquer la culture du pays dont est issue la recette », raconte Sylvie, qui habite « mais vraiment juste à côté ». « Et quand je me suis aperçue que son atelier était en fait à deux pas de chez moi, c’a été le choc », décrit avec humour cette Lilasienne.
Une autre Sylvie, venue elle de Neuilly-sur-Marne avec sa belle-fille Chloé, n’en est pas à son premier atelier. « La première fois, on avait confectionné des pastéis de nata (petits flans à la crème du Portugal), et j’avais été bluffée par le souci du détail de Bernard, sa quête quasi obstinée pour s’approcher au plus près de la recette traditionnelle », s’émeut encore la Nocéenne.
Dans le délicieux fumet aigre-doux du Pad Thaï, la timidité des participants fond comme un sorbet et les langues se délient. Sylvie la Lilasienne et Peter font connaissance autour de leur wok, les Angevins prennent une photo du plat pour leurs filles, et Bernard arrose tout ça d’une petite blague. « Quand vous ferez ça chez vous, ne vous trompez pas de tofu, ne prenez pas du tofu fumé, sinon vous aurez un Pad Thaï façon saucisse de Toulouse… »
Tout à coup, les commentaires des convives et le rissolement des ingrédients nous parviennent de manière feutrée. Le Pad Thaï façon Bernard Laurance nous a transportés sur un marché de Bangkok, et onn’ est pas pressés de revenir.
Christophe Lehousse
– « Scandaleusement décadent », 288 pages, paraîtra en novembre, chez Flammarion
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