Handicap

Au Foyer d’accueil médicalisé des Myosotis, le sport comme levier d’inclusion

Alors que se tient la Journée internationale des personnes handicapées le 3 décembre, le Foyer d’accueil médicalisé (FAM) des Myosotis, à Tremblay-en-France, est très engagé depuis plusieurs années sur la pratique sportive de ses résidents, des adultes qui présentent un lourd handicap mental. Une démarche qui apporte de nombreux bénéfices et qui devrait prochainement se développer hors les murs de l’établissement. Reportage

10 heures. La salle de psychomotricité du Foyer d’accueil médicalisé (FAM) des Myosotis, à Tremblay-en-France, se remplit doucement. Les résidents de ce centre médico social, qui propose un hébergement et un accompagnement à tout adulte handicapé gravement dépendant et qui est cofinancé par le Département et l’Agence régionale de santé (ARS), patientent sur une chaise le temps que l’atelier hockey se mette en place. Aux commandes, Adeline Mulard, enseignante en activité physique adaptée (APA) aux Myosotis depuis quatre ans. Sur le sol, des crosses, des balles en plastique, un but et des cerceaux soigneusement entreposés. La séance peut commencer… En fait, non car il manque un détail : la musique, sans laquelle Fabrice, fervent amateur des ateliers sportifs proposés par Adeline, refusera de se lever de sa chaise. Ce matin, ce sont Dalida, Sheila ou encore Sylvie Vartan qui ont ses faveurs. « Fabrice adore les chanteurs des années 60 et 70, détaille Adeline. La musique le stimule et lui donne des repères, elle lui est indispensable. En plus, cela met un peu d’ambiance. »

Dans son cerceau, Kahina s’impatiente. « Mariétou ne veut pas me faire la passe. Allez, plus vite ! » Quand la balle lui arrive et qu’elle marque un but, c’est l’effusion de joie dans la salle. Et quand Alain ou Fabrice se muent à leur tour en buteurs, ils lèvent le pouce ou tapent dans la main de l’enseignante pour célébrer leur exploit. « Exploit », le mot est faible si l’on se réfère aux progrès réalisés ces dernières années ou derniers mois par les résidents du FAM, dont certains présentent un handicap mental lourd associé parfois à un handicap physique. « Fabrice est un ancien obèse qui passait ses journées à ne rien faire il y a encore quelques années, explique Adeline. Depuis qu’il participe aux ateliers sportifs, il va beaucoup mieux. Il est fidèle au poste tous les mercredis. »

L’activité physique adaptée, génératrice de lien social

La séance de hockey sera suivie d’une session boxe, animée cette fois par Aziz Kerfal, autre enseignant APA, et durant laquelle Thomas, Gwenaëlle et Youssef prennent un plaisir fou à taper dans les sacs de frappe ou les mini-ballons. « Au gré des ateliers, on constate les évolutions. Les premiers temps, il n’y avait pas grand monde. Aujourd’hui, la plupart des participants arrivent en avance », fait remarquer Aziz. Il va sans dire que l’activité physique adaptée, que l’ARS définit comme une thérapeutique non médicamenteuse, comporte de nombreux bienfaits : par-delà la qualité de vie et la condition physique qu’elle améliore, elle est génératrice de lien social. « On les encourage, on les valorise et cela leur fait du bien », résume Aziz.
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En plus du hockey et de la boxe, les deux enseignants APA dispensent du tir à l’arc, du tricycle, de la marche adaptée et du circuit training (exercices de renforcement musculaire). « Evidemment, les exercices qu’on propose sont réalisés en fonction des aptitudes de chacun », souligne Aziz. Sur un plan purement sportif, l’objectif final ne varie pas d’un iota : lutter contre la sédentarité, qui guette chaque résident, et consolider les acquis.

Si Adeline fait preuve d’un engagement remarquable au FAM, elle ne ménage pas ses efforts en dehors. La jeune prof mène en effet plusieurs projets de front qui ont pour but de favoriser les rencontres entre valides et personnes en situation de handicap. « Nous sommes en train de négocier un partenariat avec le club de gymnastique sportive local, le TAC Gym, pour sortir nos résidents de leur isolement [sur les 36 personnes accueillies chaque jour, 28 sont internes], les ouvrir à d’autres pratiques et d’autres publics qu’on souhaiterait faire venir dans nos locaux  », raconte Adeline. Une initiative qui s’adresse également aux occupants de l’Ehpad Solenne, situé à quelques encablures, de façon à ce que les personnes âgées viennent elles aussi profiter du matériel flambant neuf dont s’est récemment doté le foyer. Seul frein, la situation sanitaire. « Espérons que la prochaine campagne de vaccins porte ses fruits », croise les doigts Adeline.

Les valeurs du rugby

Par ailleurs, les Myosotis sont en lien avec les élèves de la filière STAPS APA-S de l’université Sorbonne Paris Nord (ex-Paris 13), où Adeline donne des cours, pour monter une autre opération. « Quand la situation sera revenue à la normale, j’aimerais faire venir un groupe d’étudiants au foyer pour mettre en pratique tout ce qu’ils ingurgitent en cours et, en retour, permettre à nos résidents de se déplacer à la fac pour qu’ils découvrent un endroit différent, nouveau et qui leur est de prime à bord inaccessible », dévoile-t-elle. « Au Foyer d’accueil médicalisé des Myosotis, nous accordons beaucoup d’importance à l’activité sportive qui constitue un vecteur de bien-être, de socialisation et d’inclusion indéniables, fait valoir le directeur de l’établissement Franck Truaud. Je suis issu du monde du rugby - où, c’est bien connu, le sens du partage, de la convivialité, des valeurs sont exacerbées – et pars du principe que ce qu’on peut faire avec un public on peut le faire avec tous les publics. Ici, cela fait dix ans que cela dure et ça n’est pas prêt de s’arrêter. »

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