8 mars, paroles de sportives

8 mars, paroles de sportives
Egalité femmes-hommes

Elles sont handballeuse, rugbywoman ou encore judoka de haut niveau, toutes licenciées en Seine-Saint-Denis. A l’occasion de la journée internationale des droits des femmes, nous leur avons demandé si on pouvait parler d’égalité femmes-hommes dans leur sport et comment celui-ci avait évolué au cours de leur carrière. Pour les trois, la réponse est assez unanime : il reste du chemin à parcourir.

Isaure Mosabau (Noisy-le-Grand handball) : « Pas de place au sexisme »

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« Non, il n’y a absolument pas d’égalité hommes-femmes dans le hand. » Comme sur un terrain, Isaure Mosabau n’y va pas par quatre chemins pour intervenir. La handballeuse voit au moins quatre sujets sur lesquels il faudrait progresser rapidement dans son sport : « les salaires, la reprise après une grossesse, souvent trop chaotique, la médiatisation et bien sûr le sexisme. »
Reconnaissante, cette Louve de Noisy a conscience d’être dans un club-ovni, qui a fait de son équipe première féminine son équipe vedette. « Ca fait plaisir, mais est-ce que ça arrive ailleurs ? Pas vraiment », estime la capitaine du Noisy-le-Grand handball.
Dans ce club qui évolue en 2e division féminine, les joueuses ont des statuts mélangés : 8 sont pro, d’autres étudient et 5 travaillent en parallèle de leur carrière de hand. A l’image d’Isaure Mosabau, assistante de direction dans un cabinet d’architecture. « Ca me fait des longues journées, mais ça m’apporte aussi autre chose que le hand, des problématiques différentes », explique la pivot.
S’il est un domaine où il faut agir en priorité pour Isaure, c’est sur les préjugés. « Moi-même, j’ai souvent entendu « le hand c’est pas un sport de filles », « tu vas avoir un corps d’homme ». Pire, j’ai même parfois eu des entraîneurs dont on voyait bien qu’ils ne croyaient pas en nous », se souvient celle qui a commencé le hand à 12 ans à Vitry-sur-Seine. « Heureusement, j’ai un papa qui nous a toujours soutenues dans nos envies, voire nous a encouragées à choisir des sports où ça frottait », poursuit Isaure qui aura suivi l’exemple de sa grande sœur, handballeuse avant elle. Joueuse collective, elle renvoie aussi vers l’action menée par sa coéquipière Amina Tounkara : avec son association Hand’Joy, cette gardienne, qui s’est heurtée à sa propre famille pour pouvoir continuer le hand, s’efforce de faire le tour des écoles pour inciter les jeunes filles à dire non aux préjugés.

Lou Noël (AC Bobigny 93) : « Mon club est atypique »

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« Il nous faudrait plus de visibilité et de médiatisation… » D’une voix posée, Lou Noël décline ce qui serait selon elle l’urgence N°1 de son sport : le rugby. « Nous les filles, on n’est vraiment pas prioritaires sur l’investissement dans les clubs, même si le mien fait sans doute exception », explique celle qui joue depuis 2 ans maintenant à l’AC Bobigny 93, un club qui a choisi de faire de son équipe première féminine en Elite 1 sa vitrine principale.
« C’est bien simple : aucun match de l’Elite 1, pourtant le plus haut niveau français, n’est télévisé. Et les fois où on parle de nous dans la presse spécialisée, type Midi Olympique ou L’Equipe, sont très rares. Ca n’incite pas les filles à aller vers le rugby ni les clubs à miser sur nous », souligne celle qui ne vit de son sport que grâce à un contrat avec la fédération. Internationale à 7 et visant les JO 2024, elle fait partie des 60 chanceuses (32 contrats pour le rugby à 15, 24 pour le 7) à bénéficier d’un CDD qui lui permet de se consacrer presque exclusivement à la pratique de son sport (elle mène en parallèle des études aménagées de kiné).
Le sexisme ? Elle n’en a pas trop souffert, elle qui a commencé le rugby sur le tard. « Il y avait bien deux-trois remarques pas très fines, vu que j’étais la seule fille de mon lycée (dans la Drôme) à faire du rugby, mais pas plus que ça. En général, je répondais que j’avais deux bras et deux jambes comme tout le monde, que le rugby est certes rugueux, mais qu’il n’attire pas non plus tous les garçons, donc pourquoi pas… », évacue, placide, la joueuse de 22 ans. Et de relancer : « Par contre, oui, je trouve ça important de militer pour que dans la tête des parents, ce soit ancré que peu importe ton sexe, tu puisses faire le sport dont tu as envie… »

Madeleine Malonga (Etoile Sportive Blanc Mesnil) : « Je ne me suis jamais laissée faire face au sexisme »

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« Je dirais quand même qu’au judo, on est assez bien lotis en termes d’égalité femmes-hommes. » Madeleine Malonga liste les points où le schmilblick a avancé dernièrement en termes d’égalité femmes-hommes : dans l’épreuve par équipes des JO par exemple, il y a le même nombre de femmes que d’hommes, idem au conseil d’administration de la fédération de judo, et « en termes de salaires, on ne doit pas non plus être loin de l’égalité. En revanche, on est loin des salaires des footeux… ».


Pourtant la judoka de l’Etoile Sportive du Blanc-Mesnil n’est pas du genre à jouer les agneaux. Quand ça ne va, elle n’hésite pas à balancer, comme sur le tatami. « Le sexisme est là, mais comme dans toute la société. Ca m’étonnerait qu’on trouve une seule femme qui n’a jamais été victime d’une remarque sexiste », parie « Mado ».
Et d’embrayer : « « Le judo, c’est pas un sport de filles », mais c’est un truc que j’entends depuis toujours ! Je me souviens des remarques narquoises des garçons : « vous, vous faites pas du judo, vous faites du taiso (forme plus douce, visant surtout le bien-être et la relaxation)… » Mais face à ce genre de remarques, je ne me suis jamais laissée faire. Je répondais : « peut-être, mais nous on gagne… », s’amuse la vice championne olympique en titre, qui attend de pied ferme les Jeux de Paris 2024.


Pas de raison pour la judoka de s’alarmer pour autant : « J’ai l’impression que ça va dans le bon sens. Sur les tatamis en tout cas, le boulot d’éducation est fait. » Et de prendre en exemple son club de l’ESBM : « dans les catégories jeunes, filles et garçons combattent ensemble, et les filles ne sont pas en retrait. Je les vois épanouies », estime celle qui a pour sa part commencé le judo à Chambly, passant de la danse au judo pour faire comme sa petite voisine.

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