Sécurité Mobilité

Faire route ensemble…

Sécuriser les grands axes routiers, améliorer la place réservée aux piétons et aux cyclistes, le Plan Mobilités Durables (PMD) commence à tracer son chemin en Seine-Saint-Denis.

C’est au sprint que Jeff rejoint le carrefour Pleyel, presque à la vitesse d’un contre-la-montre du Tour de France… Le mois d’août est tranquille mais ce Dyonisien de toujours apprécie de pouvoir pédaler sur un asphalte bien lisse et sur une bande cyclable délimitée. « Ça n’a l’air de rien cette bande cyclable mais elle va nous rendre la vie beaucoup plus facile, c’est bien d’organiser le partage de la chaussée avec les automobilistes et les piétons, que chacun trouve toute sa place. »
Cette bande cyclable est l’un des premiers chantiers menés dans le cadre du Plan Mobilités Durables 2016-2020 adopté le 30 juin dernier par l’Assemblée départementale. Soit un effort de 50 millions d’euros d’investissement supplémentaires d’ici 4 ans pour moderniser l’ensemble du patrimoine routier du Département.

La sécurité et le déplacement des personnes à mobilité réduite sont au cœur des réflexions.

À l’échelle des 40 communes de Seine-Saint-Denis, environ une centaine d’actions concertées seront engagées, à plus ou moins grande échelle, sur le réseau routier départemental pendant cette période. Bref, les chantiers vont se déployer tout au long des 345 kilomètres de routes départementales avec, parmi les travaux les plus conséquents, le lancement de la transformation de l’ex-RN 2 en véritable boulevard métropolitain. Tout au long de l’axe qui traverse Aubervilliers, La Courneuve, Le Bourget et Le Blanc-Mesnil, stationnements, carrefours, cheminements des piétons, voies cyclables seront réaménagés. La sécurité sera au cœur des réflexions, par exemple en sonorisant des traversées d’artères ou encore en facilitant les déplacements des personnes à mobilité réduite grâce à l’abaissement systématique des trottoirs à chaque passage piéton.

« Ces travaux me rassurent »

À Sevran, dans le quartier Rougemont, on en a désormais fini du dangereux parcours du combattant le long de l’avenue John-Fitzgerald Kennedy. Au cœur de l’été, les trottoirs de part et d’autre de la chaussée ont été rénovés ou recouverts d’un bitume flambant neuf (un investissement de 250 000 €). « Regardez, là il commence à pleuvoir, sourit cette mère de famille sevranaise qui rentre chez elle en cette fin de chaude journée d’août. D’habitude on aurait pataugé dans la boue et il aurait fallu slalomer avec les poussettes pour éviter les trous dans le trottoir : là on va enfin apprécier la pluie qui vient nous rafraîchir ! »

Un peu plus loin, c’est la sécurisation des abords du collège Paul-Painlevé qui vient d’être mise en chantier. Une action engagée hors du PMD mais qui le complète utilement. Ces travaux permettent à la fois d’abaisser la vitesse des voitures et de sécuriser les traversées piétonnes des collégiens.
Des travaux que scrute de près Mohammed : « Je suis nouveau dans le quartier, explique ce père de famille quadragénaire, et mon fils va faire sa rentrée ici. Je suis venu observer un peu l’environnement du collège, me rendre compte s’il est possible qu’il fasse le chemin jusqu’à la maison à vélo. Ces travaux me rassurent… »

« Le vélo, c’est simple ! »

24 collèges du Département seront concernés par des opérations d’aménagement pour offrir aux collégiens des abords confortables et sécurisés, avec également la création de liaisons cyclables.
Et, toujours rayon vélo, la mutation de la piste cyclable du canal de l’Ourcq en véritable voie verte va passer sur le grand braquet et accélérer. De nouveaux enrobés photovoltaïques permettront notamment de profiter de l’ensoleillement du canal pour alimenter en énergie les équipements implantés à proximité.

Les abords de 24 collèges seront aménagés pour offrir aux élèves un environnement confortable et sécurisé.

À commencer par l’initiative de cet été dans le parc départemental de la Bergère sur les pratiques cyclables en préfiguration de la Maison du vélo, qui sera installée près du canal et dont rêve déjà tout haut Patricia Billoir, présidente de l’association Libres & Gonflé(E)s de Bobigny. Tout l’été, avec d’autres associations du département, elle a prodigué sur la piste de l’Ourcq ses conseils de mécanique et remis en selle quelques personnes qui avaient oublié que le vélo ne s’oublie pas.
«  Le vélo, c’est simple, clame-t-elle. Il n’y a pas besoin d’être un mâle très viril pour s’occuper de sa mécanique. Savoir pédaler est surtout une question de confiance, de levée des inhibitions… De volonté politique, aussi, et c’est bien que le Département s’y mette en lançant un plan où le vélo a toute sa place, parce que tout est à faire. Il faut créer les structures afin que les gens se rendent compte qu’il est possible de laisser sa voiture au garage… »
En profitant, pourquoi pas, de la future « route des parcs » qui serpentera au cœur des poumons verts du département et tracera de nouveaux itinéraires préservés. Au total, ce sont ainsi 30 km de voies cyclables qui seront créés en Seine-Saint-Denis dans le sillage du Plan Mobilités Durables. Alors, en selle !

JPEG - 27.2 kio

Christophe Gobert, commercial installé à Gagny
Avancer ensemble
« Pour rouler au quotidien en voiture et à moto sur les routes du département, je me rends compte que les espaces publics sont souvent mal partagés entre les piétons, les cyclistes et les automobilistes. Plus on avancera ensemble, plus la Seine-Saint-Denis ira de l’avant… »

JPEG - 28.8 kio

Kiki Lambert, porte-parole de Mieux se déplacer à bicyclette
Du vélo solidaire
« Lorsqu’on refait des routes, il faut que le vélo puisse prendre toute sa part aussi en développant des services à destination des cyclistes. C’est une excellente manière de développer des emplois locaux, de créer également du lien social, de la solidarité en ville. »

JPEG - 33.8 kio

Joël Sick, président de l’association Insertion et culture vélo
Une question d’éducation
« Promouvoir le vélo, c’est aussi une affaire d’éducation auprès des jeunes et des scolaires. Il faut des éducateurs pour le vélo comme il y a des éducateurs pour le foot. C’est un travail qui ne se fera pas en cinq minutes mais on l’a déjà commencé avec les écoles de Seine-Saint-Denis. »

JPEG - 32.4 kio

Hamid Draoui, restaurateur à Saint-Denis-Pleyel
Un potentiel à valoriser
« L’aménagement de la voirie n’est pas encore au niveau des JO 2024, surtout pour les cyclistes et les piétons. Les touristes étrangers sont souvent étonnés de notre retard en la matière. Mais le potentiel est là : un Plan Mobilités Durables ne peut que le valoriser. »

JPEG - 144.8 kio

Permettre l’éco-mobilité

L’Europe via l’Ourcq
L’EuroVélo 3, appelée la Scandibérique en France, est une piste cyclable qui part de Trondheim, en Norvège, et se termine à Saint-Jacques de Compostelle en Espagne. Elle intègre 41 km de la piste de l’Ourcq. L’inauguration nationale de la Scandibérique est prévue en juillet 2017.

S’ouvrir sur le Grand Paris
Cinq nouvelles gares du Grand Paris Express – sur les 22 implantées en Seine-Saint-Denis – seront situées sur l’axe de l’ex-RN 2 reliant Paris au Bourget. Amélioration de la qualité des espaces publics, résorption des points noirs liés à de nombreux accidents figurent parmi les points forts de l’opération de réhabilitation menée à partir de 2018 pour un montant de 4 200 000 euros.

Accompagner l’économie locale
L’accompagnement des projets de ZAC des communes est un des différents volets du PMD. L’objectif ? Assurer des dessertes efficaces de ces nouveaux îlots de développement. Onze sites, parmi lesquels l’ex-RN 302 et actuelle rue de Paris à Montreuil ou l’avenue Galliéni à Bagnolet ont été identifiés pour des travaux programmés entre 2018 et 2020. Montant estimé de l’enveloppe budgétaire : 13 850 000 euros.

Un « collège » de travaux
5 195 000 euros seront mobilisés pour sécuriser le cheminement des collégiens aux abords d’une dizaine de nouveaux collèges et d’une quinzaine d’autres situés à proximité d’un axe départemental.
Vingt communes sont concernées.

En boucle
La réalisation d’aménagements facilitant la circulation des bus est au programme avec, par exemple, la mise en place de boucles de détection des véhicules permettant de donner la priorité aux transports en commun aux feux tricolores. 800 000 euros sont dédiés à ce programme sur les voies dédiées aux bus.

Déplacements connectés
Grâce à l’accès aux données de circulation en temps réel, chacun pourra via son smartphone opter
pour le mode de déplacement le plus adapté et le plus rapide. La Seine-Saint-Denis s’appuie déjà sur son système Gerfaut II qui régule plus de 600 carrefours à feux tricolores.

JPEG - 31.8 kio

Trois questions à ... Stéphane Troussel

En mettant en place ce Plan Mobilités Durables, vous accélérez la modernisation du patrimoine routier de la Seine-Saint-Denis. C’est une urgence ?

Oui, il s’agit de répondre à une attente forte et légitime des habitants, car le réseau routier est vieillissant. Je rappelle que 50% de ces routes ont été héritées de l’État après des années de sous-investissement chronique. Nous avons donc décidé de mettre en place ce plan exceptionnel de 50 millions d’euros qui vient en plus des 17 millions d’euros par an, soit une augmentation de 70% pour les 4 prochaines années. L’un des objectifs est d’améliorer la sécurité notamment à proximité des 24 nouveaux collèges que nous construisons. Nous voulons aussi favoriser tous les usages de la route, pour les automobilistes, les transports en commun, les cyclistes et les piétons…

Vouloir partager la voirie en toute sérénité, n’est-ce parfois un peu utopique ?

Nous devons à la fois accompagner les changements de comportements et les mutations du territoire, qui sont indispensables. Ce département, comme d’autres, a été façonné sous le règne du tout-voiture et il est traversé de routes dangereuses et polluantes. Combien de trottoirs de nos villes sont ainsi impraticables en poussette ? Je pense aussi aux ex-RN 2 et 3 où il faut tout refaire pour rendre leur place aux habitants. Il ne s’agit pas de chasser la voiture mais d’offrir des alternatives efficaces. L’utopie, c’est aussi de réaliser des aménagements les plus écologiques possibles. Nous allons tester des matériaux innovants, moins bruyants, utiliser l’énergie solaire, abandonner les produits phytosanitaires, programmer des plantations d’arbres d’alignement…

Ces gros travaux vont-ils bénéficier à l’ensemble du territoire ?

Les 40 communes du département sont concernées directement par ce plan. Nous avons trop souffert collectivement des inégalités territoriales pour vouloir les reproduire, et les solutions à mettre en place ne peuvent s’arrêter aux frontières de telle ou telle ville. Jusqu’au terme du mandat, nous allons irriguer tout le département de ces projets de transformation profonde. Après avoir accueilli la COP21, la Seine-Saint-Denis doit être encore plus exemplaire dans les années à venir.

Découvrez l’expérimentation de matériaux innovants en Seine-Saint-Denis
Retrouvez le portrait de Marla, fondatrice des Ciseaux à roulettes

Photographies : Bruno Levy, Franck Rondot

Dans l'actualité